On n’a plus les parties de thé qu’on avait

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Publié 10/11/2010 par François Bergeron

Les Démocrates ont subi de sérieux revers le 1er novembre, aux législatives américaines de mi-mandat, perdant la majorité à la Chambre des représentants mais conservant le contrôle du Sénat.

Les élections de mi-mandat profitent rarement au président. Bill Clinton, notamment, avait dû se réinventer après une cuisante défaite des Démocrates, mais il avait été réélu deux ans plus tard. Ronald Reagan aussi avait fait face à un Congrès hostile avant d’être réélu. Ce sera plus difficile, mais pas impossible, pour Barack Obama.

Plus difficile, car l’économie, fragilisée depuis longtemps par un endettement public et privé inconsidéré, ne s’est pas remise du choc de 2008, auquel la nouvelle administration a répondu par un endettement encore plus effarant et une expansion peu productive du secteur public.

Pas impossible, car les Républicains, noyautés par le Tea Party, sont plus divisés que jamais et ne pourront probablement pas s’entendre sur un candidat présidentiel crédible qui pourrait bloquer Sarah Palin.

Les commentateurs ont ri dans leur barbe, l’an dernier, quand la colistière de John McCain en 2008 a quitté son poste de gouverneure de l’Alaska pour devenir conférencière itinérante. On trouve ça moins drôle aujourd’hui. Sarah Palin accumule lentement mais sûrement de solides appuis au sein du Parti républicain comme à l’extérieur. Elle teste et raffine son discours. Peut-être même approfondit-elle sa connaissance des dossiers importants; on verra.

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Le libertarien Ron Paul intéresserait les indépendants, de plus en plus nombreux, mais c’est un original dont les propositions de réductions des dépenses fédérales n’excluent pas les budgets militaires, qui sont encore des vaches sacrées chez les Républicains.

Le Tea Party a fait élire des sénateurs au Kentucky (Rand Paul, le fils de Ron) et en Floride (Marco Rubio, dans une triangulaire impliquant un ex-Républicain indépendant), mais il a perdu au Delaware après avoir évincé le Républicain modéré. C’est ce dernier scénario qu’on prédit pour Barack Obama, qui pourrait donc être réélu en 2012 si Sarah Palin ou un autre fanfaron réussissait à s’imposer chez les Républicains.

Baptisé ainsi en référence à la révolte de 1773 des Bostonnais contre le contrôle britannique du commerce dans les colonies, qui a mené à la Déclaration d’Indépendance américaine en 1776, le Tea Party s’oppose officiellement aux débordements «inconstitutionnels» du gouvernement fédéral dans les juridictions des États (comme le nouveau régime d’assurance-maladie, contesté devant les tribunaux pour cette raison).

Par extension, ces nouveaux «patriotes» américains associent les empiètements de Washington à la croissance de l’État en général, symbolisée par les coûteuses interventions pour sauver les banques, l’automobile et d’autres secteurs en difficulté, ce qui n’a pas empêché le chômage d’augmenter. D’où les discours sur l’allègement du gouvernement et la promotion d’un mode de vie axé sur la responsabilité individuelle (par opposition à l’État-Providence symbolisé, encore ici, par l’assurance-maladie obligatoire).

Sur le terrain, toutefois, ces questions de séparation des pouvoirs et de système économique ne suscitent pas – chez ceux-là même qui les soulèvent – autant de passions que la guerre et la religion: les promesses de budgets militaires illimités et de guerre au terrorisme tous azimuts, contredites par un soi-disant respect de la vie qui recriminaliserait l’avortement.

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Le site internet de Rand Paul, par exemple, fait valoir ses positions sur «les taxes et la dette», «la santé», «la réserve fédérale», «la vie privée et la liberté», «l’innovation en matière d’énergie» et… «la vie», seul item non économique ou non constitutionnel, dans lequel le candidat sort des généralités pour se déclarer «100% pro-vie», opposé à l’avortement dès la conception.

Il y a fort à parier que, pour ses électeurs du Kentucky, c’est ça qui l’a vraiment distingué de son adversaire démocrate (battu). Dans les clips vidéos les plus en évidence sur son site, Rand Paul ne discutait pas de politique monétaire ou d’indépendance énergétique, mais bien de ses convictions chrétiennes, dont son adversaire aurait bassement douté…

L’usage que feront les Républicains de leur nouvelle influence au Congrès sera déterminante. Ils s’étaient autodétruits sous Clinton. Pour l’instant, galvanisés par leurs récents succès électoraux, ils ne paraissent pas plus prudents sous Obama.

Auteur

  • François Bergeron

    Rédacteur en chef de l-express.ca. Plus de 40 ans d'expérience en journalisme et en édition de médias papier et web, en français et en anglais. Formation en sciences-politiques. Intéressé à toute l'actualité et aux grands enjeux modernes.

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