Oasis rêve à «l’abolition» de la prostitution

Débat national sur la décriminalisation du plus vieux métier du monde

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Publié 02/07/2013 par Nicolas Dot

Début juin, la Cour suprême du Canada planchait sur la constitutionnalité des lois régissant la prostitution dans le pays.

Plusieurs groupes de citoyens, et notamment de femmes, aux convictions et idéaux différents, y sont allés de leurs suggestions. C’est dans ce contexte que l’organisme Oasis centre des femmes a soulevé, auprès d’un public féminin venu en bon nombre mercredi dernier, des questions et des débats à ce sujet.

«Décriminalisation, légalisation ou abolition, voilà les trois options qu’a la Cour suprême», a soutenu Lyba Spring, éducatrice en santé sexuelle. 

Un «fléau»

«La prostitution n’est pas un mot qui nous plaît. C’est un fléau.» C’est par cette phrase que Dada Gasirabo, directrice générale d’Oasis, a ouvert le bal.

Les dialogues ont été nombreux, les sujets variés, les opinions prononcées. Tout d’abord, la question de savoir si la prostitution doit être davantage criminalisée ou décriminalisée a été évidemment essentielle.

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Pour Oasis Centre des femmes, il est hors de question de criminaliser le plus vieux métier du monde, c’est-à-dire d’infliger amendes ou emprisonnement aux prostituées, car cela ne ferait qu’envenimer les choses.

«Criminaliser la prostitution créerait un cercle vicieux. Les travailleuses du sexe seraient plus endettées encore et ne feraient que se prostituer davantage», disait Roza Belaï, gestionnaire de projets à Oasis.

Décriminaliser ou légaliser?

La décriminalisation semble être donc privilégiée, mais cela ne remédierait pas à tous les problèmes, loin de là. Afin d’épurer cette industrie «nuisible», il s’agit d’aller plus loin.

«La prostitution déshonore la femme et il faut tout faire pour que cette activité soit totalement illégale», insiste une des nombreuses femmes présentes mercredi pour participer à cet après-midi de questionnement et de sensibilisation.

D’un point de vue juridique, la prostitution est «semi-légale» au Canada, explique Mme Belaï. En effet, l’acte en lui-même est légal, mais l’établissement de maisons closes, le proxénétisme et le racolage dans les rues s’avèrent illégaux.

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C’est pourquoi une seconde question se pose après celle de la décriminalisation: faut-il légaliser entièrement la prostitution afin de mieux la contrôler, cerner ses problèmes et sanctionner ses excès?

Réduire la violence

La légalisation permettrait certainement d’éviter que la femme soit une cible aussi facile et donnerait la possibilité aux travailleuses du sexe de porter plainte devant la loi, en cas d’abus ou de relation sexuelle non consentie.

Les clients ressentiraient peut-être aussi une menace plus forte qui les empêcherait de profiter de ces relations tarifées pour littéralement violenter leur proie. «S’il n’y a pas de loi, alors c’est dangereux», disait une des participantes au débat. 

Abolir la prostitution?

Mais encore une fois, la légalisation n’est pas une solution idoine pour Oasis Centre des femmes, qui veut être encore plus ambitieux.

«La prostitution est devenue une industrie dangereuse et, de ce fait, nous sommes tous à Oasis, en faveur de son abolition», insiste Dada Gasirabo.

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Pour justifier cette position radicale, et pour interroger l’auditoire féminin venu participer au débat, la directrice générale du Centre s’est appuyée sur des chiffres.

En effet, on estime à plus de 95% le pourcentage de prostituées qui voudraient quitter cette industrie malsaine. «On doit chercher à comprendre pourquoi une femme choisit la prostitution, et nous sommes là pour sensibiliser et éduquer, pour faire en sorte que nos filles ou petites filles ne rentrent pas dans cette arène de lions», s’insurge Mme Gasirabo.

Certaines personnes peuvent qualifier l’abolition de la prostitution comme «pure utopie», ou comme «fausse solution». Peu importe, Oasis Centre des femmes, parmi d’autres groupes féministes canadiens, se fixe cet idéal.

On imagine donc que, quel que soit le verdict de la Cour suprême (dans six mois), le débat national, lui, se poursuivra.

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