Le «Mois de l’Histoire des Noirs», souvent célébré en son et en musique, a été dominé cette année par une note discordante: il s’agit, on l’aura deviné, du vote par le Conseil scolaire anglophone autorisant la création des écoles noires.
Cette initiative serait justifiée par le fait que les enfants ne se reconnaissent pas dans des programmes, généralement eurocentristes, dispensés par des enseignants pleins de préjugés. Si cette question ne se pose pas encore au sein de la communauté noire francophone, il serait illusoire de croire que le problème n’existe pas. Bien au contraire, un malaise réel existe, et tous les ingrédients constitutifs d’une quête de solutions alternatives par la communauté noire francophone sont réunis. Et l’on ne devrait plus les ignorer!
Il y a quelques années, un élève en classe de onzième année résidant à Regent Park confiait à son père son intention de se mettre sur le marché du travail. À ce dernier qui lui suggérait plutôt de poursuivre ses études, l’adolescent répliqua calmement qu’en dépit de tous les diplômes et autres certificats qu’il détenait, son seul travail se résumait à la recherche permanente d’emploi!
Une situation qui peut paraître caricaturale à l’extrême mais qui ne traduit pas moins une réalité vécue par de nombreux parents, dont le chômage endémique ne suscite pas des vocations très académiques chez les jeunes!
Au sein même des écoles, les enfants ont-ils des modèles qui les inspirent? La question se pose. Et c’est l’un des arguments invoqués par les Anglophones: d’après les statistiques officielles, l’on compterait 12% ou plus des effectifs pour seulement 5% d’enseignants d’origine ou de descendance africaine.
Une anomalie qui se retrouve également dans le système francophone… En effet, si les enfants d’origine africaine représentent dans certains cas 90% des effectifs de certaines écoles, on n’observe pas une adéquation au niveau du corps enseignant. Selon le rapport de recherche intitulé La relation école-familles francophones d’origine immigrante à Toronto de Diane Farmer, Yvonne Kabeya, Normand Labrie et Denise Wilson du 30 novembre 2003, «tant les travaux des États généraux complémentaires de l’éducation élémentaire et secondaire de langue française de l’Ontario (Comité de travail, 1998) que la thèse de doctorat de Quell (2000), ont bien expliqué la sous-représentation des communautés ethnoculturelles au sein des institutions éducatives franco-ontariennes et les conséquences négatives de cette absence, aussi bien pour le succès des élèves d’origine ethnoculturelle, que pour la participation parentale à l’école, ou pour la formation d’une relève enseignante parmi les jeunes issus de familles immigrantes».