Mairie de Toronto: une campagne de sept mois!

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Publié 18/03/2014 par François Bergeron

Olivia, Karen, Tory, Soknacki, Ford… Les vedettes féminines, artistes ou politiciennes, sont plus souvent reconnues par leur prénom que les vedettes masculines.

Les journaux québécois titrent souvent «Céline» mais pas «Louis-José» (Houde) ou «Dany» (Laferrière). Les commentateurs américains parlent librement de «Hillary», pas de «Barack». Il est vrai que «Clinton» peut encore signifier Bill. Barack est pourtant assez unique, comme Arnold, mais on dit «Obama» et «Schwarzenegger». (Rare exception: Ringo.)

En Ontario, on ne mentionnera «Kathleen» ou «Andrea» que si on dit aussi «Tim» (Hudak, pas Horton), et ça n’arrive pas souvent. Nos médias sont plus conservateurs, au sens premier du terme. On titre parfois «Justin», quoique jamais «Stephen».

Peu de femmes se formalisent de cette familiarité. Plusieurs l’exploitent, comme Oprah ou Helen, alors que Fallon ou Letterman ne songeraient pas à n’utiliser que leur prénom.

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Olivia Chow et Karen Stintz en profitent aussi, s’il faut se fier à leur matériel promotionnel en ce début de campagne électorale à la mairie de Toronto en vue du scrutin du 27 octobre prochain.

La veuve de Jack Layton, qui a démissionné mercredi dernier de son poste de députée de Trinity-Spadina au Parlement fédéral pour lancer, le lendemain, sa campagne torontoise, écrit «Olivia» deux fois plus gros que «Chow» (www.oliviachow.ca).

Karen Stintz n’utilise même pas son nom de famille dans son adresse Internet: www.karen2014.ca

David Soknacki fait tout le contraire: www.soknacki2014.com

Comme Olivia Chow, l’ex-directeur du budget de la Ville privilégie le jaune et blanc (sur fond bleu pour Chow, gris pour Soknacki). Le jaune sera donc la couleur des deux seuls candidats qui privilégient un train léger de surface vers Scarborough, financé uniquement par la province, plutôt qu’un métro souterrain plus dispendieux qui nécessitera des contributions de la Ville et du fédéral.

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Olivia Chow a aussi son logo: un C jaune dans un O blanc. Pour Karen Stintz, c’est «Karen» dans un tournesol, symbole de croissance à cause de ses graines…

John Tory a choisi le vert et colore ainsi les lettres «TO» dans Tory, tandis que Rob Ford reprend le bleu, rouge et blanc à l’américaine de sa campagne de 2010.

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Rob Ford réutilise aussi son slogan «Respect for tax payers». C’était génial en 2010 après des grèves irresponsables d’employés municipaux comme les éboueurs et les chauffeurs d’autobus.

Mais en 2014, le mot «respect» détonne à côté du nom de Rob Ford, après ses frasques honteuses, ses accointances avec des criminels, ses propos méprisants à l’endroit des médias et du chef de police, et son refus de poser le seul geste honorable qui lui restait: démissionner.

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Olivia Chow a lancé sa campagne sous le slogan «New Mayor. Better City.», insistant initialement sur le sort des enfants et des familles, sur la création d’emplois et l’aide aux petites entreprises, et sur les transports, qui sera certainement le thème le plus débattu de la campagne.

Tory, Stintz et Soknacki n’ont pas jugé bon de s’accoler un slogan, mais Stintz et Soknacki affirment tous les deux combattre un monstre appelé «gridlock»: embouteillage au sens propre (sur nos routes) comme au figuré (la dysfonctionnalité de la politique et de l’administration municipales).

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John Tory semble miser beaucoup sur son CV, qui est effectivement impressionnant: ex-animateur de radio, ex-chef de parti politique provincial, ex-candidat à la mairie, ex-pdg de Rogers, ex-président de la Ligue canadienne de football, avocat, militant au sein d’importantes agences caritatives…

Les quatre adversaires de Rob Ford fournissent encore peu de détails sur leurs priorités, leur programme, les enjeux. C’est normal, il reste encore sept mois de campagne; du jamais vu.

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Le site de John Tory n’a même pas d’onglet «enjeux» ou «priorités»; que de la vidéo.

Rob Ford ne fait aucune promesse précise lui non plus, mais il énumère une longue liste de «réalisations» allant d’une faible augmentation annuelle de la taxe foncière au pavage des routes, en passant par la privatisation de la collecte des ordures à l’ouest de la rue Yonge et la désignation des transports en commun comme service essentiel.

On trouve aussi un lien vers les clips YouTube Ford Nation qu’il anime avec son frère Doug (RoFo et DoFo pour les intimes).

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Issue du NPD et face à quatre adversaires soi-disant plus déterminés qu’elle à limiter les taxes et les dépenses, Olivia Chow souligne ses origines modestes et promet de «ne pas dépenser de l’argent qu’on n’a pas».

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On verra toutefois comment elle abordera l’épineux dossier des relations entre la Ville et ses syndicats, notamment ceux des pompiers et des policiers, dont les contrats influencent grandement les coûts et la qualité des services publics.

Ira-t-elle jusqu’à accepter de compléter la privatisation de la collecte des ordures? Ce serait trop beau.

Ce serait simplifier à outrance que d’affirmer qu’Olivia Chow est aujourd’hui la seule candidate de «gauche» contre quatre adversaires de «droite», comme Rob Ford en 2010 était le seul candidat de «droite» contre trois adversaires de «gauche». Peu de gens pensent encore en ces termes, qui sont minés par de graves contradictions et qui n’éclairent plus les débats modernes.

Un Conservateur (C majuscule) qui fume du crack et qui ne regarde pas à la dépense pour prolonger le métro est-il vraiment un «conservateur»?

John Tory, Karen Stinz et David Soknacki ont autant d’appuis chez les Libéraux que chez les Conservateurs, et on s’attend à ce que les prochains mois servent de «primaires» visant à éliminer deux d’entre eux avant le 27 octobre…

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À moins que d’ici là, Rob Ford ne soit finalement arrêté par la police et disqualifié! Cela changerait énormément la dynamique de la campagne.

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Dans le site de la Ville de Toronto: la liste des candidats à la mairie et dans les quartiers en vue des élections du 27 octobre 2014.

Auteur

  • François Bergeron

    Rédacteur en chef de l-express.ca. Plus de 40 ans d'expérience en journalisme et en édition de médias papier et web, en français et en anglais. Formation en sciences-politiques. Intéressé à toute l'actualité et aux grands enjeux modernes.

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