L’opéra Another Brick in the Wall : à Toronto 40 ans après l’album de Roger Waters

Composé et mis en scène par des Québécois

L'opéra Another Brick in the Wall, de Productions Opéra Concept MP, est composé par Julien Bilodeau et mis en scène par Dominic Champagne. Photos: Yves Renaud
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Publié 07/11/2019 par Emma Couffin

Another Brick in the Wall est le premier opéra du compositeur québécois Julien Bilodeau. Mis en scène par Dominic Champagne et basé sur les textes de Roger Waters, cette reprise lyrique de l’album légendaire était risquée.

Cette revisite de The Wall n’en est pas moins émouvante et le défi relevé. Le spectacle, qui a connu sa première à Montréal en mars 2017, arrive enfin à Toronto, au Meridian Hall les 13, 14, 16, 17 et 23 novembre.

L’autobiographie d’une légende du rock

Tout comme l’album et son adaptation cinématographique, l’opéra de Julien Bilodeau et Dominic Champagne revient sur l’enfance et l’ascension de Roger Waters.

«À mesure que son succès croît, il connaît une perte de contact avec les gens autour de lui», explique Julien Bilodeau à L’Express. «Cet isolement se transforme en aliénation puis en dépravation. C’est le côté dramatique de sa vie qu’on exploite avec l’opéra.»

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Julien Bilodeau. Photo: Philippe Stirnweiss

D’abord incertain, Dominic Champagne a su faire confiance à Julien Bilodeau. Les deux se sont lancés dans une collaboration étroite, menant une équipe de 200 artistes sur deux ans. «Il fallait redéfinir l’œuvre originale: lui donner un sens en faisant coïncider le visuel et le sonore sans être en rupture avec elle.»

Le metteur en scène avait d’ailleurs déjà expérimenté les mélanges de genres en se faisant confronter le cirque et la musique pop dans Love, le spectacle du Cirque du Soleil rendant hommage aux Beatles.

Un moment de l’opéra Another Brick in the Wall.

Un compositeur classique

Julien Bilodeau a toujours su qu’il ferait de la musique son métier. Désormais, il est l’un des plus éminents compositeurs canadiens de sa génération.

Après avoir suivi deux maîtrises au Conservatoire de musique de Montréal, il part pour la France et l’Allemagne. Les compositeurs européens lui ont donné le goût de la musique classique (Bach, Wagner, Brahms) et contemporaine (Olivier Messiaen, Pascal Dusapin, Stockhausein).

En 2006 il remporte le prix Robert Fleming, une distinction décernée par le Conseil des Arts du Canada aux jeunes compositeurs de talent.

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Un moment de l’opéra Another Brick in the Wall.

De Roger Waters à Julien Bilodeau

Le 6 juillet 1977, Pink Floyd attirait plus de 80 000 personnes dans le Stade olympique de Montréal. «Mais le groupe est fatigué et l’expérience n’est pas heureuse, car la foule est trop nombreuse pour la musique qu’ils proposent. Le public est chahuteur, irrespectueux. Roger Waters commet alors une erreur de parcours et crache sur un fan.»

C’est à cet instant que lui est venue l’ambition de composer le nouvel album autour de l’idée d’un mur que construirait l’artiste entre la scène et son public.

Il est donc singulier que, 40 ans plus tard, ce soit Productions Opéra Concept MP, de Montréal – la ville où l’idée est née – qui fait appel à Julien Bilodeau pour monter une version lyrique de The Wall, l’album légendaire sorti en 1979.

Julien Bilodeau tenait à avoir l’approbation de Roger Waters. «Ce projet était impensable sans son accord», dit-il. «J’avais une vision de la chose et j’ai eu la chance de pouvoir la partager avec lui. Il me fallait sa validation. Au début il était dubitatif, mais finalement, il m’a donné carte blanche jusqu’à la composition finale.»

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À la première montréalaise il y a deux ans, Roger Waters était d’ailleurs présent. «Il en est ressorti ravi. Je pense que c’est la confiance réciproque entre tous les membres de l’équipe qui a été ressentie par Waters et par le public.»

The Wall toujours d’actualité et universel

Julien Bilodeau avait seulement 5 ans quand l’album est sorti. «Mon père était fan de l’album, ça faisait partie de mon enfance. Moi, je l’ai surtout redécouvert avec l’adaptation cinématographique d’Alan Parker en 1982. C’est là que j’ai réalisé la profondeur des thématiques. Le film entre dans la dramatologie de l’œuvre, ça m’a fasciné.»

L’album révolutionnaire résonne encore avec les problématiques de notre temps. «La guerre du Vietnam marqua la fin d’un rêve, des passions et des utopies qu’on pouvait avoir jusque-là. L’œuvre de The Wall est un témoignage du désenchantement et de la morosité de l’année 1979. Mais tous ces thèmes sont universels et toujours d’actualité.»

C’est plus qu’une œuvre autobiographique. «La peur de l’autre mène à un mur qu’il faut défaire pour apprendre à se parler de nouveau. C’est par là que l’amour transite. Ces questions sont plus sensibles que jamais. Les murs se construisent tous les jours entre les peuples. Le mur de Waters et le mur au nord du Mexique, c’est le même.»

Un moment de l’opéra Another Brick in the Wall.

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