Loi sur les langues officielles VS Loi 101

Dépassons le mode survie!

langues officielles Loi 101
Mélanie Joly est chargée de moderniser la Loi sur les langues officielles.
Partagez
Tweetez
Envoyez

Publié 26/11/2020 par Annik Chalifour

Mélanie Joly, ministre du Développement économique et des Langues officielles, déclarait la semaine dernière qu’on doit se rappeler que «les francophones en Amérique sont en mode survie

Chargée de moderniser la Loi sur les langues officielles, la ministre entend se pencher sur trois principales questions: le commerce international dominé par l’usage de l’anglais, la francisation partout au Canada, l’univers du numérique pour mieux protéger les institutions culturelles.

Mélanie Joly

Reste à voir comment elle transigera avec le Québec, qui dévoilera bientôt son plan d’action de solidification de la Loi 101 (Charte de la langue française).

Commerce et immigration

On a l’Accord économique et commercial global (AECG) entre le Canada et l’Union européenne incluant les accords avec l’Europe francophone.

Mais qu’en est-il de la portée de nos accords commerciaux avec les Caraïbes francophones (faisant partie de notre continent), l’Afrique francophone, le Moyen-Orient francophone, les pays qui ont le français et l’anglais comme langues officielles?

Publicité

Favoriser notre francisation implique l’élargissement de nos liens d’affaires avec la francophonie mondiale, mais aussi une planification pertinente en matière d’immigration francophone.

Pour dépasser le mode survie du français au Canada et au Québec, on doit compter sur les immigrants francophones qualifiés, garants de notre économie durable dans les deux langues au Canada, et en français au Québec (seule province officiellement francophone).

Moderniser la Loi sur les langues officielles devrait donc viser à appuyer l’équité économique dans les deux langues, tout en respectant les compétences du Québec.

Économie bilingue

On ne peut dissocier le capital humain du capital économique. Plus de francophones partout au pays sous-tendent une économie plus forte dans les deux langues.

Cela signifie d’augmenter nos cibles d’immigration francophone hors Québec, d’assurer que les immigrants anglophones apprennent le français, et que la Loi 101 soit effectivement solidifiée au Québec.

Publicité

En Ontario notamment, tout immigrant francophone qui s’y installe n’a pas le choix que d’apprendre l’anglais… lls auront éventuellement l’avantage de maîtriser nos deux langues.

Simon Jolin-Barrette

Reste à voir comment Mélanie Joly composera avec Simon Jolin-Barrette, ministre de la Justice et responsable de la langue française du Québec, à l’égard du plan d’action Legault visant à raffermir la protection de l’usage du français dans la belle province. Lequel plan sera dévoilé après les Fêtes.

Le Québec, responsable de gérer son propre système d’immigration, peut certainement gérer son commerce à l’international avec les partenaires francophones de son choix. Négociations à l’horizon avec Ottawa…

Fonctionnariat anglo

Rappelons les faits: la Loi sur les langues officielles (1969) est née de la crainte d’Ottawa à l’époque, de voir s’effondrer le fédéralisme canadien face à la montée grandissante du mouvement séparatiste au Québec. Elle fut abrogée en 1988, puis modifiée en 2005.

Résultat: nos institutions fédérales sont aujourd’hui dotées d’une majorité de Canadiens anglophones qui suivent des cours de français (à nos frais) afin de respecter la loi obligeant le fédéral à nous desservir dans les deux langues. Dans l’ensemble ce personnel ne devient pas vraiment bilingue, mais bénéficie de promotions professionnelles à la suite de cours et concours.

Publicité

La modernisation de la loi devrait garantir une dotation de fonctionnaires bilingues dans les 10 provinces et les trois territoires. Soit la mise en œuvre d’une stratégie efficace de recrutement et de renforcement des habiletés langagières. Pensons à des stages pratiques de travail pour nos fonctionnaires fédéraux dans les deux langues.

Question d’atteindre l’égalité réelle et la qualité dans l’offre des services publics bilingues. Ne plus attendre pour obtenir des services en français, somme toute, médiocres.

Commissariat débordé

Raymond Théberge, Commissaire aux langues officielles

On a le Commissariat aux langues officielles responsable de surveiller l’application de la loi; traiter les plaintes; proposer des recommandations et publier divers documents connexes. Cela ne suffit plus!

Il y a aussi le Commissaire aux langues officielles du Nouveau-Brunswick – seule province officiellement bilingue – peinant à maintenir un bilinguisme largement fragilisé. Tandis que le Manitoba et la Saskatchewan bénéficient soi-disant d’un représentant du Commissaire fédéral.

Jusqu’à 2019, on avait un Commissariat aux services en français en Ontario créé sous la Loi sur les services en français de l’Ontario (aucune autre loi similaire n’existe au pays). Le gouvernement Ford l’a annexé au Bureau de l’Ombudsman de l’Ontario. Un recul évident…

Publicité

Aujourd’hui, outre la rétrogradation du Commissaire en Ontario, les provinces et territoires semblent recevoir tout au plus un appui minimal relatif à l’application de la Loi sur les langues officielles.

Nous aimerions savoir comment on entend moderniser le Commissariat aux langues officielles débordé par les plaintes croissantes de milliers de Canadiens francophones.

Francisation en péril

La ministre Joly veut se pencher sur la question de la francisation à travers le Canada. Commençons par nous assurer que la Loi sur les langues officielles puisse permettre une réelle ouverture sur notre francophonie par des actions concrètes durables.

Quelques idées en passant:

  • Mettre à l’avant le tourisme francophone au Canada et à l’international: circuits historiques, patrimoniaux, écotourisme et terroirs
  • Favoriser les partenariats interprovinciaux francophones (ex. Bureau du Québec à Toronto)
  • Rehausser le rôle du Centre de la Francophonie des Amériques (basé à Québec) dans la réalisation de projets socio-économiques entre diverses communautés francophones des Amériques en situation minoritaire
  • Créer un Centre canadien de la francisation responsable d’appuyer et de coordonner un programme d’activités socio-éducatives de francisation au pays
  • Rendre accessible l’éducation de langue française à tous les paliers scolaires partout au Canada (ex. Université de l’Ontario français).

Attendons voir à l’ère post-pandémie!

Auteur

  • Annik Chalifour

    Chroniqueuse et journaliste à l-express.ca depuis 2008. Plusieurs reportages réalisés en Haïti sur le tourisme solidaire en appui à l’économie locale durable. Plus de 20 ans d'œuvre humanitaire. Formation de juriste.

Partagez
Tweetez
Envoyez
Publicité

Pour la meilleur expérience sur ce site, veuillez activer Javascript dans votre navigateur