L’humour caustique pour briser les clichés

Le Théâtre français fait bonne pioche avec Les noirs sont heureux

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Publié 08/12/2009 par Guillaume Garcia

Vous connaissez la recette, en politique, en mensonge, en humour, plus c’est gros, plus ça passe. Martin-David Peter a bien saisi le message et nous livre une pièce avec les plus gros clichés sur les noirs, en gros plan, en pleine lumière. C’est parfois limite, mais le plus souvent, l’objectif de briser un tabou est atteint. L’autodérision, quelle belle invention.

Esclaves et esclavagistes?

Il faudrait pouvoir se transporter dans le passé pour voir quelles relations entretenaient maître et domestiques, blancs ou noirs, tous confondus.

Quand un domestique, joué par Martin-David Peter, commence à jouer l’insolent avec sa maîtresse, on attend une réponse cinglante de la part de la personne qui a le pouvoir.

Mais il n’en est rien, chacun possède des arguments valables à envoyer à la figure de l’autre en frôlant les lignes de la bonne conduite. Premier cliché, les noirs aiment les bananes. L’auteur ni va pas de main morte et le public peut craindre un dérapage dans le texte à tout moment. On longe le précipice pour finalement ne pas tomber, mais que ce fut proche.

Dans un décor minimaliste composé de panneaux triangulaires amovibles représentant l’intérieur d’une demeure, le comédien répond à une personne imaginaire dont on comprend les propos à travers les réponses que le domestique formule.

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Le procédé n’est pas nouveau mais il fonctionne à merveille dans ce cas précis. Le public commence à rire, rentre dans le jeu et se prend d’amitié pour ce pauvre petit domestique qui tient tête à son maître en allant jusqu’à le traiter de dictateur. Hitler d’un côté, les préjugés sur les noirs de l’autre, on vous le dit, plus c’est gros plus ça passe. Non tout les noirs ne sont pas descendants d’esclaves et tous les blancs d’esclavagistes. Si? Ah bon d’accord!

À la découverte de ses origines

La deuxième pièce, Rendez-vous Lakay, nous fait voyager dans une famille québécoise où la mère envoie ses deux filles à l’enterrement de leur père en Haïti, père qu’elles n’ont plus côtoyé depuis un bon moment.

Après une première réaction plutôt hostile de la part de filles qui ne comprennent pas le but de la démarche, les mêmes jeunes femmes acceptent de partir pour les Caraïbes. La mère leur fait un petit précis dans le style Haïti 101, leur rappelant toute l’histoire de refus de l’autorité blanche par les esclaves de l’époque. Après leur avoir fait promettre de ne pas juger ce qu’elles ne comprendront pas de la culture haïtienne, la mère les envoie prendre l’avion.

Djennie Laguerre campe le rôle de Joséphine et l’on découvre les autres personnages à travers les dialogues qu’elle peut avoir avec eux. La relation entre les deux soeurs amène une prise de recul quant aux traditions haïtiennes. Suzie, la soeur, veut aller à la plage, voir une cérémonie vaudou, elle joue la parfaite petite québécoise qui débarque au soleil plutôt que dans le pays d’où elle tient ses racines. Elle semble plus détachée que Joséphine sur ce point. Finalement, Joséphine remet tout le monde dans le droit chemin en rappelant qu’elles sont là d’abord pour enterrer leur paternel.

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Les panneaux du décor sont tournés pour nous plonger dans un monde de soleil et de couleurs. Les filles font la découverte de la famille et de ce que leur père a fait depuis son retour sur l’île. Déjà, petit choc, elles ont des frères. Les situations sont cocasses et drôles et le comique est plus classique qu’avec Martin-David Peter. Comique de situation, de dialogues, les filles sont étonnées et leurs réactions sont amusantes.

Finalement, la cérémonie peut avoir lieu et les filles profitent de leur séjour pour se détendre. Une pièce sous forme de monologue, où la comédienne parvient à faire participer le public par un jeu d’expression. On doit dire crac quand elle dit cric, c’est tout bête mais ça nous garde dans la pièce.

Une théorie remise en question

La dernière pièce met en scène trois personnages, un couple et un professeur russe auteur d’une théorie révolutionnaire, les noirs sont heureux par nature. Après la publication d’un livre sur le sujet le professeur donne une conférence et accepte après sa présentation une invitation à dîner chez un noir.

Pas très concerné par les clichés sur les noirs, l’homme joué par Martin-David Peter, explique qu’il aimerait que sa femme, fervente défenseure de la culture noire et combattant les préjugés qui circulent sur eux, écoute ce que le professeur en pense.

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Arrivé chez eux, les disputes internes au couple ne tardent pas à arriver et le professeur, Guy Mignault se sent un peu à l’étroit dans ces habits au milieu d’un couple déchiré.

Sa théorie vole en éclat devant le spectacle que proposent les deux individus noirs. Le ton monte et l’on découvre un mari qui accepte de moins en moins l’attitude du professeur et se rapproche de sa femme par la même occasion.

L’ennemi de mon ennemi est mon ami. La farce fonctionne bien et la chute que nous réserve l’auteur comédien est pour le moins déconcertante et osée, mais bon, plus c’est gros plus ça passe, on vous l’a déjà dit.

Auteur

  • Guillaume Garcia

    Petit, il voulait devenir Tintin: le toupet dans le vent, les pantalons retroussés, son appareil photo en bandoulière; il ne manquait que Milou! Il est devenu journaliste, passionné de politique, de culture et de sports.

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