Au risque de me prononcer prématurément, je dirais que j’ai trouvé dans l’univers de Bazbaz mon disque d’été, édition 2006. Et je parie que je ne serai pas le seul.
À la fois sexy et joyeux (les deux critères de base de tout disque d’été), Sur le bout de la langue (Zone 3/Sélect) est l’œuvre d’un artiste qui semble posséder une confiance sans bornes en son flair mélodique et ses pouvoirs de séduction, une lame à double tranchant que le chanteur français manie sans la moindre trace d’arrogance.
Si ses chansons évoquent par moments Souchon, M ou Jean-Louis Murat, Bazbaz les dépasse tous au chapitre de l’alchimie pop. Et quelle polyvalence! Infinie solitude mine la veine sensuelle de la musique arabe, Tout pour l’éviter conjure un état de folie onirique par le truchement d’une musique de cirque, et Papa Tango Charly, du regretté Mort Schuman, met le cap sur les Antilles. Ailleurs, quelques parenthèses soul ou reggae achèvent notre bienheureux dépaysement.
Mais devant pareille facilité, il ne faut pas conclure que Sur le bout de la langue appartient à la catégorie des disques faciles: sous ses airs de mec qui pond des succès les doigts dans le nez, Bazbaz est tout, sauf paresseux.
Tant sur le plan des mélodies que des textes, il a simplement évacué le superflu, le banal, afin de mieux mettre en valeur un hook infaillible ou une plume soucieuse du fond autant que de la forme. C’est ainsi qu’Infinie solitude, sur laquelle ouvre l’album, installe en quatre lignes à l’assonance magistrale cette espèce de gueule de bois des amours épuisés («Puisqu’on a fait ce qu’on a pu/Puisqu’on n’a plus ce qu’on avait/Ce qu’on a vécu, on l’a perdu/Dans notre infinie solitude»).