«Les islamistes se servent de la démocratie pour lui tordre le cou»

L’auteure de Ma vie à contre-Coran au Club canadien de Toronto

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Publié 23/06/2009 par Guillaume Garcia

Les accommodements raisonnables. Sujet épineux, semé d’embûches. Parler de cela implique un parti-pris, une certaine vision des choses. Djemila Benhabib a son avis sur la question, et vous ne lui ôterez pas de l’idée que l’Islam n’a rien à faire dans la sphère publique. Son ouvrage, Ma vie à contre-Coran, une femme témoigne sur les islamistes, est dédié à ceux qui se battent pour le respect de l’égalité et des libertés.

Accommodement: nom masculin; arrangement à l’amiable, compromis. Raisonnable: adjectif; qui agit conformément au bon sens, d’une manière réfléchie. OK, l’idée est qu’on doit trouver un compromis, en essayant de réfléchir un minimum.

Lors de sa conférence dans le cadre du dernier déjeuner du Club Canadien de Toronto la semaine dernière, Djemila Benhabib a expliqué son parcours, toutes ces choses qui lui font critiquer ouvertement le rapport Bouchard-Taylor sur les accommodements raisonnables. «Lors des consultations publiques, les Québécois ont dit leur attachement à la laïcité et l’égalité. Mais le rapport ne parle pas de ça, il occulte l’avis des Québécois.»

À croire que les deux responsables du rapport sont tombés dans le piège tendu par les lobbies islamistes. Oui, islamistes et non musulmans. Ici les termes sont importants, et la conférencière n’oublie pas de le rappeler: «L’islamiste, c’est un islam politique, avec un agenda politique, qui a pour mission d’islamiser la société. Le musulman vit sa religion, dans le respect des lois.»

Islamistes ou musulmans?

Le problème, on l’aura bien compris réside dans le fait que les islamistes prennent la parole. Les musulmans non. Djemila cherche à expliquer l’inexplicable. Comment ces gens qui sont contre la démocratie s’en servent pour lui tordre le cou?

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L’idée n’est pas nouvelle. En démocratie, si l’on respecte ses principes, on ne peut interdire l’anti-démocratie. C’est une des failles du système. «La démocratie est un mauvais système, mais elle est le moins mauvais de tous les systèmes», disait Winston Churchill. Pour la conférencière invitée, «les islamistes ont compris qu’il y avait une marge. Ils ont identifié les failles. Il nous faut fermer les brèches.»

Pour cette femme, fille de parents scientifiques engagés dans les luttes politiques et sociales quand le parti unique était de mise, qui a vécu la répression islamiste à Oran en Algérie avant de se réfugier en France, puis au Québec, c’est à la démocratie, au pays accueillant l’immigrant de fixer les barrières. «Si l’on croit en des valeurs, on ne devrait pas accepter qu’on crache sur l’égalité.»

Des limites au multiculturalisme

Le multiculturalisme est à l’ordre du jour. Mais comment le vivre? Les Pays-Bas, qui ont joué à fond la carte de l’immigration, vivent un retour en force des partis d’extrême-droite. Le 4 juin se tenaient les élections pour les députés européens aux Pays-Bas. Sur fond de crise économique et d’ambiance de plus en plus islamophobe, le député nationaliste populiste Geert Wilders s’est fendu d’une percée importante dans les résultats avec 16,9% des voix, ce qui le place comme potentiel deuxième parti du pays.

La méconnaissance de l’Islam et le silence des musulmans modérés et laïques sont un formidable tremplin pour les partis nationalistes et populistes d’extrême-droite. En filigrane, il faut comprendre que si les pays d’accueil avaient été plus stricts sur le respect de leurs valeurs, égalité, laïcité, on n’en serait pas là.

La grande question que pose Djemila Benhabib est: «La spécificité culturelle justifie-t-elle un accommodement de la part de la majorité?».

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Elle qui raconte l’assassinat d’une amie en Algérie pendant son adolescence parce qu’elle avait refusé de porter le voile peine logiquement à accepter que les islamistes parviennent à faire pencher le Canada et les autres puissances occidentales en leur faveur. Radicale, elle prône l’interdiction de tribunes publiques des gens comme Tarik Ramadan qui tiennent selon elle un double discours sur les questions religieuses et qui parviennent à islamiser la société.

Auteur

  • Guillaume Garcia

    Petit, il voulait devenir Tintin: le toupet dans le vent, les pantalons retroussés, son appareil photo en bandoulière; il ne manquait que Milou! Il est devenu journaliste, passionné de politique, de culture et de sports.

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