Les bouleversements qui ont secoué le monde arabe depuis le mois de janvier ouvrent une période d’incertitude, non seulement pour les pays qui ont vu leurs régimes politiques s’effondrer ou sérieusement ébranlés par la guerre civile et des conflits d’une envergure insoupçonnée, mais également pour l’ordre mondial ou plus précisément l’ordre occidental dans cette région avec des conséquences encore imprévisibles.
Les mécontentements et contestations populaires se sont dirigés jusqu’à présent contre l’État qui, dans les pays arabes, du Yémen au Maroc, n’a jamais été l’expression de la volonté libre de leurs populations.
Si de façon générale, l’absence de démocratie dans les pays en développement, c’est-à-dire la rupture entre la société civile et la société politique, a historiquement produit des États impopulaires, répressifs et hostiles à la population qui s’appuient sur l’aide et le soutien étrangers, ce divorce entre l’État et la nation est poussé à son extrême dans le monde arabe en raison de la gravité des enjeux économique et géopolitique propres à cette région.
Le pétrole
Le pétrole et la nécessité de l’approvisionnement énergétique des pays consommateurs constituent sans doute le premier facteur qui a façonné l’émergence et l’évolution des États modernes dans les pays du Moyen-Orient et de l’Afrique du Nord depuis près d’un siècle.
Il est, par exemple, impossible de comprendre la constitution des riches monarchies pétrolières faiblement peuplées dans le golf Persique en appareils d’État souverains et indépendants sans parler de leurs ententes ouvertes ou tacites avec les firmes pétrolières géantes et les puissances occidentales, d’abord l’Angleterre et surtout les États-Unis depuis la Seconde Guerre mondiale.