«C’est pas vrai qu’on a tout vu, il y a toujours pire, pire, pire.» Les Voleurs d’enfance, le documentaire coup de poing de Paul Arcand donne le ton. Pire, comme ces enfants maltraités, qui, à quatre ans, avec leurs mots d’enfants, racontent les sévices qui leur ont été affligés par les adultes. Pire, comme ces enfants yo-yo trimballés d’une famille d’accueil à l’autre et qui finissent par ne plus savoir qui ils sont. Pire, comme ces victimes de maltraitance qui, dans leur enfance, ont été enfermées, attachées à un arbre, dans l’indifférence générale de leur famille proche.
Ce qui amène le constat criant d’une vérité effrayante et encore difficile à croire. En 2005, on traite les animaux mieux que certains enfants. D’un bout à l’autre de la chaîne, ils sont les victimes d’un système censé les protéger. Quand, sur grand écran, le spectateur voit défiler en accéléré la vie de ces enfants abusés, à qui l’on n’a jamais accordé l’aide nécessaire, il ne peut s’empêcher de crier à l’injustice. Révolte et sentiment de haut-le-cœur garantis.
Charge vigoureuse contre la Direction de la protection de la jeunesse (DPJ) au Québec; le documentaire de Paul Arcand n’est certes pas parfait, mais a le mérite d’exposer une situation encore trop souvent méconnue du grand public. Ils n’ont rien fait et pourtant, ces jeunes victimes paieront toute leur vie pour la maltraitance perpétrée par un autre.
Pendant ce temps-là, bien au chaud dans leur cellule, les abuseurs bénéficient d’un confort relatif et d’un bon encadrement à leur sortie du pénitencier – chose dont les victimes de maltraitance seront privées tout au long de leur existence.
Le luxe du temps
Pour travailler sur ce projet, Paul Arcand a pu bénéficier de plusieurs mois pour effectuer ses recherches. Une différence, voire même un luxe, par rapport au quotidien de la plupart des journalistes voués à travailler dans l’urgence. Sur ordre de la productrice Denise Robert, armé d’une caméra sur l’épaule, il est donc allé inspecter le terrain pour revenir avec ce documentaire choc.