Le Toronto Star a révélé en exclusivité, à la fin août, qu’après une quinzaine de jours d’intenses pourparlers, tenues à l’hôtel Royal York, une douzaine de syndicats d’employés du gouvernement provincial – personnel de bureau, infirmières, enseignants, travailleurs sociaux, cols bleus, etc. – auraient rejeté une proposition du ministre Dwight Duncan de geler les salaires de la fonction publique pour deux ans (de 2012 à 2014), dans le cadre d’efforts visant à rééquilibrer les finances de la province.
Peu de médias se sont intéressés à cette information. Le Star lui-même n’y a fait écho qu’à deux reprises. D’autres manchettes, notamment sur le démantèlement d’une cellule terroriste à Ottawa, ont dominé l’actualité. La menace d’attentats à la bombe au Canada, par des Canadiens (ou plutôt des immigrants à qui on a étourdiment donné la nationalité canadienne), est certainement plus sensationnelle que des négociations entre le ministre des Finances de l’Ontario et ses syndicats. À long terme, cependant, ces discussions auront plus d’impact sur nos vies.
S’il faut en croire le dernier budget ontarien (et la crise grecque nous a montré que les chiffres officiels peuvent être trafiqués pour masquer une situation encore plus périlleuse), les dépenses du gouvernement provincial s’élèveront cette année à 125-130 milliards $ pour des revenus de 100-110 milliards $. Ce déficit d’environ 20 milliards $ ne serait ramené à zéro qu’en 2018, toujours selon les prédictions du gouvernement, qui ne valent pas toujours celles de Nostradamus.
Cela signifie que d’ici à 2018, on ajoutera encore quelques dizaines de milliards à la dette provinciale actuelle de 220 milliards $, dont les frais d’intérêts coûtent déjà 10 milliards $ aux Ontariens. (On se prend à souhaiter le grand dérangement prévu en 2012 par le calendrier maya.) On pourrait en faire des choses avec ces 10 milliards $, qu’on ne peut pas faire parce qu’on a emprunté pour se payer la Cadillac des services gouvernementaux, alors qu’un modèle moins luxueux aurait fait l’affaire.
Personne, ni vous, ni moi, ni la plus grosse entreprise, ni le gouvernement, ne peut s’endetter indéfiniment. On peut être déficitaire pendant un moment, quand on emprunte pour investir dans le but d’être profitable en temps «normal». Dans le cas de nos gouvernements, malheureusement, on a droit à l’inverse: presque toujours déficitaire, n’affichant un surplus que très rarement, voire accidentellement.