Le Wisconsin est encore trop loin

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Publié 20/03/2011 par François Bergeron

Le ministre fédéral des Finances, Jim Flaherty, dépose son budget ce mardi 22 mars. Son homologue ontarien Dwight Duncan fera de même le 29 mars. Dans les deux cas, il s’agit d’exercices pré-électoraux. Des élections sont programmées en octobre pour l’Ontario et pourraient être déclenchées dès ce printemps à Ottawa.

Raymond Bachand a présenté le budget du Québec le 17 mars. Élu en 2008, le gouvernement Charest pourrait lui aussi vouloir recourir aux urnes plus tôt que prévu pour tenter de retrouver une certaine légitimité après une série noire de scandales et de déboires.

Ce n’est donc pas cette année que nos gouvernements commenceront à rembourser leurs dettes, car ils ne voudront froisser personne (croient-ils). C’est d’ailleurs confirmé au Québec, où le gouvernement a capitulé devant les syndicats, qui manifestaient sans vergogne, le samedi précédent, pour réclamer des déficits et des impôts plus élevés! Apparemment, les nouvelles en provenance du Wisconsin n’ont pas encore été traduites en français…

Au lieu de geler ou réduire leurs dépenses (dont 55%, malheureusement, représentent les salaires des fonctionnaires) jusqu’à ce que leurs revenus les rejoignent et les dépassent, Flaherty et Duncan promettront encore une fois une réduction progressive de leurs déficits grâce à une croissance économique soutenue, supérieure à l’inflation, jusqu’en 2018 ou 2020.

N’en croyez rien. D’ici 2020, il y aura des épisodes de croissance, mais il y aura aussi des reculs, il y aura des catastrophes imprévues et des bulles de mauvaises dettes qui éclateront ici et là, il y aura des bons coups et des erreurs. Bref, il ne faut pas compter sur la chance, encore moins sur une reprise aux États-Unis. Il faut retrouver l’équilibre budgétaire beaucoup plus rapidement – et ne jamais plus s’en écarter – à la fois pour des raisons pratiques et morales.

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Pratiques: par où commencer? Le tsunami au Japon. Haïti. L’accident pétrolier dans le Golfe du Mexique. La nécessité d’intervenir en Libye. La pression du vieillissement de la population sur le système de santé. Nos régimes de pensions à la Ponzi… Toutes ces difficultés – comme d’autres défis plus luxueux comme envoyer des astronautes sur Mars – ont en commun de survenir après une période de relative prospérité dont on aurait pu profiter pour équilibrer les comptes publics et réaliser des surplus servant justement à mieux faire face aux problèmes qui surgissent.

Morales: s’endetter au rythme où on le fait présentement équivaut à refiler la facture de nos excès à nos enfants. Les «conservateurs» de Stephen Harper auront ajouté 100 milliards $ de déficits à une dette fédérale dépassant 500 milliards $, les «libéraux» ontariens 50 milliards $ à une dette de 220 milliards $, Barack Obama 3 ou 4 trillions $ à la dette fédérale américaine que les Républicains avaient déjà montée à 10 trillions $.

Et ça, ce sont les chiffres officiels: la quasi-banqueroute de la Grèce nous a appris qu’on ne peut pas se fier aux chiffres officiels pour nous donner l’heure juste. Déjà, des systèmes de pensions et de sécurité sociale, de même qu’une foule de fonds spéciaux et d’agences parapubliques, dont nos gouvernements endossent les pertes, ne figurent pas au budget.

Un lecteur m’écrivait il y a quelques semaines: «Depuis quand faudrait-il ajuster le système aux finances publiques? C’est une réaction bien canadienne que de placer les finances avant tout le reste. Les finances doivent être pensées en fonction du projet de société que l’on veut se donner, pas l’inverse.»

Désolé, mais ça, c’est de la pensée magique. Pensez-vous vos finances personnelles en fonction de vos projets (faire le tour du monde, prendre du temps pour écrire un roman, rouler en Porsche…), ou n’est-ce pas votre marge de manoeuvre qui est déterminée par l’état de vos finances? C’est la même chose pour tout le monde; il n’y a pas de raison pour que cela ne doive pas être la même chose pour nos gouvernements.

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Assurément, certains «projets de société» favorisent plus que d’autres la création de richesse et le progrès. Ce sont plus souvent les projets où l’État prend le moins de place dans la vie des gens, dépense relativement peu et, par conséquent, réussit à équilibrer ses budgets.

Auteur

  • François Bergeron

    Rédacteur en chef de l-express.ca. Plus de 40 ans d'expérience en journalisme et en édition de médias papier et web, en français et en anglais. Formation en sciences-politiques. Intéressé à toute l'actualité et aux grands enjeux modernes.

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