Le Théâtre français de Toronto fait son bilan santé

La pandémie du virus H1N1 semble s’éloigner, mais rien n’empêche de faire un petit bilan, pour la route. Un remède de grand-mère, une cuillérée de quiproquo, une pincée de cynisme, et une grande dose de rires aux éclats et vous serez guéris de tous vos maux. Même pas besoin d’aller à l’hôpital, le TfT s’occupe de tout. Sganarelle est à votre chevet, attention aux zygomatiques.

La farce est un exercice à la fois simple et périlleux pour un metteur en scène ou pour un comédien.
Il faut faire rire à tout prix et cela requiert donc «une énergie particulière», explique Jean-Stéphane Roy, le chef d’orchestre pour les représentations de la pièce Les médecins de Molière.

Le Théâtre français de Toronto, en partenariat avec le Théâtre La catapulte d’Ottawa, a monté un projet qui s’étend sur cinq ans et qui a pour but d’amener le théâtre dans les régions de l’Ontario.

Les producteurs sont partis sur un rythme d’une pièce par an. Celle qui sera présentée à Toronto du 3 au 20 février 2010 lance le coup d’envoi de ce projet.

Le jeu au premier plan

Au départ, l’idée était de faire trois farces puis elle a dérivé en une version avec une seule farce, qui emprunte quelques extraits à plusieurs autres œuvres de Molière.

La farce tire son propos de deux principales pièces, Le médecin malgré lui et Le médecin volant, ponctuées de tirades venues de L’amour médecin, du Malade imaginaire et des Jalousies du barbouillé.

Jean-Stéphane Roy nous précise sa démarche: «Je voulais aller à l’essence de la farce, j’ai poussé tous les non-dits. Le plus important dans la farce, c’est le jeu, le texte reste en arrière-plan. Pour une page de texte, il y a trois pages de mise en place.» Pour les comédiens, les difficultés viennent principalement de l’écriture.

«La syntaxe est très différente d’aujourd’hui. On a créé des apartés où l’on décroche pour donner les définitions de mots.»

La grande complexité de jouer du Molière s’établit dans le fait que ça a déjà été fait et refait, en bon, en mauvais. «Les gens s’attendent à voir Molière guindé, pas drôle. Pour beaucoup, c’est du musée», lâche le metteur en scène.

Mais lui semble avoir trouvé la solution: «Il faut aller au bout de chaque intention, sinon on ne comprend pas. C’est un show à regarder». Pas un spectacle à écouter simplement donc. Les médecins de Molière va donc s’attacher à montrer toute la cruauté de l’écriture de Molière qui voyait dans les médecins de son temps, ni plus ni moins que des charlatans.

La profondeur de l’oeuvre

Il faut aussi se rappeler que Molière écrivait ses pièces pour des troupes qui jouaient parfois dans des roulottes, en pleins champs. Le décor ne joue pas le rôle premier, on voit les acteurs qui vont entrer en scène, ils font partie du spectacle de bout en bout. La troupe doit faire corps, n’être plus qu’un.

Des concepts que reprend Jean-Stéphane Roy dans sa mise en scène où les comédiens se trouveront sur un plateau de bois pivotant. Pas de fioriture, on le redit regardez le jeu et c’est tout!

Jean-Stéphane Roy est en passe de devenir maître dans la compréhension de l’œuvre de Molière. Cinq pièces du classique comique en cinq ans, il l’aime bien finalement cet auteur qu’il s’était juré de ne jamais monté! En travaillant sur le jeu et les textes de Molière, il a découvert toute la profondeur du propos bien en avance sur son temps.

Molière, à l’époque, prévenait déjà les lecteurs de ses comédies: «Il y a beaucoup de choses qui dépendent de l’action, on sait bien que les comédies ne sont faites que pour être jouées; et je ne conseille de lire celle-ci qu’aux personnes qui ont des yeux pour découvrir dans la lecture tout le jeu du théâtre…»