Le Musée de la guerre: un temple du souvenir

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Publié 06/06/2006 par Marta Dolecki

À Ottawa, depuis le 31 mai dernier, les faits saillants de la guerre de Sept ans sont désormais sortis hors du cadré figé des livres d’Histoire pour venir prendre vie au Musée canadien de la guerre (MCG) le temps d’une exposition.

Cette dernière, intitulée Le Choc des empires, la guerre qui fonda le Canada propose une incursion dans l’univers d’un conflit qui dura de 1756 à 1763 et eut pour effet de faire basculer la Nouvelle-France aux mains des Anglais. Plus de 200 artefacts, médailles, armes de guerre et uniformes d’époque – témoins silencieux d’une époque révolue – permettent de mettre des mots et des images sur cet épisode de l’Histoire.

La guerre de Sept ans opposa les Français aux Britanniques dans une lutte sans merci pour la conquête de l’Amérique du Nord. Elle éclata d’abord en Ohio avec l’expulsion de colons britanniques, avant de s’étendre à l’Europe, à la ville de Québec et même à l’Afrique en passant par l’Asie et les Antilles. Présentée en collaboration avec le musée américain Senator John Heinz Pittsburgh Regional History Centre, Le Choc des empires redonne vie à différents acteurs de cette époque tumultueuse.

L’exposition, en montre jusqu’au 12 novembre prochain, contient des pièces en provenance de 54 collections d’Europe et d’Amérique du Nord. On y retrouve par exemple George Washington en mannequin grandeur nature, visiblement déchiré à l’idée de signer un document qui obligerait ses troupes à capituler.

Le général américain a ici pour compagnon de route un certain Jack Tar, matelot britannique qui porte un toast à la victoire de ses pairs.

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Plus loin, on peut apercevoir un guerrier iroquois répondant au nom de Tanaghrisson. Ce dernier fut complice des Français avant le déclenchement officiel de la guerre.

Parmi les pièces maîtresses de l’exposition figure également une tasse à vin, propriété du général et marquis français Louis-Joseph de Montcalm. Un document officiel signé des mains de George Washington vient endosser l’assassinat d’un envoyé français. Enfin, une série de tableaux du peintre Dominic Serres représente la ville de Québec en ruines. D’authentiques tomahawks, mocassins et espadons d’époque complètent l’exposition.

Mais au-delà de la guerre de Sept ans, le MCG, c’est plus de 5 000 ans d’Histoire et de conflits qui se déroulent sous les yeux des visiteurs et ce, à quelques minutes du centre-ville d’Ottawa, sur la rive sud de la Rivière des Outaouais.

À l’intérieur d’un édifice impressionnant, 62 000 pieds carrés d’exposition permanente aident Canadiens et touristes étrangers à mieux se souvenir des guerres fratricides qui ont déchiré les continents. Il faut compter pas moins d’une demi-journée si l’on veut explorer en détail chacune des salles du musée.

L’exposition permanente, divisée en cinq galeries, compte au total 500 000 artefacts: avions, chars, véhicules criblés de balles, masques à gaz, restes d’obus, lettre d’un jeune soldat au front qui remercie sa famille de lui avoir envoyé des provisions… Et qui ne reviendra pas. À travers la reconstitution de ces vies si ordinaires ayant marqué l’Histoire, la guerre acquiert un visage humain qui émeut profondément le visiteur.

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Une première visite au Musée canadien de la guerre commence avec un passage obligé par la Salle du souvenir. Elle abrite la tombe du Soldat inconnu tombé au front pendant la Première guerre mondiale. Précisément à 11h, chaque 11 novembre, Jour du Souvenir, une lucarne laisse passer les rayons du soleil qui éclairent la pièce pour venir délicatement se poser sur la stèle du soldat.

De la même manière, toute l’architecture du musée a été pensée dans le moindre détail, des fenêtres en code morse où l’on peut lire, sur la pointe nord de l’édifice, «N’oublions jamais», aux murs dont les angles varient de 3 à 31 degrés. Dans certaines salles, le visiteur a parfois l’impression de voir le sol se dérober sous ses yeux. Cette instabilité volontaire est là pour traduire la fragilité de la paix ainsi que le profond sentiment d’angoisse éprouvé par les Juifs pendant l’Holocauste.

Une section particulièrement intéressante du musée vient raconter l’histoire des bombardiers canadiens utilisés pendant la Seconde guerre mondiale. Plus de 3 000 Canadiens ont perdu la vie à bord de ces engins. Des morceaux de ces mêmes avions se retrouvent suspendus en hauteur, aux murs du musée.

Les dessins représentés sur certaines carcasses font penser au fameux loup de Tex Avery. Sur d’autres, des pin-up dénudées affichent sans complexe leurs formes voluptueuses. Loin d’être purement décoratives, toutes ces illustrations ont une signification bien précise. Le nombre de cœurs dessinés autour d’une pin-up est un code secret servant à faire le décompte de toutes les missions réussies. Quant au nom de certains avions, Les Avenging Angels, ils font en réalité référence à leurs propriétaires, les pilotes canadiens, qui avaient simplement pour mission de venger les leurs.

Suivant le cours logique de la visite, la Galerie LeBreton arrive ensuite avec ses 160 pièces d’artillerie et véhicules exposées dans une vaste salle que surplombe le CF-101 Voodoo, un gigantesque avion utilisé pour la défense aérienne du Canada. On y retrouve des chars soviétiques, des sous-marins allemands datant de la Seconde guerre mondiale, mais aussi des engins plus récents comme cette Jeep Iltis criblée de balles; véhicule qui fût utilisé par les Casques bleus durant la Guerre des Balkans.

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Reproduisant les contours d’une cathédrale, la salle de la Régénération est la plus haute du musée. Son sommet de 24,5 mètres est orienté vers la Colline du Parlement et la Tour de la Paix. Les statues de 17 soldats canadiens tombés pendant la bataille de Vimy y sont entreposées.

En continuant ses déambulations au gré des expositions permanentes, le visiteur peut encore revivre l’expérience des tranchées dans d’obscurs couloirs entourés de fils barbelés, de sacs de sable et de masques à gaz. Il peut aussi s’arrêter quelques instants devant la voiture blindée d’Adolf Hitler, celle-là même qui lui servait lors de ses grandes campagnes de propagande en Allemagne.

Des sentiments mêlés d’oppression et de malaise font bientôt place à une certaine tristesse alors que le spectateur pose le pied dans l’une des salles finales. Imprégné d’images de combats meurtriers qui défilent sur les écrans, il constate que, même si plus de deux siècles séparent la guerre de Sept ans du temps présent, les conflits armés, eux, sont encore loin d’être terminés…

Pour plus d’informations sur les expositions du Musée canadien de la guerre, composez le 1 800-555-5621, ou consultez le site Internet du musée au www.museedelaguerre.ca

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