Jean Chrétien passera à l’histoire pour trois grandes réalisations:
– sa longévité politique (député à partir de 1963, ministre dès 1967, élu trois fois premier ministre de 1993 à 2003);
– la réduction des dépenses fédérales et l’élimination d’un important déficit hérité des administrations précédentes (initiatives qui ont été suivies d’une décennie de prospérité);
– et sa décision de ne pas participer à l’invasion américaine de l’Irak en 2003 (parce qu’elle n’était pas autorisée par le Conseil de sécurité des Nations Unies).
Cette invasion de l’Irak est le plus grand fiasco de la politique étrangère américaine depuis la guerre du Vietnam. Au moins, l’intervention au Vietnam, dans les années 60, voulait freiner la progression du communisme en Asie, un objectif parfaitement légitime, comme pour la guerre de Corée dans les années 50. Et tout le monde aujourd’hui se félicite d’avoir sauvé au moins la Corée du Sud.
Personne ne croyant aux raisons invoquées par Washington, l’invasion de l’Irak avait même réussi à effacer la solidarité pour les Américains qu’on avait pu ressentir après les attaques du 11 septembre 2001, alors que l’invasion de l’Afghanistan pour en déloger al-Qaïda avait reçu un large appui international.
Mais l’Irak n’avait rien à voir là-dedans, contrairement à ce que croient encore un trop grand nombre d’Américains. Tous les pirates de l’air du 11 septembre venaient d’Arabie Saoudite en passant par… l’Allemagne. Saddam Hussein ne possédait pas d’armes de «destruction massive» et ne terrorisait que son peuple. Encouragé par les États-Unis, il avait même livré une guerre terrible à l’Iran de 1980 à 1988. Il a commis l’erreur d’attaquer le Koweït, un allié de Washington, en 1990. Mais même après avoir été repoussé, il n’a pas été éliminé, tant l’alternative – un pays dominé par la majorité chiite comme celle de l’Iran – déplaisait aux Américains et aux Saoudiens.
Barack Obama, qui a retiré les derniers régiments américains de l’Irak en décembre 2011, est blâmé aujourd’hui par les Dick Cheney et autres interventionnistes tous azimuts à la John McCain pour avoir «abandonné» l’Irak, où la guerre civile, larvée depuis des années, a éclaté au grand jour il y a deux semaines.