La meilleure option le 6 octobre

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Publié 03/10/2011 par François Bergeron

Les Ontariens vont aux urnes ce jeudi 6 octobre. Les chefs des trois partis et leurs candidats ont mené une campagne un peu trop scriptée. Leurs publicités télévisées ont versé dans la caricature. Leurs programmes, en apparence étoffés, ont rarement dépassé les lieux communs et reposent sur des perspectives de croissance fantaisistes. Mais les débats sont restés civils, les enjeux sont importants, méritent qu’on s’y intéresse et justifient une forte participation à ce scrutin.

L’emploi, clé de la relance économique chez nous comme ailleurs, a dominé la campagne. Vieillissement de la population oblige, la santé et le sort des personnes âgées ont également interpellé les politiciens. Ces problèmes ne sont pas intraitables, mais ils sont complexes.

Au pouvoir depuis huit ans, les Libéraux font miroiter la création d’emplois dans des secteurs de pointe comme les énergies «vertes» et l’auto électrique, grâce à un gouvernement activiste prêt à faciliter les investissements étrangers.

Ces emplois futuristes sont rarement les mêmes que ceux qui ont été perdus pendant la récession de 2008-09, qui a frappé surtout le secteur manufacturier traditionnel. C’est le cheval de bataille d’Andrea Horwath, la chef du Nouveau Parti démocratique, qui cherche d’abord à protéger les emplois existants, entre autres au moyen de crédits d’impôt ou de mesures punitives, mais qui taxerait davantage les entreprises.

Les Conservateurs renvoient ces deux visions dos à dos et proposent plutôt d’instaurer un climat favorable – moins de taxes et de réglementation – à la création de «vrais» emplois, c’est-à-dire d’emplois résultant d’investissements privés, associés à des produits et des services utiles, qui ne sont pas maintenus artificiellement par l’État.

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Tim Hudak n’a pas choisi là le concept le plus facile à expliquer, ni le plus susceptible d’épater la galerie… ce qui serait tout à son honneur s’il n’avait pas passé toute la campagne à critiquer des taxes qu’il compte conserver, comme la TVH (sur tout sauf l’électricité, une exception symbolique).

La plupart des électeurs voient mieux les emplois «créés» par Dalton McGuinty, ou ceux qui seraient «protégés» par Andrea Horwath, que ceux – pourtant bien réels – qui n’auraient pas été créés ailleurs dans l’économie en raison du détournement de fonds opéré par le secteur public ou à cause d’une réglementation qui place la barre trop haute.

Quel que soit le gouvernement en place après le 6 octobre, on ne doit donc pas s’attendre à des miracles. Malheureusement, ce n’est pas en campagne électorale que nos politiciens admettent l’ampleur des défis auxquels nos sociétés font face.

Soucieux de mener une campagne optimiste sans verser dans le jovialisme, considérant que les Ontariens n’ont pas tous les mêmes privilèges que les syndiqués de la fonction publique, les Libéraux misent aussi sur des programmes de réorientation de carrière, de formation de la main-d’oeuvre et sur le renforcement du système scolaire en général.

L’éducation (25 % du budget provincial), avec la santé (50 %), serait également une vache sacrée pour le Parti progressiste-conservateur, dans le sens où toute restructuration de ces deux secteurs viserait à leur dégager du nouveau financement et non à le réduire. On verra. Si on pouvait trouver des moyens de faire plus avec moins, pourquoi s’en priverait-on?

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Aucun des trois partis à Queen’s Park ne propose d’équilibrer le budget de la province (environ 110 milliards $ de revenus pour 125 milliards $ de dépenses et une dette de 240 milliards $ cette année) avant 2017-18. C’est beaucoup trop loin, considérant ce qui se passe aux États-Unis et en Europe.

On ne connaîtra pas de croissance soutenue d’ici 2018. Il y aura des hauts et des bas. On devrait laisser un ralentissement faire son oeuvre plutôt que d’y répondre en s’endettant davantage – ce que les Libéraux provinciaux et les Conservateurs fédéraux et à peu près tout le monde ont fait la dernière fois.

Tout cela ne nous dit donc pas s’il faut choisir, le 6 octobre, de réélire le gouvernement libéral de Dalton McGuinty ou de donner une chance à l’opposition conservatrice de Tim Hudak. Selon les sondages, on aura un gouvernement minoritaire, avec le NPD d’Andrea Horwath en bonne position sur l’échiquier politique.

Une victoire conservatrice à Queen’s Park représenterait un «tour du chapeau» après la réélection du parti de Stephen Harper à Ottawa le 2 mai dernier et celle du maire Rob Ford à Toronto le 25 octobre 2010. Est-ce qu’on veut vraiment mettre tous nos oeufs dans ce même panier? Une telle hégémonie politique serait malsaine. Plusieurs projets nécessitent la participation des trois niveaux de gouvernement: une certaine diversité d’intérêts est la bienvenue.

Enfin, pour les Franco-Ontariens et pour les intérêts supérieurs de la dualité linguistique canadienne (certains diront que j’aurais dû commencer par ça…), la réélection des Libéraux de Dalton McGuinty serait la meilleure option.

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McGuinty est le seul des trois chefs qui soit fonctionnel en français et qui, de ce fait, comprend mieux l’importance du bilinguisme dans l’ordre naturel des choses au Canada. Son bilan en matière de services en français est plus qu’honorable, notamment avec la création du poste de commissaire aux services en français.

Les Néo-Démocrates sont sympathiques à la cause eux aussi, mais ils ont d’autres défauts, que devinent les lecteurs réguliers de cette chronique.

Inversement, ces mêmes lecteurs savent que j’arrive souvent à trouver des qualités aux Conservateurs, mais pour le bilinguisme au Canada et le développement des services en français en Ontario, leur attitude est désolante. Le maximum qu’on puisse s’attendre de Tim Hudak est qu’il «respecte la loi» (sur les services en français), sans plus. «C’est un peu court, jeune homme», comme dirait Cyrano.

Auteur

  • François Bergeron

    Rédacteur en chef de l-express.ca. Plus de 40 ans d'expérience en journalisme et en édition de médias papier et web, en français et en anglais. Formation en sciences-politiques. Intéressé à toute l'actualité et aux grands enjeux modernes.

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