Aujourd’hui on prend des photos de tout, partout, avec un portable, un iPad. Mais le vrai photographe n’est pas le détenteur de l’IPhone 7 dernier cri d’Apple. C’est plutôt celui qui photographie d’abord avec ses yeux, parce qu’il a le sens de l’ambiance, des couleurs ombres et lumières, des émotions troublantes que camoufle une image qu’il veut capter et transmettre à jamais. Le vrai photographe est un artiste visuel en action de l’aube à la nuit.
C’est celui qui entend constamment la musique des images et veut la perpétuer à travers son œuvre. Parce qu’il prétend dire sans parler, porter les non-dits, dénoncer sans mots ni scrupules, convaincre en toute liberté d’aimer ou d’exécrer. Le vrai photographe ne se limite pas au visuel, mais aussi et surtout à tout ce qui émeut chez l’humain.
J’ai croisé un tel personnage à Port-au-Prince en décembre 2015: le photographe humaniste Patrice Dougé, fils de Gérard Dougé, poète et rédacteur de l’école littéraire Pluréalisme: un mouvement littéraire haïtien classé parmi l’un des plus originaux.
Obsession pour l’image
On s’est rencontrés autour d’une carafe de vin frais, confortablement installés dans la cour ombragée du domaine enchanteur de Guylaine Mérovée-Pierre à Thomassin. D’emblée notre conversation s’est animée chaleureusement autour de notre passion commune pour la photographie.
«J’aime photographier depuis ma découverte imprévue d’une caméra délaissée au hasard par mon père quand j’avais 5 ans», a-t-il confié. «À 9 ans j’ai reçu en cadeau mon premier appareil-photo. À partir de là mon obsession pour la photographie a germé et me captive toujours depuis plus de 30 ans. Ma famille n’a pas eu le choix que de me laisser poursuivre ma destinée.»