Guy Mignault: «Le théâtre, y’a qu’ça de vrai!»

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Publié 17/07/2007 par Adam Pokorn

À l’occasion des 60 ans de Guy Mignault, directeur artistique du Théâtre français de Toronto, L’Express vous propose une entrevue réalisée par Adam Pokorn, élève de 11e année à l’école secondaire Étienne-Brûlé, dans le cadre de son cursus scolaire. Dirigé par le jeune étudiant il y a quelques semaines, le dialogue porte essentiellement sur le travail de Guy Mignault au sein du TfT et ses impressions personnelles face aux défis qu’il affronte à travers son travail de directeur artistique.

Adam Pokorn: On connaissait auparavant le Théâtre français de Toronto sous le nom plus chaleureux de «Théâtre du P’tit Bonheur». Pourquoi ce changement?

Guy Mignault: C’est arrivé il y a vingt ans. Moi, je suis venu jouer au Théâtre du P’tit Bonheur en 1982 et en 1986. Puis en 1987 s’est déroulé le 20e anniversaire du théâtre. Je m’en souviens, j’avais dit à Claudia Leubeuf, qui était à l’époque la directrice administrative, de ne pas changer de nom.

Je trouvais que le Théâtre du P’tit Bonheur, ça racontait l’histoire de la compagnie. Elle a confirmé mon point de vue. Finalement, le conseil d’administration, a sûrement pensé que le Théâtre du P’tit Bonheur faisait un peu petit… pas assez ambitieux. Là, ils ont décidé d’adopter Le Théâtre français de Toronto.

Quelles sont les difficultés à surmonter au théâtre dans un milieu minoritaire?

Avant tout, l’argent et le fait de rejoindre les gens… Quand on est une compagnie de théâtre, il faut absolument qu’on s’associe aux autres organismes, mais toujours en protégeant notre statut professionnel.

On s’adresse à la communauté, mais on n’est pas un théâtre communautaire. Tous nos artistes sont des artistes professionnels qui ne font que ça pour vivre. C’est important qu’on redéfinisse souvent cette ambiguïté.

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Comment fonctionnez-vous lorsque vous êtes en tournée?

Le désavantage, c’est le fait d’être en voyage. Ce qu’il faut faire, au moment de la planification, c’est d’avoir le plan des différentes salles où l’on va jouer, afin de planifier. Ça nous permet de sortir un peu des habitudes.

Une fois l’aspect technique maîtrisé, il faut louer les hôtels pour les comédiens, et de nombreux autres paramètres. Il y a parfois des acteurs qui sont végétariens, d’autres qui sont fumeurs. C’est une question de logistique, mais on a des gens vraiment qualifiés qui font tout ça, on est vraiment privilégié.

Comment procédez-vous pour les choix des pièces, des comédiens?

C’est un casse-tête. On conçoit une sorte de plan stratégique à suivre sur trois ans. En principe, sur cette période, je sais que je veux au moins avoir deux pièces de Molière, une de Michel Tremblay. Il nous faut aussi deux créations: une qui vient d’ici et une qui vient de l’extérieur. En fonction de cela, on étudie les possibilités qui s’offrent à nous.

Le maintien de la langue française en milieu minoritaire est-il une composante essentielle dans votre action?

Oui, forcément. L’Alliance Française m’a d’ailleurs honoré à ce sujet. Quand j’avais fait mon petit discours de remerciements, j’avais dit qu’on ne pouvait pas faire du spectacle en français à Toronto sans s’impliquer dans la francophonie.

Forcément, tout est lié. Les êtres humains, c’est une boule de culture, c’est une boule de toutes sortes d’affaires, c’est de la chair et des os. Mais, c’est plus que cela, c’est la culture. Une des définitions de la culture consiste à dire que c’est ce qui reste quand on a enlevé tout le reste. C’est cela notre métier, c’est la culture qui fait qu’on se parle et c’est elle qui fait qu’on se comprend si rapidement. Le théâtre, y’a qu’ça de vrai!

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Êtes-vous subventionné dans le cadre de votre action pour la francophonie?

Oui, et heureusement, car nous ne pourrions pas vivre autrement. La moitié de notre budget, c’est de la subvention. Ensuite, 20% proviennent de la vente des billets, et les 30% restants sont le résultat des dons de commanditaires, de fondations, mais aussi des dons privés et des dons personnels. De nombreuses personnes nous soutiennent.

Par ailleurs, vous avez instauré un système de surtitres depuis quelque temps. La fréquentation du théâtre a-t-elle évolué depuis?

Au cours des soirées surtitrées, le nombre de spectateurs qui se disent non-francophones tourne autour de 60%. Nous sommes alors en minorité. C’est une réussite car il y avait beaucoup d’anglophones de Toronto qui ne savaient même pas que l’on existait. Le théâtre avait 37 ans à l’époque où l’on a commencé à faire des surtitres.

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