Le dépôt du plan budgétaire du gouvernement conservateur le 27 janvier laisse entrevoir un déficit de 64 milliards $ au cours des deux prochaines années fiscales. Si l’énormité de cette somme a permis à Stephen Harper de préserver son job en écartant la menace d’une nouvelle élection brandie par les parties d’opposition en novembre dernier, une question ne manque pourtant pas d’être posée: l’ensemble des dépenses projetées pour contrer la récession qui se précise est-il vraiment à la mesure de la gravité réelle de la situation économique?
La plupart des économistes sont tombés d’accord pour conclure que l’économie canadienne est officiellement entrée en récession, définie comme baisse du PIB pendant deux trimestres consécutifs, au dernier trimestre de 2008. Il y a par contre un grand désaccord quant à sa durée et à son véritable impact.
Depuis un an, les prévisions ont été tour à tour démenties par les nouvelles découvertes. En 2008, les économistes anticipaient que le Canada connaîtrait une croissance de 2,4 % un an plus tard, pour réviser leur prévision à la baisse en automne dernier et conclure à un taux de croissance médiocre de 0,3 % pour cette année. Lors du dépôt de son programme budgétaire, le gouvernement fédéral a plutôt prévu une baisse de 0,8 % du PIB en 2009, tandis que deux jours plus tard, le Fonds monétaire international (FMI) évaluait cette baisse à 1,2 %. D’un optimisme relatif, les prévisions sont ainsi passées à un pessimisme inquiétant.
Si, à la suite des analystes, un nombre croissant de responsables politiques et économiques sont d’avis que la crise que nous traversons actuellement est comparable historiquement avec la Grande Dépression des années 30, ils refusent cependant de reconnaître l’ampleur des problèmes qu’il va falloir affronter en vertu de cette comparaison: perte massive d’emplois, développement de la pauvreté, repli des nations sur elles-mêmes, renforcement des tendances protectionnistes, illustré récemment par le slogan «Buy American» aux États-Unis, rendant plus difficile la recherche d’une solution à l’échelle internationale, etc. On oublie également que la Grande Dépression a ouvert la voie à la montée du fascisme dans plusieurs pays et aux tragédies de la Seconde Guerre mondiale.
Pour lutter efficacement contre les effets de la crise en cours, il faut d’abord prendre connaissance de ses causes profondes.