Éponymes: avant-dernier épisode!

Partagez
Tweetez
Envoyez

Publié 01/05/2007 par Martin Francoeur

Ne vous en faites pas… J’ai bientôt fini de vous partager mes découvertes sur les éponymes! Si vous suivez cette chronique depuis les deux derniers mois, vous savez que j’ai eu comme un coup de foudre pour ces mots du français qui proviennent de noms propres. Que ce soit des noms de personnes, de lieux géographiques, de dieux et de déesses ou de héros de la mythologie, il est surprenant de voir le nombre de mots de la langue française qui doivent leur existence à un nom propre.

Si vous suivez bien, vous savez que je procède exceptionnellement par ordre alphabétique. Une sorte de feuilleton des éponymes, que je partage parcimonieusement avec vous. Nous en sommes aux mots commençant par les lettres «q», «r» et «s». Disons qu’on retient seulement les «r» et les «s», puisque je n’ai pas trouvé d’éponymes commençant par la lettre «q»!

Les éponymes, je vous le rappelle, sont des noms qui sont entrés dans le vocabulaire courant par le biais d’un nom propre. On peut ainsi désigner des inventions, des faits, des objets, des lieux, des théories, des arts, des époques, des fleurs, des unités de mesure et bien d’autres choses.

D’abord, il convient de mentionner que le merveilleux monde de la gastronomie ne serait pas le même sans les éponymes commençant par «r» et par «s». Un des éponymes les plus célèbres est en effet le «sandwich», qui désigne un mets composé d’aliments entre deux tranches de pain. Le mot vient de John Montague, comte de Sandwich. On dit que le cuisinier de cet aristocrate a inventé ce mets pour permettre au comte de manger sans arrêter de jouer aux cartes.

Il y a aussi les fromages comme le «roquefort», qui tire son nom de la commune française de Roquefort-sur-Soulzon, où on le fabrique. C’est la même chose pour le «saint-nectaire», un fromage à pâte pressée qui tire son nom de la commune de Saint-Nectaire.

Publicité

Toujours dans la sainteté, on hésite sur l’origine du «saint-honoré», qui désigne un gâteau garni de crème Chantilly et de choux glacés. Certains disent qu’on doit ce nom à Saint Honoré, le patron des boulangers, alors que d’autres avancent que le nom vient de la rue Saint-Honoré, sur laquelle le pâtissier qui a inventé ce gâteau tenait boutique. On notera enfin que la «sardine» vient de «Sardaigne», cette île de la Méditerranée près de laquelle, dit-on, ce petit poisson abonde.

Les vêtements et les étoffes aussi présentent quelques curiosités éponymiques. Le «raglan», un manteau ample dont les manches ont un style particulier, viendrait de Lord Raglan. C’était un baron qui a commandé les troupes britanniques pendant la guerre de Crimée. Et le «raglan» rappelle la cape que portaient les soldats britanniques. On attribue aussi une origine britannique au «spencer», qui désigne une veste très courte. Le comte George John Spencer est celui qui aurait mis ce vêtement à la mode.

Même le mot «satin» est un éponyme. Cette étoffe de soie tire son nom de Zaitun, le nom arabe de la ville chinoise de Tsia-Toung, où on fabriquait de telles étoffes. Et le «suède», une peau finie côté chair, vient tout simplement de la Suède.

Puisqu’il est question de pays, mentionnons au passage le «suisse», qui est un petit écureuil au pelage rayé. On dit que les mercenaires suisses portaient des uniformes dont les rayures ressemblaient à celles de ce petit animal.

Des personnages de la littérature ou de la mythologie, pas toujours très connus, ont donné naissance à des noms communs ou des adjectifs plus célèbres. Tout le monde sait ce qu’est un «renard», mais ce que l’on sait moins, c’est que le mot vient de Renart, le personnage principal du «Roman de Renart», qui était justement un renard. Mais on appelait alors cet animal «goupil».

Publicité

Le personnage de Sacripante, dans les écrits de Boiardo et d’Aristote, a donné naissance au mot «sacripant», pour désigner une personne qui fait des mauvais coups. Et le personnage de Rocambole, héros des romans de Ponson du Terrail qui vivait des aventures incroyables, a donné l’adjectif «rocambolesque», qui signifie «rempli de péripéties extraordinaires. Enfin, le mot «sosie», pour désigner une personne ressemblant parfaitement à une autre, vient de Sosie, le valet d’Amphitryon qui, dans diverses pièces de théâtre, doute de sa propre identité quand Mercure emprunte ses traits.

Les sportifs seront heureux d’apprendre que le «rugby» doit son nom à la ville d’Angleterre où on a inventé ce sport. Les scientifiques savent sans doute que la «salmonelle», une bactérie, doit son nom à Daniel Elmer Salmon, un pathologiste américain. Quant aux mélomanes, ils ignorent peut-être que le «saxophone» doit son nom à Adolphe Sax, un instrumentiste et musicien belge qui a inventé cet instrument.

Le «saint-bernard» est un chien qui doit son nom au col du Grand-Saint-Bernard, l’endroit où cette race canine a d’abord été utilisée pour des sauvetages.

Le «sadisme», que l’on définit comme étant une cruauté ou un plaisir de faire souffrir les autres, vient bien sûr du marquis de Sade, un écrivain français dont les romans présentaient des scènes érotiques cruelles.

Et des jumaux «siamois», soudés l’un à l’autre par une partie de leur corps, doivent leur nom au Siam, l’ancien nom de la Thaïlande, où seraient nés les premiers jumeaux soudés connus.

Publicité

Trois belles trouvailles pour finir. Le mot «robinet» vient de Robin. Il s’agit du surnom qu’on donnait aux moutons. On dit que les premiers robinets avaient une forme qui rappelait celle de la tête des moutons.

Le mot «silhouette», qui désigne la ligne générale d’une personne ou la forme d’un objet, vient d’Étienne de Silhouette. Contrôleur des finances de Louis XV, il prévoyait de faire de grandes réformes qui restèrent toutefois inachevées à son départ. On a alors utilisé son nom pour désigner ce qui est inachevé et, par extension, le dessin sommaire qu’est une silhouette.

Enfin, le «solécisme», une sorte de construction syntaxique fautive, a pour origine la ville turque de Soles, où les habitants faisaient semble-t-il plusieurs fautes de langage! Ce n’est pas notre cas, espérons-le…

Auteur

  • Martin Francoeur

    Chroniqueur à l-express.ca sur la langue française. Éditorialiste au quotidien Le Nouvelliste de Trois-Rivières. Amateur de théâtre.

Partagez
Tweetez
Envoyez
Publicité

Pour la meilleur expérience sur ce site, veuillez activer Javascript dans votre navigateur