Décembre 1980, les portes de l’avion s’ouvrent en plein air sur la piste de l’aéroport de Dakar. Joanne est surprise par la chaleur intense; une sensation qu’elle n’a jamais connue auparavant. Elle adore! Son groupe de Jeunesse Canada Monde est basé à Nguéniène dans la région de Thiès à l’ouest du pays, proche de la mer. Un village rural où les familles vivent dans les huttes typiques entourées de palissades. Les femmes se promènent seins nus, un pagne enroulé autour de leur taille.
Le rythme de vie des villageois est bercé par le travail dans les champs maraîchers, le transport à pieds de l’eau potable provenant du puits du village, le bruit du pilon dans le mortier, la cérémonie du thé servi à l’ombre du baobab, le marchandage des produits locaux au petit bazar central, le son des tam-tams et les danses effrénées les soirs de pleine lune, les fêtes communautaires marquées par les spectacles de lutte traditionnelle.
Une vie naturelle et paisible selon les souvenirs de Joanne, incomparable au vécu misérable dans les taudis surpeuplés en banlieue de Dakar. Elle se souvient, les jours de congé, de leur trajet en taxi collectif de Nguéniène à M’Bour, pour aller à la mer mais surtout pour voir l’arrivée des pêcheurs en fin d’après-midi. Le groupe s’était aussi rendu à l’île de Fadiouth sur la petite côte, dont le sol est uniquement constitué de coquillages provenant de l’exploitation des huitres par les femmes du village. Impossible d’y circuler incognito!
Lors d’une randonnée à Dakar, les jeunes avaient pris le traversier vers l’île de Gorée, le plus grand centre de commerce d’esclaves de la côte africaine du XVe au XIXe siècle: un symbole de l’exploitation humaine mais aussi un haut-lieu de réconciliation. Le groupe avait piqueniqué sur la plage de la petite commune dont les vieilles maisons ornées de bougainvilliers siégeaient autour d’une petite crique de sable baignée d’eau limpide.
Joanne se rappelle la vaillance des femmes de Nguéniène, organisatrices en chef de la vie communautaire. Sans leur persévérance et respect de l’environnement, le village se serait peut-être effondré. Les ainés que l’on garde à la maison et dont on vénère la sagesse jusqu’à la fin; la discipline inculquée par tous les villageois à chaque enfant de la communauté; l’importance que l’on accorde aux rapports humains avant tout. On donnait préséance à l’être plutôt qu’à l’avoir.