De l’Île Maurice à la Ville-Reine

Ryerson se penche sur l’immigration francophone en Ontario

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Publié 04/02/2014 par François Bergeron

Au cours des 10 dernières années, la région de Toronto a reçu plus de 52% des immigrants francophones en Ontario (plus de 32% choisissant Ottawa), venus surtout de l’Île Maurice, du Liban, de France, de la République démocratique du Congo (RDC Kinshasa) et du Maroc.

Pour tout l’Ontario, 4559 immigrants (13%) sont venus du Liban, 4454 (13%) d’Haïti, 3744 (11%) de la RDC, 2939 (8%) de France, 2765 (8%) du Maroc et 2759 (8%) de l’Île Maurice.

Ce sont là quelques-unes des données que l’on retrouve dans une récente étude de Kathryn Barber, doctorante en politiques de l’immigration à l’Université Ryerson.

Elle a planché là-dessus l’été dernier dans le cadre d’un poste d’assistante-chercheuse créé par le Centre de recherche en immigration et établissement de l’université Ryerson (Ryerson Centre for Immigration and Settlement) et le ministère des Affaires civiques et de l’Immigration de l’Ontario. Ce serait la première étude sur l’immigration francophone à s’intéresser principalement à l’Ontario.

Mauriciens ou Martiens?

L’importance des Mauriciens dans ses tableaux en étonne plusieurs. On en croise rarement dans les activités francophones et ils seraient relativement peu nombreux à utiliser nos services sociaux.

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«Nous rencontrons surtout des Congolais», confirme Norbert Piché, coordonnateur des services d’établissement des nouveaux arrivants au Centre francophone de Toronto.

Rajaa Razafiarisoa, directrice des communications de La Passerelle I.D.É., organisme qui travaille principalement à l’intégration des nouveaux arrivants, connaît quelques Mauriciens mais indique voir passer beaucoup plus de Congolais, Camerounais, Rwandais et Haïtiens. «L’île Maurice est bilingue, peut-être se servent-ils surtout des services anglophones ici», avance-t-elle.

De nombreux Mauriciens sont d’ethnicité indienne ou chinoise, explique aussi l’animateur de radio franco-mauricien-torontois Éric Cader. «C’est une société multiculturelle relativement prospère, mais l’attrait de la vie à l’étranger est très fort: c’est un symbole de réussite.»

3,2%

«J’ai été surprise d’apprendre que l’Ontario est la deuxième destination pour les immigrants francophones» (après le Québec, bien sûr), indique Kathryn Barber en entrevue à L’Express. Elle s’attendait à trouver le Nouveau-Brunswick officiellement bilingue au 2e rang.

Le nombre des francophones s’établissant au Nouveau Brunswick a d’ailleurs diminué pendant la période étudiée, alors qu’il est en progression constante en Ontario, atteignant ces deux dernières années 3.2% de tous les immigrants au Canada (l’objectif provincial officiel est de 5%).

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De 2001 à 2012, l’immigration francophone dans tout le Canada n’a compté que pour 9.9% de tous les immigrants, alors que près du quart de la population du pays est francophone.

Kathryn Barber a analysé des statistiques, elle n’a pas discuté avec les nouveaux arrivants eux-mêmes. «J’aurais besoin de faire une autre étude qualitative pour examiner les motivations des immigrants francophones qui choisissent l’Ontario». Selon elle, son étude «démontre un besoin pour plus de recherche sur le sujet». 

Réfugiés économiques

On savait déjà que la francophonie était en expansion à Toronto et dans le sud de l’Ontario grâce à l’immigration, mais son étude va plus loin, indique la chercheuse, «car elle examine la performance des immigrants francophones dans le marché de travail ontarien.»

C’est d’ailleurs dans le titre de son étude: Ontario Francophone Immigrant Profile: Immigration Trends & Labour Outcomes.

La majorité des immigrants francophones ont été admis au pays dans la catégorie «économique», parrainés par quelqu’un ou à leur propre compte, plutôt que dans le cadre de la «réunification familiale» populaire dans d’autres communautés. Un grand nombre d’immigrants francophones en Ontario sont aussi des «réfugiés».

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Dans l’ensemble, leurs revenus sont inférieurs à la moyenne des autres immigrants, sauf pour les travailleurs indépendants qui sont leur propre employeur.

Quelles aptitudes?

Au chapitre des aptitudes professionnelles ou techniques de nos immigrants francophones, c’est le flou artistique. Les aptitudes de la majorité d’entre eux sont carrément inconnues. Chez la minorité dont le niveau est rapporté (par les immigrants eux-mêmes dans leur demande d’entrée au pays), on trouve notamment des enseignants et des comptables.

La chercheuse de l’Université Ryerson remarque aussi que plusieurs personnes possédant un diplôme universitaire dépendent néanmoins de l’aide sociale, «comme si une éducation universitaire n’est pas le meilleur indicateur de succès chez les immigrants francophones».

Kathryn Barber reconnaît que l’étude de l’immigration n’est pas une science exacte, et elle n’adresse aucune recommandation aux pouvoirs publics. Selon elle, «il est clair que le gouvernement ontarien se préoccupe de la communauté francophone parce qu’il fait des efforts pour augmenter le nombre des immigrants francophones qui viennent en Ontario.»

Auteur

  • François Bergeron

    Rédacteur en chef de l-express.ca. Plus de 40 ans d'expérience en journalisme et en édition de médias papier et web, en français et en anglais. Formation en sciences-politiques. Intéressé à toute l'actualité et aux grands enjeux modernes.

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