Danièle Henkel n’a jamais blâmé personne

Femme d’affaires immigrante exemplaire

Danièle Henkel à la tribune du Club canadien de Toronto le 23 mai.
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Publié 27/05/2019 par François Bergeron

C’est une histoire inspirante – la sienne – qu’est venue livrer l’entrepreneure québécoise Danièle Henkel (cosmétiques) au Club canadien de Toronto jeudi dernier.

«Femme. Femme immigrante. Femme d’affaires.» Chacun de ces trois jalons de son parcours lui a inspiré des leçons qu’elle a transmises en tant que «dragonne» dans la populaire émission de télé-réalité Dans l’oeil du dragon pendant cinq ans, et maintenant à travers son nouveau site de motivation danielehenkel.tv.

Née au Maroc d’une mère juive et d’un père allemand qu’elle n’a pas connu, baptisée catholique, elle a été mariée de force à 19 ans au meilleur ami de son frère, dont elle a eu quatre enfants.

Départ pour le Canada

À l’emploi du consulat américain en Algérie pendant 7 ans, dans des postes de plus en plus importants, elle a décidé de fuir la montée de l’intégrisme islamique (avec son mari et ses enfants) pour recommencer sa vie à Montréal en 1990.

Pourquoi le Canada alors que les États-Unis étaient prêts à l’accueillir? «Parce que ma famille ne parlait pas anglais et souhaitait continuer de vivre en français.»

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«Il y a toutefois français et français», découvre-t-elle en arrivant à Montréal… en hiver!

Danièle Henkel a répondu aux questions de la salle et d’Étienne Fortin-Gauthier, de TFO.

Acclimatation difficile

S’acclimater à la météo, pour cette «Méditerranéenne», allait toutefois s’avérer moins difficile que s’acclimater à la langue et aux nouveaux codes de la société québécoise.

Elle qui s’attendait à trouver un poste «dans les 100 000 $ par année», considérant son expérience diplomatique, ne réussit qu’à en trouver un à 17 000 $ par année… «Par semaine ou par deux semaines?», avait-elle demandé.

Elle a donc dû recommencer au bas de l’échelle. Son mariage n’a pas survécu à cette immigration. Puis sa mère est décédée. Le succès dans l’industrie des produits de beauté – d’abord par la commercialisation d’un gant d’exfoliation, se souvient-elle, un brin embarrassée – est venu un peu plus tard.

«Mais je n’ai jamais blâmé personne», assure-t-elle.

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Cinq leçons de vie

C’est d’ailleurs la première de ses cinq «aptitudes» menant au succès, selon elle: «dire non à la victimisation».

«Immigrer est un choc», reconnaît-elle, «mais c’est un choix, il faut l’assumer».

2e aptitude: «Savoir aller vers l’autre». Le plus grand obstacle au succès des immigrants est la ghettoïsation, croit-elle. Il vaut s’ouvrir à la communauté d’accueil.

3e habileté qui découle de la 2e: «Savoir demander de l’aide». Il est normal de perdre ses repères quand on débarque en pays étranger. Malheureusement, constate-t-elle, «demander de l’aide est souvent difficile pour plusieurs cultures»: les immigrants doivent surmonter ce sentiment.

4e talent: «Savoir se vendre». L’immigrant perd souvent son statut, tombe de son piédestal. Il doit faire valoir sa «valeur ajoutée» à son employeur et à toute la société.

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Enfin, le 5e impératif d’un immigrant est d’apprendre des choses nouvelles, de «se réinventer comme être humain et comme entrepreneur».

Une belle salle pour le Club canadien à l’hôtel King Edward. Plusieurs convives se sont reconnus ou ont été touchés par l’histoire de femme d’affaires immigrante de Danièle Henkel.

En mode ouverture

L’immigration, ça se joue à deux, dit-elle: le pays d’accueil et l’immigrant lui-même ont chacun leur rôle et doivent chacun faire des efforts de rapprochement.

Bien sûr, tout ne réussit pas toujours. Danièle Henkel a pu être avantagée par son nom qui ne «sonnait» pas arabe ou musulman. Mais il ne faut pas baisser les bras. Il faut rester «en mode ouverture à l’autre».

Hommes et femmes complémentaires

Par ailleurs, «notre système économique ayant été pensé par des hommes», l’ex-dragonne déplore que l’homme soit souvent «recruté selon son potentiel», alors que la femme le sera «selon ses réalisations». «Ça devrait être l’inverse!», s’exclame-t-elle.

Même si elle dit beaucoup «aimer être une femme», elle ne peut s’empêcher de remarquer qu’on félicite plus souvent les filles d’être belles… alors qu’on dira aux garçons qu’ils sont bons dans ce qu’ils font.

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Les femmes d’affaires sont toutefois très différentes des hommes d’affaires, ce qu’elle encourage. «La complémentarité est géniale!»

Sa famille reste toutefois sa plus grande fierté. «Le succès en affaires est intangible», explique-t-elle. «Ce qui va perdurer, c’est la famille.»

«Je suis devenue femme d’affaires après avoir réalisé ma carrière de femme! Je suis d’abord une épouse, une mère, une grand-mère… Aujourd’hui, je suis une femme qui fait des affaires.»


Le 20 juin prochain, le Club canadien de Toronto clôture sa saison par un cocktail dînatoire de la Saint-Jean, de 17h30 à 21h au Manoir Glendon. On en profitera pour organiser un «bien cuit» de François Boileau, ex-commissaire aux services en français de l’Ontario.

Auteur

  • François Bergeron

    Rédacteur en chef de l-express.ca. Plus de 40 ans d'expérience en journalisme et en édition de médias papier et web, en français et en anglais. Formation en sciences-politiques. Intéressé à toute l'actualité et aux grands enjeux modernes.

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