Claudette Gravel accroche son micro

Claudette Gravel anime ce samedi 16 août sa dernière émission de Biscotti et café au lit (anciennement Sameplait) à CJBC.  Âgée de 63 ans, l’animatrice, artiste-peintre, photographe et écrivaine quitte Radio-Canada après 17 ans de micro à Toronto et 4 ans à Montréal.

«Je reste à Toronto», confirme-t-elle à L’Express, encore étonnée d’y avoir travaillé pendant si longtemps, elle qui a beaucoup voyagé et qui ne se destinait pas particulièrement à la radio après avoir été «secrétaire juridique, mannequin, hôtesse de l’air, thérapiste de rebirth et de psychosynthèse»…

Elle avait tout de même fait un peu de radio à Valleyfield à l’âge de 19 ans, ainsi qu’à Vancouver où elle avait suivi son mari américain, avant de partir pour un séjour de quatre mois en Inde «pour présenter mon fils à son père»… OK c’est compliqué, reconnaît aujourd’hui l’heureuse grand-mère de deux jeunes enfants.

De retour à Montréal, où elle est secrétaire à Radio-Canada, elle saisit l’occasion qui se présente de travailler pendant quatre ans à la réalisation de l’émission nocturne du philosophe Jacques Languirand.

À Toronto, où elle était censée passer six mois, elle fait du remplacement à l’antenne de CJBC, la station locale de Radio-Canada, notamment en après-midi où elle se découvre – en même temps qu’elle nous fait découvrir – une passion pour la «musique du monde», cette catégorie mal définie où le folklore bulgare et indien peut côtoyer les nouveautés latinos et arabes.

C’est toutefois en tant qu’animatrice du samedi avant-midi que Claudette Gravel s’imposera  à Toronto. L’émission a pu changer de nom et de format. L’animatrice a parfois ajouté à ses tâches celles de recherchiste et de réalisatrice, et pendant un temps elle a aussi comblé le créneau du dimanche avant-midi à l’antenne de CJBC. Mais sa voix et sa passion pour les artistes ont tissé pour les auditeurs un fil d’Ariane à travers la rapide évolution de Toronto et de sa francophonie.

C’est le 24 août 1991 qu’entrait en ondes la première émission de Sameplaît animée par Claudette Gravel. «À ce moment-là j’avais une réalisatrice pour le samedi, Simone Fadel, et un réalisateur pour le dimanche, Gabriel Dubé. Je faisais une grande partie du choix musical et la recherche pour les interviews». Parmi les plus mémorables: Nana Mouskouri et Gérard Depardieu.

L’année suivante, Claudette Gravel a suggéré la tenue d’un radiothon afin d’amasser des fonds pour offrir des paniers de Noël aux plus démunis. «Pendant 9 heures, ce samedi de décembre, nous avions récolté près de 30 000 $». Le radiothon des paniers de Noël, qu’elle a animé plusieurs fois, est devenu une tradition à Radio-Canada. C’est le Centre francophone de Toronto qui en est aujourd’hui le maître d’oeuvre.

Claudette Gravel a aussi présenté plusieurs Fêtes de la St-Jean, organisées à Toronto par Radio-Canada au début (Francofête a pris le relais): Claude Dubois, Jean-Pierre Ferland, Gilles Vigneault, Diane Dufresne. Plusieurs festivals de musique du monde aussi: Sunfest à London, Afrofest et Bana y’Afrique à Toronto. Quelques grands spectacles: Khaled au Massey Hall ou encore des artistes du Festival de jazz de Toronto. «J’ai aussi présenté la messe du Pape Jean-Paul II, en direct à la radio de Radio-Canada, lors de sa visite en juillet 2002 lors des Journées mondiales de la jeunesse.»

À partir de septembre, la nouvelle émission du samedi à CJBC sera animée de 7h à 9h de Toronto, puis de 9h à 11h de Sudbury, pour toute la province. On connaîtra les détails de la nouvelle programmation à la rentrée.

Claudette Gravel aime Toronto, ses espaces verts et surtout son lac en face duquel elle voudrait trouver son prochain logement. De ses années à Radio-Canada, elle garde surtout le souvenir de «collègues généreux et ouverts, bourreaux de travail qui adorent leur métier» et qui font de CJBC une radio au diapason de sa communauté.
   
Ses «temps libres» sont déjà passablement occupés à classer ses innombrables photos de voyage, à continuer de rester au fait de la vie culturelle, à peindre et à écrire («un conte pour enfants»). Claudette Gravel est l’auteure d’un recueil de nouvelles, Fruits de la passion, publié en 2002, grâce, dit-elle, aux bons conseils de son amie l’écrivaine torontoise Marguerite Andersen, avec qui elle avait suivi un atelier d’écriture.

Claudette Gravel prépare une exposition-rétrospective de ses toiles et de ses photos à la galerie Céline Allard du Centre francophone de Toronto pour l’automne.

«J’ai été très heureuse pendant ces 17 années à l’antenne de Radio-Canada», conclut-elle. «Je suis reconnaissante à mon public qui m’est resté fidèle, et à Radio-Canada d’avoir permis que je puisse vivre ma passion: présenter de la musique que j’adore, parler à des personnes si chaleureuses et qui ont tant de talent.»

«J’ai rarement eu l’impression de travailler», ajoute-t-elle. «On m’avait dit, quand j’ai passé mon audition à l’école Promédia de Montréal, que j’étais trop vieille pour penser faire carrière en radio. J’avais 45 ans, mais mon intuition me disait de foncer. C’est ce que j’ai fait et voilà que j’ai été engagée quelques mois après avoir terminé mon cours et me suis retrouvée ici, dans la plus grande ville multiculturelle du Canada! Ce qui prouve qu’il faut suivre ses rêves et ses passions».