J’ai eu à prendre le train pour Montréal, récemment, où j’étais assis à côté d’un juif orthodoxe à l’attirail complet, peut-être un rabbin. Pendant la plus grande partie du trajet, il lisait ses livres de prières, tandis que j’alternais entre la lecture d’H.L. Mencken, un éditorialiste iconoclaste des années 1920-30, et du poker en ligne sur mon iPad.
Dans mon wagon, il y avait aussi deux musulmans barbus en pyjamas et un Indien enturbanné (sikh? hindou?). Pas de femmes en sari ou au visage voilé, mais plusieurs jeunes vêtus pour la plage et d’autres pour un concert «heavy fucking metal» (c’est ce qu’on lisait en très gros dans le dos d’une camisole). Pas d’autres minorités bizarres. Même pas deux gars se tenant par la main. Juste d’autres personnes «normales» comme moi…
Cet épisode, absolument pas original ni mémorable, m’est quand même revenu en tête à l’annonce, la semaine dernière, d’un projet de «Charte des valeurs québécoises» qui sera présenté en septembre par le gouvernement minoritaire de Pauline Marois, et qui fait déjà beaucoup jaser.
Grâce à un scoop ou à une fuite délibérée au Journal de Montréal et au Journal de Québec de Quebecor (plus nationalistes que La Presse et Le Soleil de Power Corporation), on sait que cette Charte prônera la neutralité de l’État et de ses employés en matière religieuse.
Cela reviendrait, comme en France, à interdire les symboles religieux «ostentatoires» dans les bureaux et les institutions gouvernementales, y compris les écoles et les hôpitaux: pas de kippa juive, de turban sikh ou hindou, ou de foulard musulman, encore moins de niqab ou de tchador (rarissimes dans nos rues, probablement inexistants dans la fonction publique).