La coalition libérale-néo-démocrate-bloquiste qui a failli renverser le gouvernement conservateur en décembre dernier a plutôt précipité le remplacement de Stéphane Dion par Michael Ignatieff à la tête du Parti libéral. Les Canadiens ne sont pas habitués aux coalitions gouvernementales. C’est une tradition européenne, propre aux démocraties qui ont adopté la proportionnelle plutôt que le système électoral britannique. On ne sait pas ce que ça mange en hiver, qui en est le vrai chef, si ça va durer plus qu’une saison…
Les Conservateurs faisaient donc valoir qu’il était dangereux d’ajouter aux difficultés économiques une telle instabilité politique, qui est pourtant le lot de n’importe quel gouvernement minoritaire. C’est aussi l’argument de la majorité de Canadiens qui, selon certains sondages, ne voudraient pas d’élections générales cet l’automne, un an seulement après avoir réélu Stephen Harper, alors qu’on n’est pas encore sorti de la récession.
C’est trop d’honneur et d’importance accordées aux politiciens face aux événements économiques, bien que leur capacité de nuire est souvent sous-estimée. Gouverné par la coalition de l’opposition avec Ignatieff, le gouvernement fédéral auraient encouru en 2008-2009 le même déficit de 50 ou 60 milliards $ qu’ont accepté les Conservateurs minoritaires. Les mêmes emplois auraient été perdus. La reprise serait tout aussi anémique.
Dans leur offensive contre la coalition, qui deviendra au cours de la prochaine campagne électorale un appel à l’élection d’un gouvernement majoritaire, les Conservateurs ne jouent pas seulement la carte économique. Leur as de coeur au Canada anglais, qui est un deux de pique au Québec, c’est la présence du Bloc québécois en appui à la coalition libérale-néo-démocrate. La coalition «libérale-socialiste-séparatiste» comme l’appelle Harper.
Ce sont des gros mots qui résonnent chez les Canadiens-Anglais. Ils ne sont pas faux ni même exagérés, mais ils n’impressionnent personne chez nous, francophones. La séparation ou l’indépendance ou la souveraineté (c’est la même chose), c’est une option légitime pour les Québécois, surtout en regard du peu d’entousiasme pour leur langue et leur culture dans le reste du Canada. Jusqu’à maintenant les Québécois ont voté contre, mais en démocratie on a le droit de rester fidèle à ses idées et de continuer de les promouvoir.