Bons débats des chefs, mardi et mercredi

Partagez
Tweetez
Envoyez

Publié 06/04/2011 par François Bergeron

Savez-vous déjà pour qui vous allez voter le 2 mai, ou attendez-vous les débats des chefs, en anglais le 12 avril et en français le 13 (devancé d’une journée en raison du début des séries éliminatoires du hockey jeudi soir!) pour en avoir une meilleure idée?

Je comprends que le respect de la démocratie exige, au minimum, un débat entre les chefs des quatre partis représentés au Parlement. Mais c’est un duel Stephen Harper / Michael Ignatieff qui serait réellement instructif.

Le premier ministre doit s’expliquer sur divers manquements à l’éthique dans son équipe ces derniers temps; sur son obsession pour la loi et l’ordre et les prisons et les G20 à 1 milliard $ et les armes à feu; sur son refus d’instituer une fois pour toutes le bilinguisme comme condition d’embauche à la Cour suprême; sur ses choix en matière d’environnement et d’énergie; et sur sa politique économique en général, largement imposée par l’opposition… alors c’est quoi le problème avec une coalition?

Le chef libéral, lui, doit nous dire comment il financera son «plan familial» d’aide aux étudiants, aux garderies, aux retraités, aux aidants naturels sans hausser les impôts tout en continuant de réduire le déficit; comment il favorisera la création d’emplois en surtaxant les industries ou les «riches»; comment, sans avions de combat, le Canada maintiendrait une défense crédible ou une capacité d’intervention comme celle pour laquelle il a voté dans le cas de la Libye.

En se faisant le champion de la «classe moyenne» et des «petites entreprises», plutôt que du prolétariat (disparu) et des syndicats (anachroniques), Jack Layton a essentiellement rejoint le Parti libéral. Le NPD a-t-il encore une raison d’être? Plutôt que de discuter de «coalition» avec les Libéraux, ne devrait-il pas carrément envisager une «fusion» pour cesser de diviser la «gauche» canadienne, comme on l’a fait à «droite» en 2003 en créant le Parti conservateur?

Publicité

Par grandeur d’âme, on aurait également pu inclure dans les débats la chef du Parti vert Elizabeth May, dont les candidats ont obtenu presque autant de suffrages à travers le pays que ceux du Bloc québécois au Québec en 2008, sans cependant réussir à faire élire un seul député.

Mme May s’exprime très difficilement en français, tandis qu’aucun anglophone ne votera pour Gilles Duceppe. On pourrait donc imaginer exclure Mme May du débat français et M. Duceppe du débat anglais.

Mais ce serait maquiller une réalité à laquelle les citoyens doivent être exposés: la moitié des Québécois se désintéressent du reste du Canada au point de voter depuis 20 ans pour un parti séparatiste inutile, voire nuisible, à Ottawa. Les anglos ont besoin de se faire rappeler cette réalité inconfortable, dont la principale raison tient à leur propre indifférence indécrottable envers la francophonie canadienne, dont la manifestation la plus éclatante ici est l’unilinguisme inacceptable de Mme May.

Que le Parti vert de Mme May ne s’intéresse qu’à l’environnement – et se goure complètement dans ce dossier! – est un irritant, mais ça ne suffit pas à le disqualifier. Le Bloc aussi n’est animé que par un seul objectif, la souveraineté du Québec, mais discute de tous les enjeux parce qu’il prétend être en mesure d’influencer le gouvernement.

Que les Verts présentent des candidats partout est également méritoire, mais ce n’est pas si difficile: le Parti de la loi naturelle, dissous en 2004, qui prônait la méditation transcendantale comme solution à tous les problèmes, l’a déjà fait. Le Bloc ne présente des candidats qu’au Québec, mais au moins il en fait élire (beaucoup); il a même déjà constitué l’Opposition officielle.

Publicité

À trois semaines seulement du scrutin, on ne sent pas de «fièvre» électorale au pays. D’abord, une majorité de Canadiens ne voulaient pas de ces élections, selon certains sondages. Ensuite, la plupart des observateurs pensent qu’elles ne changeront pas grand-chose, que les Conservateurs feront élire le plus grand nombre de candidats mais pas la majorité… Enfin, cela laisserait présager un taux de participation anémique, les jeunes, notamment, décrochant en masse.

Foutaises: les Canadiens ne veulent jamais d’élections, mais comprennent que l’alternative (pas d’élections ou des élections truquées comme dans trop de pays) est bien pire. La dynamique qui règnera au prochain Parlement, même si le résultat du scrutin ressemble fort au dernier, risque d’être très différente: une coalition de l’opposition (que les Libéraux ont été stupides de rejeter au début de 2009) serait parfaitement envisageable, fonctionnelle et démocratique. Par ailleurs, une majorité de sièges est tout à fait à la portée des Conservateurs, dont le chef est moins inflexible et obtus qu’il en a l’air, comme on le découvrira peut-être dans les débats.

Et que des jeunes ou d’autres citoyens ne comprennent pas tous les enjeux politiques est sans doute triste, mais qu’ils s’abstiennent de voter n’est pas une calamité. On s’en porterait probablement mieux si seuls les gens bien informés votaient…

Le coût véritable de ces élections n’est pas ce 300 millions $ mentionné ici et là sur un ton scandalisé, mais bien les dizaines de milliards $ en promesses irresponsables. Ces nouvelles dépenses retarderont le régime minceur qu’il est nécessaire d’imposer à nos administrations publiques, afin de sortir du cercle vicieux d’endettement et de récessions qui caractérise jusqu’à maintenant ce début de 21e siècle.

Auteur

  • François Bergeron

    Rédacteur en chef de l-express.ca. Plus de 40 ans d'expérience en journalisme et en édition de médias papier et web, en français et en anglais. Formation en sciences-politiques. Intéressé à toute l'actualité et aux grands enjeux modernes.

Partagez
Tweetez
Envoyez
Publicité

Pour la meilleur expérience sur ce site, veuillez activer Javascript dans votre navigateur