Bilinguisme obligatoire des agents du Parlement: le NPD en fait un projet de loi

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Publié 08/05/2012 par François Bergeron

La Fédération des communautés francophones et acadienne (FCFA) du Canada a accueilli «très favorablement» le projet de loi sur les compétences linguistiques présenté la semaine dernière par le député d’Acadie-Bathurst, Yvon Godin. Ce projet de loi vise à rendre la maîtrise des deux langues officielles obligatoire pour dix postes d’agents du Parlement, dont ceux de vérificateur général, directeur général des élections, président de la Commission de la fonction publique et… commissaire aux langues officielles.

«Dans un pays qui a deux langues officielles, l’obligation de bilinguisme ne revient pas au citoyen, mais bien aux agents du Parlement», rappelle la FCFA. «Prenons l’exemple du vérificateur général du Canada: même s’il possède de toute évidence de grandes compétences, il lui en manque une de taille et à cause de cela, les francophones ne disposent pas d’un accès direct à lui», souligne la présidente Marie-France Kenny.

La nomination de l’unilingue Michael Ferguson, en remplacement de la bilingue Sheila Fraser, l’an dernier, avait soulevé un tollé de protestations – et pas seulement contre le gouvernement conservateur: les députés libéraux et néo-démocrates membres du comité qui avait approuvé la courte liste de candidats, y avaient laissé le nom de M. Ferguson.

«C’est eux qui l’ont laissé passer, ce vérificateur-là, ils ont sûrement dormi au gaz pendant un petit bout», avait critiqué la députée Maria Mourani du Bloc québécois, qui a un compte à régler avec le NPD depuis la vague orange qui a balayé le Québec le 2 mai 2011.

Tout en saluant le fait que le vérificateur général suit actuellement des cours de français, Mme Kenny rappelle que cette formation signifie des investissements de temps et d’argent. Elle trouve également dommage qu’on doive formaliser par un projet de loi «ce qui, plus de 40 ans après l’adoption de la Loi sur les langues officielles, devrait aller de soi».

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Yvon Godin

Le député d’Acadie-Bathurst a admis qu’il y avait peu de chance que son projet de loi obtienne l’aval du gouvernement conservateur majoritaire, mais il a assuré qu’il n’avait pas l’intention de baisser les bras dans ce dossier pour autant.

«C’est comme un jardin», a-t-il imagé. «On met la graine pour semer un printemps, et puis s’il ne pousse pas, on en remet une autre l’année d’après. Je peux vous dire qu’aussi longtemps que je serai ici, je continuerai.»


M. Godin avait piloté un projet de loi mandatant la nomination de juges bilingues à la Cour suprême. La majorité libérale-néo-démocrate-bloquiste à la Chambre des Communes l’avait adopté, mais le projet a été retiré de l’agenda du Sénat en raison du déclenchement des élections fédérales l’an dernier.

Graham Fraser

Par ailleurs, Graham Fraser, le commissaire aux langues officielles, dénonçait récemment dans un rapport spécial la nomination de Michael Ferguson au poste de vérificateur général. Le gouvernement de Stephen Harper a violé la loi sur les langues officielles en allant de l’avant avec une telle nomination, indique M. Fraser.



Dans son rapport préparé pour répondre aux plaintes à l’égard de l’unilinguisme de M. Ferguson, Graham Fraser a insisté abondamment sur le fait que la maîtrise des deux langues est nécessaire pour que le vérificateur général puisse bien faire son travail.



«Au quotidien, le vérificateur général doit être en mesure de prendre connaissance et d’approuver des documents préparés à son attention et contenant des informations de nature complexe: rapports, notes de synthèse, avis et autres correspondances», a écrit le commissaire.



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«En outre, une telle exigence linguistique devrait faire partie des compétences de leadership qui sont généralement associées aux responsabilités qui incombent aux titulaires de postes de premier dirigeant des institutions fédérales, car elle leur permet de communiquer clairement avec tous leurs employés», souligne M. Fraser.

James Moore

«Le gouvernement conservateur compte-t-il recommencer le processus et, cette fois, respecter la loi?» a demandé en Chambre le critique libéral Mauril Bélanger.

Selon le député franco-ontarien, les Conservateurs ont «trahi les francophones» et «enfreint la loi» en embauchant un vérificateur général unilingue.

«M. Harper doit comprendre que le respect de la dualité linguistique au Canada ne se résume pas à commencer ses discours en français, et que les millions de francophones au pays méritent qu’on leur démontre du respect, et ce, dans tous les aspects de leur démocratie», affirme-t-il.

Le ministre du Patrimoine canadien et des Langues officielles, James Moore, n’a pas répondu directement à sa question.

«Je suis certain que l’opposition est satisfaite de la qualité du travail du vérificateur général jusqu’à maintenant», a opiné M. Moore, en faisant allusion au récent rapport dévastateur de M. Ferguson sur les projets d’acquisition d’avions de combat F-35 par le gouvernement.

Auteur

  • François Bergeron

    Rédacteur en chef de l-express.ca. Plus de 40 ans d'expérience en journalisme et en édition de médias papier et web, en français et en anglais. Formation en sciences-politiques. Intéressé à toute l'actualité et aux grands enjeux modernes.

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