Bilinguisme: ça manque de leadership… fédéral

Rapport du commissaire aux langues officielles

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Publié 02/06/2009 par Guillaume Garcia

La loi sur les langues officielles fête cette année son 40e anniversaire et le temps est venu de faire les comptes. Graham Fraser, commissaire aux langues officielles profite de l’occasion pour évaluer le chemin parcouru et celui qui reste à faire pour atteindre les objectifs établis il y a 40 ans. La fédération des communautés francophones et acadiennes fait un constat amer, la dualité linguistique canadienne fait du sur-place.

«D’un rapport à l’autre ce sont des mots comme stagnation, plafonnement et minimaliste qui reviennent», regrette Lise Routhier-Boudreau, présidente de la FCFA, à la lecture du troisième rapport de Graham Fraser.

Dans son rapport, le commissaire aux langues officielles commence par une touche d’optimisme en déclarant que les six personnes qui se sont succédées à la barre du Commissariat ont toutes contribué aux renforcement de la place du français et de l’anglais dans les institutions fédérales et dans la société canadienne. Mais dès le deuxième chapitre du rapport, il revient à la réalité de la situation et regrette une stagnation dans le domaine de la dualité linguistique depuis les années 90. Pire, l’étude d’un échantillon d’employeurs ayant rempli un bulletin de rendement cette année montre une détérioration de l’offre active en matière de services à la personne.

Un manque de leadership

Le commissaire insiste sur le fait que «les changements récents réalisés par le gouvernement fédéral ont eu pour effet d’affaiblir la structure de gouvernance des langues officielles». Le gouvernement actuel, à travers sa feuille de route pour la dualité linguistique 2008-2013 agir pour l’avenir, est vivement critiqué pour la coquille vide que représente ce programme, qui ne propose aucune garantie de fonds pour accroître la prise en compte des langues officielles dans les institutions fédérales. «Je ne peux m’empêcher de remarquer l’absence d’objectifs précis rattachés à la feuille de route, sur lesquels le gouvernement pourrait rendre des comptes. Si les investissements dans divers programmes sont certainement les bienvenus, le gouvernement gagnerait à énoncer un vision cohérente de ce qu’il compte accomplir», analyse le commissaire aux langues officielles. Le gouvernement en rend pour son grade sur ce sujet précis. Les financements ne sont pas là et les communautés attendent toujours les détails de la mise en oeuvre de ce plan.

Graham Fraser indique que dans la conjoncture actuelle «seul le leadership du gouvernement fédéral et un partenariat accru avec les autres ordres du gouvernement permettront d’éviter que la crise économique n’érode les gains des communautés de langue officielle, difficilement acquis au fil des ans».

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Lise Routhier-Boudreau de la FCFA montre quant à elle que l’absence d’adéquation réelle entre les discours et les mesures prises est un problème récurrent. «On a souvent l’impression que la mise en oeuvre de la Loi sur les langues officielles c’est surtout une série de demi-mesures et de compromis qui cherchent à ménager la chèvre et le chou», déclare-t-elle. La FCFA attend avec impatience un leadership musclé du gouvernement dans le dossier des langues officielles. «De notre point de vue, après 40 ans, le délai de mise en oeuvre a assez duré.»

Tirer profit du bilinguisme

Le gouvernement doit jouer un rôle clé dans la promotion et l’amélioration de la situation pour ce qui est des langues officielles, par exemple, comme le note Graham Fraser, en donnant «à plus d’élèves la possibilité d’apprendre efficacement l’autre langue officielle», en offrant plus de cours de langue seconde au niveau post-secondaire et en favorisant les échanges linguistiques. Il rappelle qu’il «s’agit d’un investissement important dans l’avenir de notre pays qui permet aux jeunes canadiens d’acquérir des compétences qui leur serviront sur les plans professionnel, personnel et culturel».

Aujourd’hui, selon des chiffres fournis en marge du rapport, 70 % des canadiens seraient d’accord avec le bilinguisme pour le pays tout entier ou pour leur province. Chez les jeunes, 18-34 ans, l’appui au bilinguisme canadien atteint 80 %. Mais la santé du régime linguistique canadien est raccroché à la volonté du gouvernement fédéral et un affaiblissement de sa part dans ce domaine conduit inéluctablement à la résurgence des problèmes.

Vancouver 2010

L’an prochain, le Canada accueillera les Jeux Olympiques d’hiver et cette échéance agit comme un révélateur des lacunes du Canada dans le respect du bilinguisme officiel et de la mise en oeuvre de politique d’offre active des acteurs des JO. Tous les yeux seront rivés vers le Canada et Graham Fraser s’est dit inquiet de la capacité du Comité organisateur et des nombreuses institutions fédérales participantes à respecter leurs engagements à l’égard des services de communications en anglais et français. L’affluence de milliers de visiteurs accroîtra la demande en services bilingues et le commissaire souligne, à titre d’exemple qu’il est encore difficile d’obtenir des services dans la langue de son choix dans les aéroports du pays, à l’exception de celui de Montréal.

À quelques mois des Jeux olympiques de Vancouver, l’aéroport de la ville hôte des prochains Jeux a d’ailleurs obtenu le pire résultat du rapport, se classant derrière ceux de Toronto, d’Halifax, d’Ottawa et de Montréal. «Je crois que c’est assez lamentable. (…) L’une des raisons pour lesquelles nous avons mené cette vérification horizontale sur les services offerts dans les aéroports, c’était en prévision des Jeux olympiques. Et la moitié des voyageurs étrangers qui vont aller à Vancouver, vont passer par Toronto. Je pense que c’était un rappel nécessaire aux autorités aéroportuaires à l’effet qu’il y a des grands écarts entre ce qu’ils font actuellement et ce qui sera nécessaire pour faire en sorte que les étrangers – que ce soit les athlètes, leurs familles ou des voyageurs – auront les services auxquels ils ont droit», a soutenu M. Fraser, en conférence de presse.

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En conclusion, pour l’année 2008/2009, le commissariat a rapporté avoir reçu 785 plaintes, dont 606 étaient recevables, ce qui représente une hausse de quatre pour cent par rapport à l’an dernier

Auteur

  • Guillaume Garcia

    Petit, il voulait devenir Tintin: le toupet dans le vent, les pantalons retroussés, son appareil photo en bandoulière; il ne manquait que Milou! Il est devenu journaliste, passionné de politique, de culture et de sports.

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