Arif Virani: de réfugié à député

Arif Virani, ministre de la Justice et procureur général du Canada
Arif Virani, ministre de la Justice et procureur général du Canada.
Partagez
Tweetez
Envoyez

Publié 15/12/2015 par François Bergeron

43 ans après être arrivé au Canada de Pierre Elliot-Trudeau avec sa soeur et ses parents réfugiés fuyant les persécutions en Ouganda, Arif Virani a fait son entrée ce mois-ci au Parlement en tant que nouvel élu de l’équipe libérale de Justin Trudeau pour Parkdale High Park.

Cet avocat musulman polyglotte, qui s’intéresse particulièrement au dossier actuel des 25 000 réfugiés syriens que le Canada veut accueillir d’ici la fin de l’hiver, était invité à raconter son histoire à la tribune du Club canadien de Toronto le 15 décembre.

Fait rare, plusieurs personnes faisaient la queue, à la fin du déjeuner-causerie mensuel à l’hôtel Royal Rork, pour s’entretenir avec le conférencier.

C’était la première fois, en 1972, quand le dictateur Idi Amin a donné 90 jours aux Ougandais d’origine asiatique pour quitter le pays, que le Canada acceptait d’accueillir une telle vague de 7000 réfugiés non européens. En 1968, il y avait eu les Tchécoslovaques et en 1956 les Hongrois, tous deux envahis par les Russes. «Comme pour les Syriens aujourd’hui, le Canada avait répondu à l’appel», dit-il fièrement.

Bébé de moins d’un an avec une soeur de 4 ans et des parents dans la vingtaine, Arif Virani a atterri à Montréal, mais la famille a déménagé à Toronto deux ans plus tard. Le jeune Arif a toutefois étudié à l’université McGill avant de compléter sa formation à l’Université de Toronto. Il est retourné plusieurs fois travailler à Montréal et a même passé six semaines en immersion française à Trois-Rivières.

Il a notamment oeuvré pour des ONG en Inde et pour le tribunal de l’ONU jugeant les crimes commis en 1994 au Rwanda.

Publicité

Outre les deux langues officielles du Canada, il parle son gujarati maternel et l’hindi de son épouse, en plus du swahili en usage en Ouganda et dans l’Est de l’Afrique. Chiite ismaélien disciple de l’Aga Khan, il a rencontré son lot de préjugés aux portes de Parkdale High Park – des commentaires comme «je ne vote pas pour un musulman» ou «je ne vote pas pour quelqu’un qui n’est pas né au Canada» – mais il a remporté son élection contre Peggy Nash, qui était pourtant un pilier du NPD.

Il s’est indigné de quelques incidents xénophobes survenus dans le sillage des attentats meurtriers de Paris le 13 novembre dernier: un incendie criminel dans une mosquée à Peterborough, des Indiens attaqués à Kitchener, une femme portant le hijab bousculée à Toronto, et même une femme tout ce qu’il y a de plus «blanche» insultée parce qu’elle portait sur la tête un foulard qui n’avait rien de religieux.

«Nous sommes tous victimes de ces actes d’intolérance… qui ne sont pas représentatifs de la société canadienne»: des églises et synagogues ont ouvert leurs portes aux fidèles de la mosquée incendiée et les Canadiens se sont mobilisés pour accueillir les réfugiés syriens. «Ces réactions canadiennes suscitent la stupéfaction dans le monde. Tous veulent savoir comment les cultures occidentales, africaines et asiatiques réussissent à vivre en paix au Canada.»

En réponse à une des questions de la salle, Arif Virani estime qu’il est peut-être plus difficile d’accepter l’immigration de peuples venant de loin dans les pays qui ont une longue histoire et des traditions millénaires. «Le Canada, au contraire, est encore un pays jeune, plus souple.»

Auteur

  • François Bergeron

    Rédacteur en chef de l-express.ca. Plus de 40 ans d'expérience en journalisme et en édition de médias papier et web, en français et en anglais. Formation en sciences-politiques. Intéressé à toute l'actualité et aux grands enjeux modernes.

Partagez
Tweetez
Envoyez
Publicité

Pour la meilleur expérience sur ce site, veuillez activer Javascript dans votre navigateur