Rencontres intimes avec des plumes d’ici et d’ailleurs

Vendredi 2 décembre, en soirée, trois merveilleux auteurs immigrants, originaires de Tunisie, Shanghai et de France, ont échangé au Salon du livre de Toronto à propos de leurs plus récents ouvrages: Monia Mazigh (Miroirs et mirages), Ying Chen (Espèces), Marc Levy (L’étrange voyage de Monsieur Daldry). Le Salon du livre avait lieu du 30 novembre au 3 décembre à la Bibliothèque de référence de Toronto.


Culture et religion


«Une ombre qui voulait se cacher et fuir le jugement des adultes et le martèlement du regret»: une phrase tirée du dernier roman de Monia Mazign, Miroirs et mirages, mettant en scène quatre femmes immigrantes venues d’Afrique du Nord, du Moyen-Orient et d’Asie avec leur culture, leurs espoirs, leurs différences et surtout leur religion musulmane.


Leurs destinées s’entrecroisent, soulignant les multiples facettes de l’immigrante musulmane. Sous la plume expérimentée de Monia Mazigh, la musulmane au-delà du voile ou du niqab, devient un être humain digne et sensible, doué d’une grande profondeur.


Au cours de son entrevue avec Éric Robitaille face au public, dans l’atrium de la Bibliothèque de référence vendredi soir, l’auteure a réitéré l’importance de ne pas sous-estimer les défis du choc culturel vécus entre les nouveaux arrivants et les membres de la société d’accueil, «sur lesquels il faut travailler».


Miroirs et mirages: portes ouvertes à la réflexion sur le lien entre la culture et la religion, les rôles homme-femme; leur impact socio-politique et leur portée sur l’inclusion des nouveaux immigrants au Canada.


Femme chatte


«Vivre ici est possible grâce à la diminution considérable de mon champ de vision et de ma taille, qui empêchent la perception des détails désagréables de la race de mon maître».


Un extrait du dernier ouvrage de Ying Chen, Espèces, où l’auteure se met dans la peau d’une femme devenue chatte. On retrouve la superbe plume de Chen caractérisée d’une grande simplicité pour dire les choses telles qu’elles sont, tel que l’auteure le ressent. Les mots à la fine pointe de la vérité!


Sophie Perceval animait la conversation avec cette magnifique auteure sino-canadienne dont la plume délicate révèle un irréversible instinct pour capter les plus étranges sentiments que peuvent éprouver les humains.


Espèces pourrait tendre, entre autres, à remettre en question quelques-unes de nos valeurs occidentales selon lesquelles certains animaux domestiqués semblent jouir de meilleures conditions de vie que certains humains sur cette terre.


Deux vies en toi


«Il y a deux vies en toi, Alice. Celle que tu connais et une autre, celle qui t’attend depuis toujours», écrit par Marc Levy, dans son dernier livre L’étrange voyage de Monsieur Daldry.


Établi à New York, Marc Levy, est l’auteur français le plus apprécié dans le monde: «Pour écrire il faut d’abord être capable d’observer et d’écouter l’autre, de voyager à travers autrui», a commenté Levy lors de son entretien avec Sylvie-Anne Jeanson vendredi.


Monsieur Daldry, célibataire endurci, aux motivations ambiguës, voisin de palier d’Alice, la persuade de prendre au sérieux la prédiction d’une voyante: retrouver les six personnes qui la mèneront vers son destin; de Londres à Istanbul, Daldry décide d’accompagner Alice dans un étrange voyage.


Un bijou d’écriture tout en effets de style et fioritures, L’étrange voyage de Monsieur Daldry pourrait servir d’interprète aux côtés ombre (vie intérieure) et lumière (vie publique) faisant partie de la mystérieuse existence de tout être humain.


À travers les périples d’Alice et de son étrange compagnon, force est de constater qu’on retrace certaines passions de Levy: son indéniable attrait pour la diversité culturelle; son appétit vorace de quête identitaire; la grande beauté d’endroits de rêve qu’il affectionne particulièrement, dont la Turquie.


S’ancrer dans l’écriture


À l’occasion du 25e anniversaire du Prix Trillium, plusieurs anciens lauréats ont été invités à témoigner de leur évolution comme auteur, jeudi 1er décembre, au Café des littéraires.


C’est ainsi que le public a pu rencontrer, dans une ambiance intimiste, quelques-uns des récipiendaires du prestigieux prix, dont Andrée Lacelle, Antonio d’Alfonso, Marguerite Andersen, Estelle Beauchamp, Éric Charlebois, Didier Leclair, Paul Savoie.


«Le Prix Trillium permet aux auteurs de s’ancrer dans l’écriture, de s’accrocher à leur destinée d’écrivain malgré les hauts et les bas de la vie de littéraire», a résumé Éric Charlebois.


Plusieurs autres auteurs de la relève et d’expérience ont été conviés à lire des extraits de leurs œuvres dont Aurélie Resch, Michèle Vinet, Cécile Cloutier, Joëlle Roy, Michel Côté, Claude Tatilon, Aristote Kavungu, Roger Léveillé, Jean Morisset.


Au cours de la soirée, l’auteur et chroniqueur Paul-François Sylvestre a proposé un jeu-questionnaire littéraire. M. Sylvestre vient de publier un recueil de nouvelles intitulé Frousse à Santo Domingo (à lire en page 7).


Promotion des livres


Jeudi 1er décembre, le Salon avait également convié les bibliothécaires et enseignants des conseils scolaires francophones et d’écoles d’immersion de conseils anglophones du Grand Toronto à rencontrer les artisans du livre jeunesse.


Autour d’un coquetel, les participants ont pu échanger avec Hélène Dehaut, conseillère pédagogique en littérature jeunesse et scolaire, Messageries ADP et Guillaume Sabino, conseiller pédagogique, Le Robert, Messageries ADP, ainsi qu’avec le GroupeMédia TFO, un trésor de ressources pédagogiques.


Rappelons que les bibliothécaires scolaires représentent la porte d’entrée à la littérature jeunesse dans nos écoles. 2000 jeunes ont visité le 19e Salon du livre; un nombre record.