Il y a trois ans nous arrivait Oranges amères, un album qui nous révélait un Enrico Macias prenant le parti du ressourcement dans une enfance algérienne (à Constantine, pour être plus précis), dans ce carrefour arabo-andalou – et juif sépharade, dans son cas – qui l’avait vu naître et qui avait nourri sa passion de la musique.
Sans renier le public fidèle au gentil chanteur de variété que l’on connaît, cet album, dont se dégageait un sentiment d’urgence tempéré par une langueur bien méditerranéenne, marquait néanmoins un virage important, tant sur le fond que la forme. Avec La vie populaire (Universal Special Imports), Macias consolide ses nouveaux acquis et sa nouvelle crédibilité auprès du public et de la critique.
Malgré d’occasionnels dérapages vers les sentiments un brin mielleux (incarnés par un fâcheux choeur d’enfants), il déploie une palette instrumentale plus dépouillée et renoue avec l’urgence de témoigner des défis et des déchirures de cette région qu’il a dû fuir il y a tant d’années, mais qui ne l’a jamais quitté.
Et comme pour faire contrepoids à l’occasionnelle gravité du propos («Demain sera beau ou ne sera pas»), Macias se fait un devoir de rappeler que la vie est aussi faite de petits bonheurs qui se conjuguent au quotidien («J’aime la simplicité/des journées d’été/Les petits moments superbes/Déjeuner sur l’herbe»), puisque c’est cette Vie populaire qui alimente depuis le début son âme et sa musique.
Dans le jardin de Lo’Jo
«J’habite à côté du paradis un palais imparfait/Qui donne sur la guerre/J’ai un jardin qui donne sur l’envers du monde/J’y ai planté mes riddims créoles/Des arômes polyrythmiques/Des petites fleurs pentatoniques.»