Des parents réagissent au partage du West Toronto Collegiate

«Nous sommes pris en otage»

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Publié 14/06/2011 par Annik Chalifour

Suite à l’acceptation de la proposition de la ministre de l’Éducation par nos deux conseils scolaires public (Viamonde) et catholique (CSDCCS) de partager le West Toronto Collegiate du Conseil public anglophone (TDSB), afin de répondre à leur besoin criant de nouvelles écoles secondaires au centre-ville, L’Express a recueilli les commentaires de quelques membres de conseils des parents d’écoles au public et au catholique.

«Je suis scandalisé par la proposition de la ministre. Le West Toronto Collegiate n’est-il pas un bâtiment public financé à partir des taxes de tous les contribuables tant francophones qu’anglophones? Pourquoi devrions-nous racheter un bâtiment déjà payé?», pose Jérôme Atangana, père de deux élèves inscrits au campus Brockton du Collège français et président du conseil des parents de cette école secondaire publique.

«Pourquoi le ministère laisse-t-il le TDSB gérer ce bâtiment à sa guise, au détriment des francophones, tandis que du côté anglophone on baigne dans l’abondance? Le TDSB dispose actuellement de 107 propriétés non utilisées», dit-il.

«Le TDSB n’a pas besoin de ce bâtiment. Pourquoi ne peut-il pas le céder entièrement aux francophones dont les effectifs explosent au centre-ville et continuent de croître rapidement».

«On paye nos taxes comme les anglophones. Pourquoi n’avons-nous pas les mêmes droits d’accéder à des services d’éducation de qualité? Nous avons besoin de beaucoup plus d’écoles françaises à Toronto, non pas seulement dans l’Ouest de la ville, mais aussi au Centre, et dans l’Est», souligne M. Atangana.

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10 écoles de plus?

On reconnaît que plusieurs initiatives et programmes de subventions ont été déployés pour répondre aux besoins des francophones en Ontario, surtout depuis la création des conseils scolaires de langue française en 1998.

Cependant malgré ces entreprises et ces investissements, l’éducation en langue française en Ontario connaît un rythme de croissance supérieur à l’augmentation de la population, plus particulièrement dans les régions à forte croissance démographique comme Toronto.

L’accessibilité aux programmes et services offerts en français, de la petite enfance à l’âge adulte, s’en voit donc réduite, et par le fait même, la viabilité de l’éducation de langue française en Ontario.

Selon les statistiques présentées par le sous-comité établi par le Groupe de travail permanent EDU-FCU (ministère de la Formation et des Collèges et Universités) sur le continuum de l’apprentissage de la langue française, en date du 14 octobre 2010, la communauté franco-torontoise aurait besoin d’acquérir une dizaine d’écoles supplémentaires pour satisfaire à la demande croissante de familles francophones établies et qui continueront de s’établir dans le Grand Toronto.

Proposition bidon

«Nous sommes pris en otage, on tourne en rond! Rien n’est encore acquis! On ne sait pas à quoi s’attendre! En plus, on se retrouverait à partager le bâtiment non pas entre deux conseils scolaires, mais trois: le public, les catholiques et les anglophones: 900 élèves, 50 classes», ajoute M. Atangana.

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Il fait référence ici au fait que le TDSB veut conserver un étage du West Toronto Collegiate pour l’éducation permanente. Le contrat d’acquisition et de cohabitation de l’édifice par les deux conseils scolaires francophones allouerait environ 450 places à chacun.

«Une proposition bidon pour les conseils scolaires francophones: comment peut-on assurer le développement durable de la communauté francophone en Ontario avec de telles contraintes d’espace imposées à nos écoles?»

Selon M. Atangana, «on a raté l’occasion d’établir une école française de référence à Toronto: un centre d’études de langue française ayant pu offrir, sous le même toit, tous les programmes et services en français de la garderie à la 12e année, de nombreuses activités parascolaires et culturelles de qualité, des cours de langue pour adultes».

Une première étape

«Je suis très contente de l’entente pour le West Toronto Collegiate. J’espère que cela fonctionnera bien et permettra aux deux écoles de s’associer pour offrir des activités parascolaires, qu’on ne peut habituellement pas s’offrir dans de plus petites écoles», mentionne Hélène Cyr, du conseil des parents à l’école élémentaire Gabrielle-Roy (Viamonde) et l’une des instigatrices de la mobilisation des parents ayant généré la pétition déposée devant l’Assemblée législative le 16 mai dernier.

«Quant à nous, on est dans l’Est de la ville, et tout ce que j’espère, c’est que le modèle de cohabitation public-catholique puisse aussi permettre d’ouvrir une autre école secondaire dans l’Est. Il y a beaucoup de francophones ici et on est obligé d’envoyer nos enfants au centre-ville», fait-elle remarquer.

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Selon Mme Cyr, l’ouverture du West Toronto Collegiate, prévue en septembre 2012, règle une crise qui dure depuis plusieurs années, mais il y a encore du chemin à faire pour desservir tous les ayants droit. «J’étais tout de même contente que la ministre Leona Dombrowsky parle clairement d’un premier pas dans la récente lettre qu’elle m’a envoyée pour faire un suivi de l’affaire, laissant présager d’autres étapes».

Problème non réglé dans l’Est

Anne Godbout, membre du comité de parents de l’école Georges-Étienne Cartier, faisait partie du groupe de parents catholiques ayant soumis une autre pétition à l’Assemblée législative le mardi 31 mai, en vue d’obtenir une école secondaire catholique dans l’est de Toronto.

«Avant le dépôt de notre pétition la semaine dernière, nous avions demandé de rencontrer la ministre Dombrowsky. Bien que son bureau nous ait contactés le jour même du dépôt, il n’a jamais prévu de réunion avec la ministre. Depuis, nous avons reçu une lettre du ministère nous confirmant que «Minister Dombrowsky regrets that she is unable to meet with you to discuss this important issue….».

Selon Mme Godbout, «le manque d’une école française dans l’Est de la ville est tout aussi criant que celui à l’Ouest… L’attitude du ministère n’est pas très encourageante».

Un manque de volonté politique du gouvernement McGuinty à l’égard de l’éducation en français en Ontario! On attend avec anticipation le rapport spécial du commissaire aux services en français, François Boileau, sur les problèmes d’espace des écoles françaises de Toronto, promis pour la fin juin.

Auteur

  • Annik Chalifour

    Chroniqueuse et journaliste à l-express.ca depuis 2008. Plusieurs reportages réalisés en Haïti sur le tourisme solidaire en appui à l’économie locale durable. Plus de 20 ans d'œuvre humanitaire. Formation de juriste.

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