LE bar des partisans des Canadiens à Toronto

Le Kilgour, un petit coin de Centre Bell

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Publié 26/04/2011 par Guillaume Garcia

Paraîtrait que le hockey est une religion au Canada, et encore plus au Québec. Une religion a forcément ses sanctuaires, comme l’était le Forum, maintenant le Centre Bell, et comme le sont les bars sportifs, ou les bars dont le patron est un partisan inconditionnel du Tricolore et diffuse toutes les parties. À Toronto, pour des raisons encore obscures, l’équipe numéro un s’appelle les Maple Leafs. Trouver un endroit pro-Canadiens de Montréal, pour voir les rencontres de hockey, relève de la chasse au trésor. Heureusement, L’Express a toujours aimé les défis et vous a déniché le Kilgour!

Alors oui, certains vont dire que les matches du Canadien sont parfois diffusés sur CBC, en anglais, quand les Leafs ne jouent pas pendant la saison régulière et pendant les séries. Le problème, et même les anglophones partisans des Habs vous le diront, un match de hockey des Canadiens, ça se regarde en français.

Si vous avez RDS, vous pouvez toujours faire ça chez vous, entre amis, mais vous ne connaîtrez pas la ferveur irrationnelle d’un endroit bondé de partisans vibrant ensemble à chaque action. Sauf si vous connaissez LE bar des Canadiens à Toronto. On va finalement vendre la mèche, il s’appelle le Kilgour et se trouve sur Bloor, au croisement de Borden, dans l’Annex.

De l’extérieur, rien n’indique que ce soit un bar des Canadiens, sauf pendant les séries. Mais voilà, quand les séries commencent, il va falloir vous lever tôt, ou d’ailleurs finir de travailler tôt si vous voulez connaître la chance de regarder une partie dans ce coin du Centre Bell à Toronto.

Un inconditionnel

Les murs sont tapissés de babioles des Canadiens de Montréal, de fanions, de guirlandes, de bâtons. Cette masse d’objets bleus blancs rouges a été amassée par le fervent partisan des Habs, Peter Kilgour. Co-propriétaire du bar avec son frère, Peter est un inconditionnel des Canadiens. «Born and raised» à Toronto, sa passion est née de l’admiration qu’il entretenait, avec son père, pour Jean Béliveau.

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Il se rappelle sa première partie, son père l’avait emmené voir un Maple Leafs vs Canadiens, et les Canadiens avaient perdu 5 à 2, c’était en 1967. Depuis, il a vu beaucoup de parties, dont la victoire de la coupe Stanley au Forum en 1993.

Quand il ouvre son bar, il y a de ça une quinzaine d’années, Peter s’aperçoit qu’il capte le réseau américain et commence à diffuser les parties en anglais. Quand le câble arrive, il ne se pose pas la question, il met les parties sur RDS, en français, malgré le fait que beaucoup de partisans soient anglophones. Et ça marche! Depuis un peu moins de dix ans, son bar est plein à chaque Toronto-Montréal, avec 70% des gens en faveur de Montréal et surtout en série, où tout le bar prend pour le Tricolore.

«On est à court de place ici», dit Peter, à propos du taux de remplissage de son établissement. «On peut mettre 53 personnes assises et on refuse que le monde soit debout. On veut que tout le monde puisse voir. Alors en série, à 18h on refuse déjà du monde.» S’il est pro-canadiens, Peter accepte les partisans des autres équipes tant que cela reste amical.

Au moment de choisir quel objet dans son bar a le plus de valeur à ses yeux, il n’hésite pas. Son chandail, dédicacé par Jean Béliveau. Prenez garde, il ne l’a jamais lavé depuis! Heureusement, il en possède quatre autres!

Plusieurs autres objets lui tiennent à cœur, comme un bâton de Guy Lafleur signé, qu’un ami lui a donné, ou encore une photo de Maurice Richard que la nièce de celui-ci lui a offert. Allez faire un tour en journée dans le bar et vous pourrez prendre le temps d’admirer toutes ces babioles, chacune a son histoire.

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Un secret de polichinelle?

Vous êtes partisans des Canadiens, mais ne connaissez pas ce bar? Peter n’est pas surpris. «On ne fait pas de publicité, on n’a pas de site internet, avec mon frère on est ‘old school’!», s’amuse-t-il.

Mais ce soir-là de série, après deux victoires consécutives contre Boston, le Canadien s’incline par la marque de 4 à 2. Peter est déçu, mais comme il dit: «Carey Price nous a tellement sauvés, il a le droit à quelques erreurs». Beau joueur.

Parmi les spectateurs de la partie, on a retrouvé beaucoup de francophones, et de tous horizons. Timothy est anglophone du Québec. Il a déménagé à Toronto au milieu des années 80, mais continue de supporter Montréal.

«Ça fait plus de dix ans que je viens au Kilgour. Un ami m’avait dit que c’était un bar des Canadiens. C’est comme ça que j’ai rencontré Peter» dit-il, en s’excusant de son français, pourtant très bon. «Pour les séries, je viens tout le temps.» Mais aujourd’hui, il est amer, il n’est pas tendre avec le gardien. «Il n’a pas fait sa job, c’est de sa faute sur deux buts.»

Plusieurs autres francophones étaient là, tous en chandail des Canadiens, dont deux habitués Québécois, Julien et Jérôme, et un Franco-Ontarien, Pierre, pour qui c’était une première. Julien, originaire de Montréal, vient régulièrement au Kilgour, surtout en série. Il regrette un peu la petite taille du bar et donc la difficulté d’avoir de la place. Mais une fois rentré, «c’est vraiment un bar pour les Habs, avec les matches en français et une ambiance particulière». Ça lui rappelle un peu l’ambiance folle du Québec où, comme il dit: «tu n’allais pas à la messe, mais tu allais à l’aréna!»

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Pour Jérôme, de Joliette, c’est le côté unique du bar qui ressort. «C’est LE bar, tu peux retrouver l’ambiance de Montréal. Il y a le côté vrai partisan, sans aucun compromis. C’est une expérience authentique. Tu ne connais pas les gars, peu importe si c’est français ou anglais, il y a un lien irrationnel, un amour inconditionnel!»

Pierre, le dernier larron de la bande vient de Timmins. Pour sa première fois au Kilgour, il n’a pas été déçu par l’ambiance, malgré la défaite. «C’est une expérience culturelle. Moi je suis les matches sur mon iPhone, mais sortir en groupe c’est unique. Ça faisait longtemps que je me cherchais un bar pour voir les matches. Ici il y a une connexion déjà établie entre les gens.»

Dernier détail qui peut avoir son importance, il y a un nombre assez important de filles portant des chandails des Canadiens au Kilgour!

Auteur

  • Guillaume Garcia

    Petit, il voulait devenir Tintin: le toupet dans le vent, les pantalons retroussés, son appareil photo en bandoulière; il ne manquait que Milou! Il est devenu journaliste, passionné de politique, de culture et de sports.

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