Sauf pour l’emploi aux États-Unis… la récession serait déjà terminée

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Publié 25/01/2011 par François Bergeron

Ce fut bref, même pas trois ans: du milieu de 2008 à la fin de 2010. On a déjà rattrapé, à l’échelle mondiale, les niveaux pré-récession de production industrielle et d’activité commerciale. Ce qui en fait l’une des crises les plus courtes de l’histoire, selon l’économiste en chef de la Banque nationale du Canada, Stéfane Marion, qui revenait la semaine dernière à la tribune du Club canadien de Toronto présenter, à l’aide de nombreux graphiques aussi éloquents que lui, son bilan 2010 et ses perspectives économiques 2011.

«Le graphique qui tue», comme on dirait à Tout le monde en parle, est cependant celui de l’emploi aux États-Unis, qui stagne par rapport à tous les autres indices, et notamment par rapport à la masse salariale, qui a presque retrouvé elle aussi son niveau du début 2008.

Autrement dit, la même masse salariale d’il y a deux ans se retrouve entre les mains d’un plus petit nombre de travailleurs, ce qui génère d’importantes inégalités sociales. Cela confère cependant à l’économie américaine un bon potentiel de croissance économique… quand tous ces chômeurs réintégreront l’économie productive.

Économies émergentes

L’autre constat intéressant de ce début de décennie est le rattrapage que sont en train d’effectuer les pays «émergents» (Chine, Inde, Brésil, etc.) par rapport aux pays de l’OCDE.

Pour la première fois, par exemple, il se vend maintenant plus de voitures particulières en Chine qu’aux États-Unis.

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Et, ce qui est encore plus important, une classe de consommateurs se développe dans les pays émergents, si bien qu’on va commencer à s’éloigner du modèle où tout ce qui est produit dans le tiers-monde est consommé en Occident. Une part croissante de la production industrielle du tiers-monde (et de la nôtre aussi, via nos accords commerciaux) sera consommée par leurs propres citoyens.

M. Marion estime qu’on peut croire les prédictions selon lesquelles le tableau des dépenses de la classe moyenne sera plus équilibré en 2020, les Asiatiques dépensant davantage que les Européens et les Américains, ce qui serait normal compte tenu du poids démographique de l’Asie.

À l’heure actuelle, les 700 millions d’Européens dépensent un peu plus de 8 milliards $, les 300 millions d’Américains près de 6 milliards $ et les 3 à 4 milliards d’Asiatiques 5 milliards $.

Socialisation des dettes

M. Marion reconnaît que les mauvaises dettes contractées par les banques occidentales dans la crise des hypothèques américaines ont été largement épongées par les gouvernements, transférant le mal de place.

Les «dettes souveraines», c’est-à-dire celle des États (occidentaux), représentent donc aujourd’hui le problème économique le plus épineux, certains pays affichant des niveaux d’endettement public très supérieur à 100% du PIB, comparable à celui qui caractérisait la fin de la Deuxième Guerre mondiale.

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Sauf qu’il n’y a pas eu de guerre (mais n’allez pas dire ça aux Irakiens et aux Afghans…) et surtout qu’aucun «bébé-boom» ne viendra régler ce problème en stimulant une forte croissance économique.

Au contraire, à l’exception de l’Inde, des États-Unis, du Canada, du Brésil et peut-être de l’Irlande, tous les pays connaîtront d’ici 2015 une diminution de leur population des 20 à 44 ans (la population active), les champions de la baisse démographique étant l’Italie, l’Espagne, l’Allemagne, le Japon et la Grèce. Dans ces pays souvent déjà trop endettés, ce n’est pas de sitôt qu’on pourra rembourser.

Réformes essentielles

Le Canada évolue donc maintenant dans une économie mondiale en pleine mutation, pour le meilleur et pour le pire.

Il est urgent pour nous, selon M. Marion, de s’attaquer à une réforme de la santé qui permettrait de limiter la croissance de ses coûts, et à une réforme des pensions qui permettrait de conserver ce programme social.

Jusqu’à maintenant, souligne-t-il, les politiciens procrastinent, ce qui ne peut qu’aggraver la situation.

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On retient de sa présentation, toujours édifiante, que si le Canada tire bien son épingle du jeu, il n’en demeure pas moins à la merci des hauts et des bas de l’économie américaine voisine, qui est encore loin d’être complètement réhabilitée.

Auteur

  • François Bergeron

    Rédacteur en chef de l-express.ca. Plus de 40 ans d'expérience en journalisme et en édition de médias papier et web, en français et en anglais. Formation en sciences-politiques. Intéressé à toute l'actualité et aux grands enjeux modernes.

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