Renforcer la connexion entre les arts et notre société

Alexander Neef, directeur général de la Canadian Opera Company, au Club canadien

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Publié 20/12/2010 par Annik Chalifour

Alexander Neef, nommé directeur général de la Canadian Opera Company (COC) en juin 2008, est d’origine allemande. Son allocution au Club canadien de Toronto, mardi 14 décembre, était son premier discours en français. «Je dois les bases de mon français aux quatre années passées à l’Opéra de Paris de 2004-2008 et encore plus à mon épouse qui continue d’être mon meilleur professeur de français», dit-il.

Selon M. Neef, «la grande force de l’opéra réside dans l’intensité de l’émotion qui s’en dégage et qui ne se trouve pareil dans aucun autre genre d’art. Il est aussi important que cette expérience soit publique, partagée en société».

«L’intensité de l’opéra est d’abord évoquée par la musique et la force du chant, puis renforcée plus encore par les aspects dramatiques et visuels du spectacle», introduit M. Neef.

«Assembler les citoyens au théâtre, pour leur faire vivre une expérience émotionnelle ensemble et encourager une pensée critique était un point essentiel quand les Athéniens inventaient le théâtre vers 500 A.C., en même temps qu’ils établissaient les bases de leur démocratie», rappelle le conférencier.

«Pour les Grecs, la création d’art et la création d’une société représentaient les deux côtés de la même médaille: la fonction de l’art étant de donner aux citoyens des moyens pour une recherche approfondie sur la condition humaine, qui leur permettrait de mieux se comprendre et mieux vivre ensemble», poursuit M. Neef.

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Selon le directeur de la COC, «c’est pour la même raison, pour ces messages intemporels, pour la recherche sur la condition humaine effectuée par les compositeurs et librettistes, que nous donnons des opéras de Händel, Mozart et Verdi encore aujourd’hui.»

L’opéra parle de nous

«Les artistes d’aujourd’hui doivent raconter avec leurs propres moyens des histoires qui ont 100, 200, 300 ou 400 ans à un public d’aujourd’hui», réitère M. Neef. Pour le conférencier, parce que les œuvres sont inséparables de leur interprétation, l’opéra reste un art contemporain.

«Le fait que notre public s’intéresse aux œuvres de toute époque montre que nous sommes capables d’interpréter des œuvres anciennes pour un public d’aujourd’hui avec des références sociales et culturelles complètement différentes de celles du public à l’époque de la création de l’œuvre», déclare-t-il.

«Comment montrer que ces pièces ne sont pas des pièces de musée, mais des pièces qui parlent de nous, figurent parmi les principales questions que nous nous posons quand nous programmons un opéra. Je crois que nous n’avons pas un seul public, mais autant de public qu’il y a de places dans la salle, un peu plus que deux milles», ajoute M. Neef.

Selon le directeur de la COC, si la Compagnie peut inspirer chaque membre du public à former sa propre opinion de ce qu’elle propose sur scène; l’inspirer à essayer de comprendre plutôt qu’attendre un produit tout fait qui ne laisse pas de place pour des opinions opposées, «alors nous aurons accompli quelque chose de très important».

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M. Neef souligne que la COC ne peut faire de l’opéra que pour la communauté et doit prendre en compte les structures politiques et sociales de son public; «Nous devons donc inspirer la confiance, mais aussi infuser la curiosité.»

«Les arts au Canada sont jeunes»

«Une de mes plus grandes surprises pendant mes deux premières années ici, fut de comprendre combien le Canada est un pays incroyablement jeune. Tout comme le pays, le secteur culturel est jeune. Les arts du spectacle au Canada, ne semblent pas faire partie d’une culture officielle.»

«On pourrait même se demander si une culture officielle existe, et si oui, en quoi consiste-t-elle, ou si nous sommes seulement en train de la construire?»

Au Canada, la COC défend une forme du théâtre musical dans un pays qui n’est pas marqué uniquement par la culture occidentale, mais se nourrit de diverses influences culturelles.

En ce qui concerne l’opéra, selon M. Neef, cela veut dire «établir le genre en dehors d’un contexte culturel occidental et réussir à faire qu’un public qui n’a pas grandi avec l’opéra, s’approprie le genre comme le sien.»

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Présence limitée

«Toronto est maintenant considérée comme une des villes culturelles les plus importantes au monde, mais en même temps, je n’ai pas l’impression que l’opéra ou les arts du spectacle en général, sont au cœur des besoins culturels de notre communauté», ajoute M. Neef.

La raison principale pour cela, est le fait que l’accès aux spectacles de la COC peut être difficile pour des raisons culturelles, sociales ou financières, selon le directeur.

«Il sera nécessaire de nous ouvrir plus à la communauté et de proposer des solutions pour des obstacles d’accessibilité», soutient-il.

«Nous devons exposer un plus grand nombre de gens à nos spectacles, par exemple augmenter le nombre de nos représentations dans notre Série de Concerts gratuits ou dans le cadre de nos programmes éducatifs.»

Il est à nous de renforcer la connexion entre les arts et notre société, de démontrer que les arts sont plus que du divertissement, qu’ils ont une contribution importante à faire en faveur de l’épanouissement mutuel de l’opéra et de notre communauté.

Auteur

  • Annik Chalifour

    Chroniqueuse et journaliste à l-express.ca depuis 2008. Plusieurs reportages réalisés en Haïti sur le tourisme solidaire en appui à l’économie locale durable. Plus de 20 ans d'œuvre humanitaire. Formation de juriste.

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