Le théâtre-réalité, kecekcéça?

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Publié 29/09/2009 par Guillaume Garcia

Prenez un metteur en scène qui rame à contre-courant de l’évidence, huit comédiens sadomasochistes prêts à se faire «flusher» 20 minutes après être montés sur scène, un public qui a le pouvoir – ou qui le croit – de mettre son grain de sel dans l’histoire qu’on lui raconte et vous obtenez votre pièce Théâtre extrême, une vraie fausse course à la chefferie, qui prendra l’affiche du Théâtre français de Toronto à partir du 7 octobre.

Ça faisait longtemps que Jean-Guy Legault cherchait une manière de «brasser le théâtre et renouveler la façon de s’adresser au public». L’idée de faire du théâtre-réalité a frappé à la porte de son esprit vers la fin des années 90, après la vague d’émissions télévisées où le public intervient dans le choix du cheminement de l’intrigue en éliminant les candidats au fur et à mesure. La télé-réalité s’immisçait dans nos vies. «J’étais fasciné par cette tendance», témoigne le metteur en scène.

Il lui a fallu du temps avant de trouver une réponse à la question «Comment utiliser cela dans le théâtre?» Sa vision d’un théâtre classique moribond, conventionnel, où l’on a tendance à infantiliser le public adulte, l’a poussé à explorer toutes les possibilités d’électrochocs avant de finalement opter pour le concept de «party rock» où le public peut influencer le déroulement de la pièce.

Il tenait le concept, ne restait qu’à trouver le thème. Entre l’idée et la première du show, près de six ans s’écouleront.Passionné de politique, lui même fils de politicien, il a puisé son inspiration dans la course à la chefferie au Parti Québécois avec André Boisclair et ce «bordel à l’interne» comme il le dit. La pièce met donc en scène des comédiens qui tentent de convaincre le public qu’ils seront les meilleurs pour mener campagne. Près de 900 pages de textes ont été écrites par Jean-Guy Legault pour parer à toutes les situations possibles et inimaginables, qui représentent près de 450 possibilités de pièces différentes! Le tout sans improvisation! Et oui il y a un truc…

Le metteur en scène a voulu que le public assiste aux scènes de campagnes politiques dont il n’est pas témoin lors des campagnes classiques, c’est à dire les repas d’affaires, les conférences de presses sans caméras…, «des instants privilégiés qu’on aurait le goût de voir, s’amuse t-il, dans une vraie bataille électorale.»

Le spectacle est construit par tableaux. Après chaque situation, le public doit voter pour éliminer un des candidats, qui portent par ailleurs leur vrais noms, afin de vraiment leur faire ressentir ce que subissent les politiciens.

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Comme l’indique Jean-Guy Legault, il s’agit bien là «d’un défi pour les comédiens dans leurs rapports au public. Ils doivent se remettre en question. Après une élimination, ils essayent de changer leur manière de jouer le rôle mais sans changer le texte».

Selon le metteur en scène, il y aurait une bonne analyse de public à faire puisque selon les régions certains candidats vont plus ou moins loin dans le déroulement de la pièce. Le concept de théâtre-réalité sur fond de course à la chefferie est génial sur ce point, sachant qu’au fur et à mesure il devient de plus en plus difficile de virer des candidats auxquels on s’est progressivement attaché.

Comme si la qualité du concept ne contribuait pas assez à la réussite de la pièce qui tourne depuis près de cinq ans maintenant (plus de 130 spectacles), l’actualité politique s’en charge également. En cinq ans, bon nombre d’élections fédérales, provinciales municipales ont été organisées, autant de raisons qui font rester cette pseudo-course à la chefferie d’actualité, et ce n’est pas le contexte actuel qui changera la donne.

Si la troupe a essuyé plusieurs refus de théâtres avant de finalement choisir l’autoproduction pour cette pièce, le succès leur sourit depuis plusieurs années maintenant et la pièce continue d’être adaptée selon les provinces et l’actualité. À contre-courant peut-être, mais un tantinet perfectionniste le Jean-Guy Legault.

Auteur

  • Guillaume Garcia

    Petit, il voulait devenir Tintin: le toupet dans le vent, les pantalons retroussés, son appareil photo en bandoulière; il ne manquait que Milou! Il est devenu journaliste, passionné de politique, de culture et de sports.

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