«On s’en va en récession, pas en dépression»

Jacques Chartrand, président Gestion de portefeuille Selexia, au déjeuner d’affaires du Club canadien

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Publié 25/11/2008 par Annik Chalifour

Devant les membres du Club canadien de Toronto le mercredi 19 novembre, Jacques Chartrand a posé un regard plutôt optimiste sur la situation des marchés, malgré la récession qui s’installe. Selon ses propos, le Canada traverse la crise financière relativement mieux que la plupart des autres pays.

Oui, les grandes corporations financières ont peine à faire rouler l’économie. La conjoncture financière est certes, difficile. Cependant, nous avons traversé d’autres crises au cours des vingt dernières années – l’immobilier en 1990, la crise asiatique en 1998, la débâcle des dot.com en 2000 – qui peuvent nous aider à demeurer optimistes.

Selon Jacques Chartrand, expert dans la gestion de portefeuilles, chaque crise présente aussi ses opportunités. «Le principal défi est de pouvoir survivre aux baisses de crédit. L’accès au crédit est essentiel pour garantir la bonne santé financière. Nous accusons présentement une baisse de 40 à 42%»

Jacques Chartrand cumule plus de 20 années d’expertise sur les marchés. Il a débuté sa carrière dans le secteur du crédit corporatif en 1980. En 1987, suite au krach boursier, il a fait le saut en gestion de portefeuilles.

M. Chartrand dresse un tableau de l’histoire de la gestion financière mondiale depuis les années 50 pour remémorer à l’auditoire qu’en moyenne, depuis 1956, on a vécu des baisses de 20 % sauf en 1973 et 2000, où on a connu des baisses allant jusqu’à 50 %.

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Selon le conférencier, on peut faire un bon bout de chemin avec une baisse de 40 % et ça continuera de descendre. Bien sûr, on sera témoin de faillites et mises à pied, mais «il ne faut pas oublier que c’est aussi lorsque le taux de chômage est à son plus haut que le marché remonte», dit-il.

«La crise est alarmante puisqu’elle sévit partout à la fois, aux États-Unis, en Europe et en Asie, mais ce n’est pas la fin du monde. Nous ne sommes pas en dépression comme en 1932. Le marché peut continuer de descendre, mais à moins de 50 %, c’est plutôt rare», déclare M. Chartrand.

Le stress financier réside dans le taux de crédit difficilement accessible aux entreprises. Il fallait que les États-Unis sauvent le système bancaire pour éviter une dépression comme dans les années 30 où le crédit était devenu inexistant. Au moins, le système bancaire fonctionne: les banques se prêtent entre elles.

Cependant, «le taux d’emprunt que doivent payer les entreprises est à 8¾ %, comme dans les années 30! C’est une situation à corriger. Toutefois il est normal que les banques prêtent peu en période de resserrement du crédit».

Il faut également se rappeler que nous avons vécu une période d’expansion phénoménale depuis les cinq dernières années avec «l’ascension de la Chine à raison de 10% par année et d’autres pays émergeants comme l’Inde, le Brésil et la vigueur de la force économique de l’Union Européenne», commente M. Chartrand.

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«Du côté du pétrole, la situation est moins alarmante s’il y a moins de consommation. Il ne fait aucun sens que les prix de l’essence aient atteints les niveaux qu’on a connus cet été. La Chine, par exemple, consomme moins de 10 % de produits pétroliers dans le monde», mentionne M. Chartrand. La consommation générale du pétrole diminue. Les inventaires se réduisent. Les pays de l’OCDE indiquent une baisse de la demande de 2 %. On vit présentement une contraction mondiale de la demande des produits pétroliers.

L’OPEP a très bien géré le marché mondial du pétrole mais pour combien de temps encore? «Les titres d’énergie ont baissé de 60 %», précise M. Chartrand. Le prix du pétrole va continuer de descendre selon lui.

M. Chartrand ne croit pas que les banques au Canada vont péricliter comme chez nos voisins du sud. «Les banques au Canada sont bien gérées. En matière de crédit, ça va. Les normes de crédits sont différentes entre les États-Unis et le Canada. Bien sûr, certaines vont accuser des pertes comme par exemple, celle de 850 millions $ annoncée récemment par la Banque de Nouvelle-Écosse», dit-il.

M. Chartrand suggère d’investir dans les banques et la consommation discrétionnaire – par exemple des compagnies comme Shoppers, Métro – qui possèdent les meilleurs titres sur le marché. Les secteurs de l’énergie, des matériaux et des ressources sont de moins bons investissements. Il est préférable d’investir dans un secteur à long terme car le risque qu’il descende est moindre», dit-il.

M. Chartrand conseille d’investir avec l’argent que l’on a, et d’éviter d’investir auprès de compagnies qui ont des dettes.

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«On s’en va en récession, vers une baisse à court terme, non pas en dépression», répète-t-il. Oui le marché est difficile, mais on peut demeurer modérément optimiste à moyen terme.

Fondateur de Gestion de portefeuille Natcan en 1990, Jacques Chartrand œuvre auprès du groupe Banque Nationale depuis maintenant 28 ans.

Auteur

  • Annik Chalifour

    Chroniqueuse et journaliste à l-express.ca depuis 2008. Plusieurs reportages réalisés en Haïti sur le tourisme solidaire en appui à l’économie locale durable. Plus de 20 ans d'œuvre humanitaire. Formation de juriste.

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