Vers une résolution pacifique des conflits à l’école

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Publié 20/02/2006 par Marta Dolecki

Ils ont des petites frimousses et les joues encore remplies des rondeurs de l’enfance. Quand la cloche de la recréation sonne, ils bondissent de joie et s’élancent avec fougue pour s’adonner à leurs jeux favoris dans la cour d’école. Mais, qu’on ne s’y trompe pas: tout comme les adultes, les enfants vivent au quotidien leur lot de déconvenues et de vexations qui, si elles ne sont pas maîtrisées, viennent générer chez eux le même sentiment de frustration.

Chaque école a ses propres méthodes pour résoudre les conflits qui se déroulent dans l’enceinte de ses murs, des petites disputes qui ont lieu dans la cour de récréation en passant par des tentatives d’intimidation, souvent subtiles, qui se déroulent à l’intérieur, dans les salles de classe et les couloirs.

La méthode douce

Prévenir plutôt que guérir semble être le credo de la formation Vers le pacifique, un programme d’intervention qui apprend aux jeunes à régler leurs conflits autrement que par la violence.

Ludique et éducatif, Vers le pacifique s’insère parfaitement dans le cursus scolaire. De plus, il vient ouvrir aux enfants les portes de la tolérance, de la communication et de l’estime de soi. Le programme s’adresse aux élèves du préscolaire à la sixième année.

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À l’école élémentaire Sainte-Madeleine de Toronto, Jane Tan-Yan a été la première enseignante à administrer le programme. Elle a commencé à utiliser la formation Vers le pacifique il y a trois ans de cela. Mme Tan-Yan travaille essentiellement avec des enfants atteints de troubles du comportement. Récemment, à Sainte-Madeleine, le programme a été étendu à toutes les classes et l’enseignante ne tarit pas d’éloges à son sujet.

«On montre aux enfants comment re-connaître les signes précurseurs de la colère. On leur enseigne comment résoudre leurs chicanes et leurs accrochages. Le programme a été rédigé dans un langage très simple, les activités sont bien expliquées aux enseignants. Quant aux enfants, ils apprennent de quelle façon régler leurs conflits par eux-mêmes et donc, tout le monde finit par y gagner.»

Créé dans les années 1990 par un organisme montréalais, le Centre international de résolution des conflits et de médiation (CIRCM), le pro-gramme Vers le pacifique a fait son chemin dans plus de 500 écoles du Québec avant d’être instauré dans des provinces telles que l’Ontario ou encore le Nouveau-Brunswick.

La méthode est simple: lors d’ateliers, les professeurs enseignent aux élèves les mécanismes de résolution de conflit qui s’appuient essentiellement sur quatre principes: se calmer, se parler, chercher, et enfin, trouver une solution.

Les enfants prennent une bonne respiration, apprennent à maîtriser leur colère et de-viennent plus prompts à parler de leurs sentiments à cœur ouvert. «L’intimidation ne se manifeste peut-être pas au niveau de la violen-ce physique, mais on rencontre souvent des situations d’exclusion ou de taquinerie, fait valoir la directrice de l’école Sainte-Madeleine, Charlotte Henay.

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«Nos écoles sont petites et les élèves se suivent d’année en année. Quand ces choses-là se produisent, elles ont tendance à se magnifier au cours des années. On est conscient du problème. Quand on commence un programme comme celui-ci, c’est un peu comme une boîte de Pan-dore. On doit résoudre des conflits qui datent parfois de plusieurs années.»

Mlle Pie et M. Louis à la rescousse des élèves

Dans le cadre du programme, les enfants sont aidés dans leur démarche par des amis imaginaires auxquels ils peuvent s’iden-tifier. Chaque thème – l’écoute de l’autre, l’empathie, la confiance en soi – est ainsi abordé au travers de personnages d’animaux qui permettent aux enfants de mieux maîtriser leurs émotions.

Ainsi la colombe Mme Pacifique ap-prend aux élèves à se calmer et à régler leurs différends de façon calme et mesurée. Mlle Pie, qui était à l’époque bien bavarde, a depuis rangé sa langue dans sa poche et prône maintenant les vertus d’une communication efficace.

L’es-cargot M. Ducalme aide les enfants à mieux exprimer leurs sentiments et Mlle Fièredailes, un beau papillon fier de ses radieuses ailes co-lorées, leur apprend à s’estimer et à prendre conscience de l’éventail de leurs qualités.

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Un océan de paix

Et les élèves y croient. Mercredi dernier, lors de la cérémonie qui a marqué de façon symbolique le lancement du programme Vers le pacifique à l’école Sainte-Madeleine, les enfants, ravis, ont applaudi l’arrivée de leurs personnages favoris.

À chaque nouvelle apparition de Mlle Pie, une clameur s’est élevée. L’éléphant Louis, M. Ducalme, Mlle Fièredailes et bien d’autres ont eu droit à un semblable accueil. «Oh regarde, c’est notre papillon», s’est exclamée, enthousiaste, une fillette assise dans les premiers rangs.

À côté, sur les murs du gymnase, les quatre prin-cipes de base de résolution des conflits – se calmer, se parler, chercher, trouver une solution – venaient s’inscrire en gros sur des feuilles colorées.

Pendant la matinée, plusieurs élèves ont fait part de leurs témoignages, racontant comment ils s’étaient brouillés avec leur meilleure amie pour ensuite réussir à aller lui parler de nouveau et finalement, se réconcilier pour «redevenir les meilleures amies du monde».

Des résultats concrets

Selon les représentants de l’école, l’implantation du programme Vers le pacifique en milieu scolaire fonctionne bien et donne des résultats concrets.

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«J’ai dans mes classes plusieurs élèves qui, auparavant, avaient des troubles de comportement, se bagarraient et qui, maintenant, sont capables de se dire: “j’ai besoin de me calmer”», estime Jane Tan-Yan.

Les répercussions de la formation dispensée à l’école Sainte-Madeleine se font sentir jusque dans le milieu familial.

«Mon fils le plus âgé a commencé le programme Vers le pacifique il y a deux ans», explique Rita Nasrallah-Chamoun, maman de Carl-Anthony, 9 ans, et de Christopher, 6 ans.

«Il y a quelques semaines, quand lui et mon plus jeune fils se sont un peu chamaillés, le grand lui a dit: “écoute, il faut qu’on arrive à résoudre nos problèmes de façon pacifique. On va se retirer et revenir quand on sera calmés.” J’avais trouvé ça excellent, parce que du coup, ils n’avaient plus besoin de moi», fait valoir Mme Nasrallah-Chamoun.

La formation mise sur pied par le CIRCM a fait des émules dans le monde entier. Elle est maintenant dispensée en France, en Bolivie, au Liban et au Pérou.

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Pour plus d’information sur le CIRCM: http://www.circm.com/educ-entree1.html

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