Discriminatoire: rejeter une demande d’immigration pour des raisons médicales

«Contraire aux valeurs canadiennes», selon la sociologue Laura Bisaillon

Le Canada peut rejeter les demandes de résidence permanente de personnes malades, handicapées ou porteuses de gènes problématiques: une pratique discriminatoire selon la sociologue Laura Bisaillon.
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Publié 17/01/2020 par Guirec Joubert

Le rejet d’une demande d’immigration au Canada pour des raisons médicales ne correspond pas aux valeurs canadiennes.

Le gouvernement fédéral devrait donc revoir cette politique discriminatoire, selon l’assistante professeure Laura Bisaillon du Centre interdisciplinaire de la Santé et de la Société à l’Université de Toronto, conférencière invitée par la Société d’Histoire de Toronto le 15 janvier à l’Alliance française.

À l’aide d’une méthode de travail qu’elle appelle «éthnographie institutionnelle», l’universitaire recueille, catalogue et relaye les exemples et les histoires.

Elle-même atteinte d’une maladie qu’elle peut soigner uniquement parce que les médicaments sont remboursés au Canada, elle estime avoir «de la chance d’être née au Canada».

La chercheuse Laura Bisaillon, au centre, entourée de Ronald Dieleman et Rolande Smith, de la Société d’Histoire de Toronto.

Incohérences

Son objectif est de mettre en évidence l’incohérence de cette exigence médicale étiquetant un immigrant comme un «fardeau excessif pour les services sociaux et de santé».

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La quarantaine de personnes qui ont assisté à sa conférence paraissaient d’accord avec sa contestation du système – et même surpris que le Canada soit un des seuls pays de l’OCDE à lier l’obtention de la résidence permanente à l’état de santé du demandeur.

Selon Laura Bisaillon, refuser la résidence permanente à des demandeurs malades, handicapés ou avec des troubles génétiques est aussi en contradiction avec les besoins économiques et de main d’oeuvre du pays. «En exigeant un examen médical, le Canada se prive de talents potentiels.»

Laura Bisaillon reproche aux procédures médicales d’être purement administratives et découler d’une logique d’exclusion.

Par ailleurs, l’inadmissibilité médicale représenterait une «incohérence politique», bafouant les valeurs canadiennes de non-discrimination et de lutte contre la misère sociale.

Enfin, calculer la valeur d’une personne par un examen médical serait «dégradant et réducteur».

Inadmissible Nico

Laura Bisaillon donne l’exemple d’une famille costaricaine dont le fils est atteint de Trisomie 21, et dont la résidence permanente au Canada est refusée.

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Le parcours de cette famille a fait l’objet d’une vidéo disponible sur YouTube, sous le titre Inadmissible Nico.

Elle ajoute que les demandeurs de résidence permanente atteints du VIH/SIDA font preuve d’une attention très particulière des autorités, que les Canadiens n’ont pas à subir.

Cette logique d’exclusion mènerait à des carences dans l’examen médical «réalisé uniquement dans un but administratif, sans raisonnement clinique».

Défis

Laura Bisaillon pose quatre questions qui représentent quatre défis pour le pays: Comment rompre avec le passé? Comment mettre de côté la logique économique? Comment nous mettre à la place des autres? Qu’est-ce qui est réellement en cause?

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Elle travaille depuis peu avec l’Association du Barreau canadien afin de «dénicher et faire disparaître l’inadmissibilité médicale au Canada».

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