Depuis la fin de l’été, seuls quelques témoignages-chocs à la commission Charbonneau, les élections municipales du 3 novembre, les hauts et les bas du Canadien de Montréal et la sortie d’un nouvel album de Céline Dion ont pu momentanément détourner l’attention des médias québécois – et, présumément, des Québécois eux-mêmes – de la Charte de la laïcité proposée par le gouvernement de Pauline Marois.
Même les médias canadiens-anglais ont participé avec enthousiasme à ce débat – presque toujours pour s’opposer au projet péquiste, qui bafoue allègrement le multiculturalisme aplaventriste à la canadienne. Il ne s’est probablement pas passé une semaine, cet automne, sans qu’on lise un reportage ou un éditorial sur le sujet dans les grands journaux torontois. Depuis les référendums de 1980 et de 1995, aucune affaire québécoise n’avait suscité autant d’intérêt ici.
Pour un projet qui s’attaque supposément à un problème inexistant ou exagéré, pour détourner l’attention des vrais enjeux (comme le déficit du gouvernement, qui sera de 2,5 milliards $ en 2014 au lieu de zéro comme promis, parce que la croissance n’est pas au rendez-vous), ce serait trop d’honneur.
Au Québec, je parierais volontiers qu’il ne s’est pas encore passé une journée, cet automne, sans qu’un journaliste ou un chroniqueur ne mentionne la Charte. Au début, je me proposais de recenser dans un article les chroniqueurs pour et contre, avec leurs arguments les plus édifiants, mais l’entreprise a rapidement pris des proportions ingérables.
L’idée d’une «Charte des valeurs québécoises» est finalement devenue le projet de loi 60, déposé le 7 novembre par le ministre Bernard Drainville, intitulé «Charte affirmant les valeurs de laïcité et de neutralité religieuse de l’État ainsi que d’égalité entre les femmes et les hommes et encadrant les demandes d’accommodement».