Les candidats libéraux doivent résister à la tentation

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Publié 30/10/2012 par François Bergeron

Les Libéraux ontariens éliront leur nouveau chef les 25-27 janvier à l’ancien Maple Leaf Gardens de Toronto, qui abrite aujourd’hui le centre sportif de l’Université Ryerson.

Aucune personnalité n’a encore officiellement annoncé son intention de prendre la relève de Dalton McGuinty, mais quelques intéressés s’organisent. Les travaux de l’Assemblée législative ont été suspendus pour nuire à l’opposition et braquer tous les regards sur la course à la chefferie libérale.

Le ministre des Finances, Dwight Duncan, n’y participera pas. Il quittera la scène politique à la faveur du déclenchement des prochaines élections, qui pourraient suivre de peu le choix d’un nouveau chef libéral, vu la position minoritaire du gouvernement à Queen’s Park.

M. Duncan appuie ouvertement l’ex-ministre Sandra Pupatello, qui vient elle aussi de la région de Windsor. Celle-ci a déjà commencé à dire à des journalistes qu’elle est horrifiée de la perspective de futures élections remportées par les Progressistes-Conservateurs de Tim Hudak ou par les Néo-Démocrates d’Andrea Horwath.

C’est d’ailleurs aussi cette possibilité bien réelle qui a motivé le départ du premier ministre McGuinty et qui guidera le choix des militants libéraux.

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Le premier ministre a été profondément déçu du résultat des élections d’octobre 2011, après une campagne menée de main de maître, dans laquelle il a personnellement tout donné et où il pouvait encore défendre un bilan positif: 53 sièges (1 de moins que la majorité) contre 72 en 2007, 37% des suffrages contre 42% auparavant, une participation générale sous les 50%…

On l’a déjà oublié, mais, l’an dernier, après des mois de sondages défavorables, la réélection d’un gouvernement libéral minoritaire a été perçue comme une victoire morale.

Inexorablement, cependant, il devenait de plus en plus difficile pour un Parti libéral dirigé par Dalton McGuinty de contrecarrer la morosité suscitée par les difficultés économiques au moyen de belles réalisations ou de promesses grandioses.

Au contraire, l’heure est à la discipline fiscale, un impératif qui malmène des clientèles traditionnellement libérales.

M. McGuinty et son entourage ont conclu que seul un nouveau chef pouvait permettre au parti de se ressaisir, de se distancier des scandales d’hélicoptères ou de centrales au gaz, et de récupérer l’appui d’Ontariens qui commençaient à lorgner vers les Progressistes-Conservateurs ou les Néo-Démocrates.

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Les difficultés des Libéraux sur la scène fédérale, où ils ont été dépassés par le NPD au sein de l’opposition au gouvernement conservateur, ajoutent à l’urgence, pour les Libéraux ontariens, de freiner le même réalignement de l’électorat sur la scène provinciale.

* * *

Par ailleurs, quelques heures avant l’annonce du départ du premier ministre, le gouvernement réaffirmait demeurer «sur la bonne voie en vue d’atteindre les objectifs fixés dans le budget de 2012 pour le déficit en 2013-2014 et en 2014-2015, et d’éliminer le déficit d’ici 2017-2018».

Le gouvernement ontarien dépense actuellement 14 milliards $ de plus que ses revenus de 113 milliards $.

Cette belle assurance est toutefois fondée sur des prédictions de croissance du produit intérieur brut supérieure à 2% en 2014 et 2015, ce que l’analyse la plus sommaire des problèmes américains et européens ne devrait pas autoriser.

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«On prévoit que l’Ontario créera près de 350 000 emplois nets d’ici 2015 et que le taux de chômage chutera à 6,8%», lit-on encore dans le communiqué.

Le taux de chômage est actuellement de 8% en Ontario. Ce n’est pas catastrophique en soi, mais la situation est compliquée par le vieillissement de la population, le fait que de moins en moins de travailleurs doivent supporter de plus en plus de retraités.

Ce plan financier repose notamment sur le gel de salaire de deux ans que le gouvernement va réussir à imposer à la plupart de ses fonctionnaires. C’est une idée volée aux Progressistes-Conservateurs qui, après tout, ont récolté 35% des suffrages aux dernières élections, plus que la dernière fois et presque autant que les Libéraux.

Une majorité de la population est certainement d’accord pour que le gouvernement limite ses largesses et que sa fonction publique, déjà très bien traitée, fasse les compromis nécessaires. Mais un grand nombre de Libéraux traversent ici un territoire intellectuel inconnu…

Aussi, la veille de l’annonce du départ de Dwight Duncan, le gouvernement a conclu des accords avec les responsables de trois régimes de retraite du secteur public, sanctionnant un gel des taux de cotisation de l’État pendant cinq ans et garantissant que tout déficit de financement de ces pensions ne sera pas compensé par les contribuables.

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Autrement dit, en cas de déficit de financement, les régimes seraient tenus de réduire leurs prestations. C’est un coup de frein salutaire appliqué à l’un des postes budgétaires qui augmentent le plus rapidement.

Souhaitons que le prochain chef du Parti libéral de l’Ontario continue sur cette lancée. La tentation sera grande, pour les candidats, d’essayer de rivaliser de «générosité» avec les Néo-Démocrates, plutôt que de «parcimonie» avec les Progressistes-Conservateurs.

Auteur

  • François Bergeron

    Rédacteur en chef de l-express.ca. Plus de 40 ans d'expérience en journalisme et en édition de médias papier et web, en français et en anglais. Formation en sciences-politiques. Intéressé à toute l'actualité et aux grands enjeux modernes.

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