Les migrants: une autre tragédie africaine occultée

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Publié 16/08/2011 par Darnace Torou

Ces derniers jours, la presse rapporte régulièrement des faits divers macabres survenus sur les deux rives de la Méditerranée: la triste fin de ces aventuriers rêvant d’atteindre l’El Dorado européen. Naufragés ou jetés à la mer, les détails horribles et sordides ne manquent pas. Ces faits se sont tout simplement accélérés ces derniers mois.

La question migratoire dans le bassin méditerranéen, ne date pas d’aujourd’hui. Il s’agit d’une constante historique datant de l’Empire romain.

Pendant la colonisation et surtout après la Seconde Guerre mondiale, les travailleurs migrants ont été sollicités et accueillis à bras ouverts en Europe. Normal: ils étaient peu exigeants, travaillaient dur. Personne, à l’époque, ne se préoccupait de ces Africains, Maghrébins qui étaient discrets, dans leur statut de travailleur temporaire à statut révocable.

Seulement, au fil de temps et avec la détérioration des économies dans les pays africains, les féroces politiques d’ajustement structurel imposées par le Fonds monétaire international, l’adoption des Accords de Schengen, traversant la Méditerranée devenaient le sésame pour la prospérité.

On conviendra avec le sociologue français Alfred Sauvy que: «Ou bien les richesses iront là où sont les hommes ou bien ce seront les hommes qui iront là où sont les richesses».

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Ainsi est né le nouvel exode, d’abord par le Maroc qui se situe à 14 km du sud de l’Espagne, devenu un facteur d’encouragement à l’émigration clandestine.

Mais depuis, le Système Intégré de Surveillance Extérieure (SIVE) (financé par l’Europe pour 260 millions d’euros), 25 stations de surveillance fonctionnent en permanence et rendent la traversée illégale presqu’impossible. Des filières d’immigration illégale vers l’Union Européenne ont été rapidement mises en place: par Gibraltar surtout, par les îles Canaries ou par Ceuta et Melilla.

Pour les émigrants de l’Afrique subsaharienne mais aussi d’Asie (Inde, Pakistan, Bangladesh entre autres), le Maroc, puis l’Algérie, sont devenus des pays de transit. Partis de l’Afrique subsaharienne, de plus en plus de jeunes Africains, des deux sexes, traversent le désert par différents moyens pour y arriver. Arrivent-ils tous en Europe? D’après les estimations, de 1989 à 2002, entre 8000 à 10 000 auraient péri en mer,

L’hémorragie humaine a pris une autre dimension depuis «le printemps arabe», car selon l’observatoire Fortress Europe, au moins 1615 personnes seraient mortes ou disparues depuis le début de l’année, en essayant de franchir le canal de Sicile en provenance de Tunisie, de Libye ou d’Égypte. L’observatoire avance pour sa part que ce sont au moins 17 627 personnes qui auraient disparu en mer en tentant de gagner l’Europe. Ce qui fait de cette partie de la Méditerranée un des plus grands cimetières marins du monde.

On se souviendra aussi que M. Kadhafi avait conclu un accord avec l’Italie pour «protéger» l’Europe de cette «invasion».

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L’île de Lampedusa, d’une superficie de 20,2 km et peuplée par moins de 6000 habitants, a vu débarquer clandestinement, depuis la chute de M. Ben Ali à la mi-janvier, plus de 20 000 immigrés, essentiellement tunisiens. Cette marée des plus pauvres d’entre les pauvres a déjà suscité la polémique entre l’Italie et la France, qui songeait, en avril dernier, à demander la suspension provisoire de l’accord de Schengen sur la libre circulation des personnes pour contrer l’afflux de migrants venus d’Afrique du Nord.

Sauf que pendant que les puissants et riches se disputent, les démocratiquement et économiquement pauvres du Sud ont fait le choix entre «partir pour vivre ou rester et crever».

La preuve? Le 1er août dernier, les garde-côtes ont découvert, sur l’île de Lampedusa, 25 migrants morts par asphyxie. Ils se trouvaient dans la salle des machines d’un bateau-mouroir transportant 270 autres personnes, en provenance de Libye.

Après tout, «partir, c’est mourir un peu», comme le disait Edmond Haraucourt! Les dirigeants africains, eux, observent un silence assourdissant.

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