Pour trop peu parce que trop tôt: c’est la critique quasi-unanime de l’attribution embarrassante du Prix Nobel de la Paix 2009 à Barack Obama, qui aurait dû le refuser ou, au moins, proposer au comité norvégien d’aller le chercher à la fin de son mandat, quand la prison de Guantanamo sera fermée et que l’armée américaine aura quitté l’Irak et l’Afghanistan.
Le président du comité Nobel, l’ex-premier ministre travailliste norvégien Thorbjoern Jagland, a tenté de justifier ce choix inattendu en prétendant que personne d’autres que le nouveau président américain «n’a fait plus que lui cette année» pour la paix ou les droits humains dans le monde. Ce à quoi des sceptiques ont répondu qu’on aurait pu honorer des dissidents assassinés en Russie, des manifestants pour la démocratie en Iran, ou encore des marins otages de pirates somaliens…
«Nous attrapons l’air du temps, la nécessité de l’époque», s’est encore défendu M. Jagland. Autrement dit, Barack Obama a reçu le Prix Nobel pour ce qu’il symbolise en tant que premier président noir des États-Unis, surtout auprès des Européens qui n’en reviennent pas encore.
Aux États-Unis et au Canada, où la discrimination a pratiquement disparu, l’élection d’un noir ou d’une femme ou d’un autre minoritaire n’est plus considérée comme un événement exceptionnel. La victoire d’Obama était l’aboutissement de cette évolution. Les Européens s’imaginent que c’est l’inverse, qu’elle en est le point de départ.