Numérologie et pronostics politiques

Les amateurs de numérologie se réjouissent quand des événements sont associés à des dates qui frappent les imaginations. Les Chinois ont choisi le 8 août 2008 – les chiffres « chanceux » 08-08-08 – pour l’ouverture des Jeux olympiques.

Hillary Clinton montait à la tribune de la Convention démocrate 88 ans après la reconnaissance du droit de vote des femmes aux États-Unis, et Barack Obama a prononcé son discours d’acceptation, jeudi 28 août, le jour du 45e anniversaire du fameux « I have a dream » du pasteur Martin Luther King.

Les commandos d’al-Qaïda ne peuvent pas ne pas avoir choisi délibérément la date du 11 septembre (il y a 7 ans cette semaine) pour attaquer les symboles financiers, militaires et politiques américains, vu le sens bien connu des chiffres 911.

Chez nous, c’est la famille Trudeau qui nous a habitué à ce genre de coïncidences: les deux premiers fils de Pierre Elliott Trudeau sont nés le jour de Noël et, l’an dernier, son petit-fils (le fils de Justin) est né le jour de l’anniversaire de naissance de l’ancien Premier ministre, qui aurait eu… 88 ans! 

Mais c’est une toute autre numérologie – celle des sondages – qui peut expliquer la volonté de l’actuel Premier ministre, Stephen Harper, de déclencher des élections cet automne, au mépris de sa propre loi sur les élections à date fixe. Cette expérience devrait d’ailleurs l’amener à réviser ses idées sur une éventuelle réforme du Sénat: mieux vaut abolir la chambre haute qu’en faire un contre-pouvoir élu qui ajouterait à la dysfonctionnalité du système actuel.

Les Conservateurs souhaiteraient bien sûr décrocher une majorité pour gouverner avec les coudées franches. Pour cela, ils doivent encore convaincre un grand nombre d’électeurs qui trouvent plus prudent de les forcer de composer avec l’opposition. Aucun de nos chefs politiques n’a gagné d’avance les débats sur la protection de l’environnement et la croissance économique, la guerre au terrorisme et l’intégration des immigrants, le système de santé et l’unité nationale…

Stéphane Dion pourrait causer une surprise et améliorer sa position en réussissant à convaincre des Néo-Démocrates, des Verts et peut-ëtre même des Bloquistes à voter « stratégique »… ou bien il pourrait s’écrouler complètement. Que ce soit en gagnant la course au leadership libéral, en échappant au scandale des commandites ou dans les tranchées fédéralistes pendant la dernière campagne référendaire québécoise, Dion a souvent dépassé les attentes et confondu les sceptiques.

Stephen Harper dispose aujourd’hui, face à une « gauche » divisée, du même avantage qui favorisait Jean Chrétien face à une « droite » divisée. Mais laissons les pronostics aux numérologues, astrologues et autres pseudologues.

Chez nos voisins américains, la perspective d’un changement de régime à Washington se confirme. En choisissant la gouverneure médiévale de l’Alaska Sarah Palin comme colistière, John McCain a démontré un manque de jugement sidérant. Le vieux sénateur de l’Arizona, qui a longtemps tenu tête aux éléments les plus rétrogrades de son Parti républicain et qui, précisément pour cette raison, semblait le mieux placé pour affronter le jeune mais charismatique Barack Obama, a bradé tous ses atouts.

Obama est sorti de la convention démocrate mieux défini, plus solidement épaulé et plus sérieux que jamais, surfant sur une vague d’espoir de changement qu’il a contribué à créer et qu’il incarne à merveille. McCain repart de la convention républicaine en espérant uniquement conserver sa base religieuse militariste dépassée et discréditée par ses fiascos sur la scène internationale et dans la société américaine.