L’industrie du sans-fil se rebiffe contre les insinuations du gouvernement Harper

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Publié 17/12/2013 par François Bergeron

La campagne publicitaire menée ces temps-ci par le gouvernement fédéral, réclamant aux Bell, Telus et autres Rogers de ce monde un meilleur service de téléphonie sans fil à des tarifs moins élevés, est «une attaque sans précédent» contre une industrie qui, non seulement respecte toutes les lois du Canada, mais surtout qui contribue beaucoup à la prospérité du pays.

C’est ce qu’a déclaré Bernard Lord, le président de l’ACTS (Association canadienne des télécommunications sans fil), à la tribune du Club canadien de Toronto le 10 décembre. M. Lord – qui appartient pourtant à la même famille conservatrice que Stephen Harper – a rappelé qu’il avait interdit l’affectation de fonds publics à de telles campagnes «politiques» lorsqu’il était premier ministre du Nouveau-Brunswick.

«C’est un gaspillage des impôts», accuse-t-il.

Compétition

Après avoir échoué cet été à attirer dans le marché canadien le géant américain Verizon, le gouvernement Harper (d’habitude attaché à la liberté d’entreprise et de commerce) est en mode «consommateur averti» et se fait fort de mousser la compétition dans le secteur des télécommunications personnelles.

Aucun des gros joueurs de l’industrie n’est toutefois en position de monopole, affirme M. Lord. «C’est un marché très concurrentiel». En fait, le Canada serait le pays qui compte le plus d’entreprises dans ce secteur, deux douzaines.

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Et si leurs services coûtent cher, c’est que les Canadiens réclament (et, apparemment, sont prêts à payer pour) les systèmes les plus performants.

M. Lord soutient d’ailleurs que ces services de luxe sont moins chers chez nous qu’ailleurs, et moins cher qu’avant. «Prendre l’avion de Moncton à Toronto coûte plus cher que venir à pied», compare-t-il, «mais on est prêt à payer pour les avantages que procure l’avion»…

Croissance

Les participants au déjeuner des Fêtes du Club canadien ont été bombardés de statistiques, toutes plus édifiantes les unes que les autres, sur l’industrie du sans-fil, dont la croissance exponentielle ne semble pas avoir été affectée par la récession de 2008-2009.

63% des Canadiens possèdent un téléphone intelligent aujourd’hui (90% possèdent un téléphone portable, «intelligent» ou non). C’était 54% l’an dernier, 36% en 2011. La plupart d’entre nous le conservons en tout temps à portée de la main, même la nuit!

Il s’agit de la deuxième plus forte utilisation de ces appareils dans les pays du G7 (après le Royaume-Uni, à 65%). Seuls les Japonais sont encore sous la barre des 50%.

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Bandes passantes louées

En grande forme, M. Lord n’a pas manqué de souligner que les ondes (le «spectre») sur lesquelles voyagent la quantité phénoménale de données que nous consommons ne sont pas gratuites: elles sont louées dans des enchères organisées périodiquement par le gouvernement fédéral, ce qui lui a rapporté près de 6 milliards $ depuis 1987, comparé à plus de 37 milliards $ en dépenses d’immobilisation effectuées par l’industrie.

Les Canadiens s’envoient 11 millions de textos à l’heure et sont les plus gros utilisateurs de YouTube dans le monde. Un téléphone intelligent consomme autant de données que 50 téléphones traditionnels, une tablette autant que 120.

Or, ce trafic continue d’augmenter: on prévoit que dans cinq ans il sera 9 fois plus important qu’aujourd’hui. Il faudra donc lui ouvrir de nouvelles «routes» sur le «spectre».

Comme en radio, image Bernard Lord, où la même fréquence permet de syntoniser des stations différentes selon qu’on se trouve à Toronto, Montréal ou ailleurs, la multiplication des antennes permettra à un plus grand nombre de plus petits groupes d’utilisateur de téléphone ou de tablette de recevoir et envoyer leurs données sans encombre. «C’est une ressource rare, mais réutilisable», explique-t-il. «Il faut donc toujours trouver des moyens de mieux l’utiliser.»

Bons emplois

L’industrie revendique 280 000 emplois plus ou moins directs, mieux rémunérés que dans la plupart des autres secteurs. Ses syndicats ont d’ailleurs participé, aux côtés de leurs employeurs, à la contestation des nouvelles règles qui auraient permis la participation de Verizon à la prochaine enchère de bandes passantes sur le spectre.

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«Quand on investit autant d’argent dans un secteur», a fait valoir le conférencier, «on ne veut pas de lois et de règles qui peuvent changer du jour au lendemain au gré de l’humeur des politiciens».

En 2011, les exploitants de réseaux canadiens de sans-fil chiffraient leurs revenus à quelque 19,1 milliards $, dont 17,5 milliards $ provenaient de la prestation de services de téléphonie et de transmission de données, 1,4 milliard $ de la vente d’appareils et d’accessoires, et 166 millions $ de l’offre d’applications et de contenu pour mobiles.

Selon Bernard Lord, les pouvoirs publics devraient être reconnaissants de l’apport de l’industrie du sans-fil à l’économie canadienne, plutôt que de la dénigrer comme on le fait présentement Ottawa.

Auteur

  • François Bergeron

    Rédacteur en chef de l-express.ca. Plus de 40 ans d'expérience en journalisme et en édition de médias papier et web, en français et en anglais. Formation en sciences-politiques. Intéressé à toute l'actualité et aux grands enjeux modernes.

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