L’audace à la limite de l’impertinence

Le Festival du film juif du 5 au 15 mai

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Publié 03/05/2016 par Janine Messadié

Célébrant ses 24 ans cette année, le Festival du film juif de Toronto, qui compte parmi les dix plus importants festivals d’Amérique du Nord, nous revient du 5 au 15 mai, avec une excellente programmation faisant place à des films de grande qualité, souvent primés dans de prestigieux festivals de cinéma internationaux.

Avec quatre premières mondiales, 11 premières nord-américaines, 31 premières canadiennes et 12 premières torontoises, incluant sept films français ainsi qu’une production France-Canada, le TJFF a de quoi réjouir les festivaliers avec un cinéma audacieux, libre, percutant, drôle, et parfois même impertinent, nous montrant les mille-et-un visages d’Israël et de sa diaspora, dont la culture est riche et plurielle.

Made in France

Léon Blum: Haï et adoré, de Julia Bracher/ Hugo Hayat (France, 2015). Un documentaire captivant – récit à la fois historique et intime sur le parcours politique et personnel de Léon Blum, l’homme de tous les combats, un être cultivé, profondément engagé, qui a lutté pour les congés payés, la semaine de 40 heures, la représentation des femmes au gouvernement. Il était adoré du peuple ouvrier, mais c’était aussi l’homme le plus le plus haï de la IIIe République.

L’or rouge, de Philippe Baron (France, 2014) /Première nord-américaine. Film de 52 minutes construit à base d’archives retraçant l’histoire de la transfusion sanguine. En Juin 1944, les armées alliées débarquent sur les côtes de Normandie.

Dans leurs soutes et leurs frigos, des dizaines de milliers de litres d’un liquide précieux: le sang humain, sauveur de vies.

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Mais y-a-t’il un lien entre sang et race? Le médecin militaire Herbert Stern, qui participe au Débarquement, nous raconte son histoire et celle de l’histoire de la transfusion sanguine, les difficultés scientifiques et techniques qu’il a fallu surmonter, ainsi que les affrontements virulents sur fond de racisme.

Martin Buber, itinéraire d’un humaniste, par Pierre-Henry Salfati (France 2015). Présenté en première mondiale le film de Salfati (Gainsbourg par Gainsbourg) nous fait le portrait de Martin Buber (1878-1965), philosophe de l’altérité (Je et Tu) et de la piété mystique (Les récits hassidiques) qui fut un infatigable sioniste, partisan de la coexistence pacifique et ennemi des totalitarismes.

Figure majeure du judaïsme berlinois avant-guerre, son destin, croisera celui de Freud, d’Einstein, de Rosenzweig, de Scholem et de Ben Gourion.

Mobile Étoile (Night Song), de Raphael Nadjari (France-Canada, 2016). Un drame musical qui plaira aux mélomanes, amoureux de l’art lyrique. On y découvre des musiques françaises sacrées, véritables trésors du patrimoine, composées pour les synagogues de France fin XIXe-début XXe.

Aux côtés de l’actrice française Géraldine Pailhas, le casting compte plusieurs acteurs québécois, entre autres Luc Picard, Raymond Cloutier, Natalie Choquette, Éléonore Lagacé, Marcel Sabourin, Dorothée Berryman et Paul Kunigis.

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Louis-Ferdinand Céline, d’Emmanuel Bourdieu (France, 2016). Cinquième long-métrage du philosophe, essayiste, auteur de théâtre, scénariste et réalisateur Emmanuel Bourdieu, ce biopic raconte la visite en 1948 d’un jeune universitaire juif américain, Milton Hindus, venu rencontrer Céline en exil forcé au Danemark pour ses positions antisémites durant la Seconde guerre mondiale.

Emmanuel Bourdieu s’est inspiré du livre de Milton Hindus, L. F. Céline, tel que je l’ai vu (L’Herne, 1969), pour réaliser ce film et a fait appel à l’immense acteur Denis Lavant pour interpréter le personnage complexe de Céline.

Je compte sur vous (Thank You For Calling), deuxième film de l’acteur-réalisateur Pascal Elbé (France, 2015), ce film retrace les arnaques de Gilbert Chikli, l’un des plus grands escrocs du XXIe siècle.

À l’époque des attentats de Madrid et de Londres, il profitait de la confusion et de la peur du terrorisme pour s’infiltrer dans les banques comme un expert de la direction générale de la Sécurité extérieure (DGSE). Il aurait délesté plus d’une cinquantaine de banques d’un montant total de 43 millions d’euros.

Les Yatzkan, joli petit film de Anna-Célia Kendall (France, 2014). Après le décès de sa mère, la réalisatrice découvre, dans un fatras d’archives, les fragments d’une histoire familiale qui ne lui a jamais été racontée.

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Entre ses recherches sur Internet, des retrouvailles émues avec des cousins d’Amérique qu’elle n’a jamais connus et un voyage dans les plaines enneigées, Anna-Célia Kendall-Yatzkan retrace les pas de ces ancêtres, faisant un travail de mémoire sur ce passé méconnue.

Ouverture et clôture

Le film d’ouverture, Natasha de David Bezmozgis, en présence du réalisateur torontois, est inspiré de son livre primé Natasha and Other Stories.

Le film raconte une histoire d’amour interdite entre deux adolescents. Mark (Alex Ozerov) un fils d’immigrants juifs russes vivant en banlieue de Toronto et sa belle cousine de 14 ans, Natasha (Sasha K. Gordon), une adolescente sexuellement précoce au sombre passé.

Every Face Has a Name est le documentaire largement primé du réalisateur et producteur suédois Magnus Gertten qui clôt le festival.

C’est un film émouvant, dans lequel des survivants de la Seconde Guerre mondiale reviennent sur leur propre histoire, alors qu’on les voit sur des images tirées d’un film tourné par la télévision nationale suédoise le 28 avril 1945. Cette journée-là, ils étaient parmi les milliers de réfugiés des camps de concentration qui arrivèrent par bateau dans le port de Malmö en Suède.

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Personnalités

Quelques très bons documentaires honorant des Canadiens qui ont fait leur marque dans la ville reine complètent la programmation.

Honest Ed Mirvish: The World’s Most Unusual Shopkeeper. Film sur Ed Mirvish, le commerçant le plus insolite au monde, dont le magasin de détail fermera définitivement ses portes le 31 décembre 2016.

Number Guys, de Vanessa Jung film sur David Teitel, le caissier plus grand que nature du magasin The Big Carrot.

Building History: The Story of Benjamin Brown, l’architecte de nombreux bâtiments emblématiques de Toronto (y compris le Club de la Faculté de l’université de Toronto, l’édifice Balfour, l’édifice Herman au Dundas Square, et la synagogue Beth Jacob).

The Singing Abortionist, sur la vie du médecin, activiste militant et survivant de l’Holocauste Henry Morgentaler, mort à Toronto le 29 mai 2013 à l’âge de 90 ans.

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Vibrant hommage

Pour honorer la carrière cinématographique de l’actrice et réalisatrice Ronit Elkabetz, décédée le 19 avril dernier des suites d’un cancer à l’âge de 51 ans, le TJFF a ajouté à sa programmation un documentaire intimiste sur la vie et la carrière de cette actrice au regard intense, femme engagée, militante des droits des femmes et critique de la société israélienne, l’ambassadrice du nouveau cinéma israélien a l’étranger.

Réalisé par Nir Bergman (Broken Wings, Yona), A Stranger in Paris suit Elkabetz entre Israël et la France, où elle avait tourné plusieurs films dont La fille du RER (2009) d’André Téchiné, Tête de Turc, de Pascal Elbé (2010), Cendres et sang (2010) de Fanny Ardant, ou encore la série Trépalium d’Arte (2016).

A Stranger in Paris est projeté le 12 mai à 13h au Innis Town Hall. L’entrée est libre.

Auteur

  • Janine Messadié

    Communicatrice d'une grande polyvalence. 30 ans de journalisme et de présence sur les ondes de Radio-Canada et diverses stations privées de radio et de télévision du Québec et de l’Ontario français. Écrit depuis toujours...

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