Viola Léger: de la langue de la Sagouine à celle de Musset

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Publié 21/10/2008 par Annik Chalifour

D’emblée la merveilleuse Viola Léger ouvre la porte sur son intérieur. Son langage est simple et profond à la fois. Il va droit au coeur. Ses yeux bleus pétillent de joie intense. Elle adore ce qu’elle fait.

Viola Léger joue le rôle du Choeur dans le chef-d’oeuvre de Alfred de Musset, On ne badine pas avec l’amour, une production signée TfT (Théâtre français de Toronto) avec une mise en scène par Diana Leblanc, présenté au Berkeley Street Theatre du 22 octobre au 8 novembre 2008.

«À travers mon rôle je touche en plein coeur les états d’âme des personnages de Musset. Maintenant que j’ai mis en bouche les mots de ce grand classique joué depuis 200 ans, je comprend la grande beauté du texte. Je déguste avec plaisir le mot choisi et le rythme», dit Viola Léger.

«Pour moi, le mot est sacré. C’est un fruit qui part de l’intérieur, qui représente toutes les étapes (le printemps, la semence, la pluie, le soleil…) de sa sortie vers l’extérieur. ajoute-t-elle.

«Musset a écrit la pièce quand il était très jeune (24 ans). Le texte est un reflet de sa vie intérieure, un mélange de profondeur et d’idées folles sur l’amour, comme dans la vraie vie. Quand on touche un classique, on touche un sujet qui dure éternellement. L’amour et ses tiraillements, la lutte des émotions décrits selon Musset sont toujours d’actualité, ils font partie de la nature humaine pure laine.»

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On ne badine pas avec l’amour fut écrit par Musset en 1834. À cette époque on ne parlait pas ouvertement de liberté sexuelle. Pourtant, c’est bien de cela qu’il est question au sein des débats où les personnages féminins ont une grande indépendance d’esprit, et les personnages masculins se remettent en question face aux exigences de leurs compagnes. Un reflet des amours houleuses d’Alfred de Musset avec George Sand. On y retrouve de grands points en commun avec la vie contemporaine. De quoi susciter de fortes réflexions chez les générations d’aujourd’hui.

Mme Léger ajoute «c’est notre tâche comme comédiens d’incarner en chair et en sentiment l’intérieur de l’auteur et le rendre accessible au public. À travers mon rôle du Choeur, je revis l’intensité des moments vécus avec les personnages. Tour à tour je dialogue avec eux, j’informe le public et lui explique ce qu’il ne peut pas voir, je participe et suis témoin à la fois d’événements tantôt terribles ou loufoques. Mon rôle évolue selon la vision du metteur en scène.»

Selon la conception de la mise en scène par Diana Leblanc, la pièce se déroule dans un décor de 1949.

«C’est une traite», mentionne Viola Léger, «de jouer pour la prémière fois un classique à cause de mon accent. Mais je peux offrir mon vécu et mes émotions. C’est la langue du coeur d’ici. Je suis très heureuse de travailler avec Diana Leblanc que je connais depuis l’époque de Albertine en cinq temps il y a 20 ans.»

«Mon prochain projet, nous informe Mme Léger, commencera au début de décembre avec les pratiques au Théâtre de l’Ile à Gatineau en vue de la présentation du 7 janvier au 14 février 2009 de la pièce d’Antonine Maillet intitulée Les Troisses

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Depuis 1993, Viola Léger passe ses étés au Nouveau-Brunswick, près de Bouctouche, au Pays de La Sagouine, où elle donne des spectacles sous les traits de son personnage de Sagouine aux touristes et à son public fidèle. De 75 000 à 80 000 visiteurs se présentent annuellement au Pays de la Sagouine afin de savourer le monde d’Antonine Maillet et toute la culture acadienne.

Viola Léger est bien connue pour son rôle de La Sagouine dans la pièce d’Antonine Maillet qu’elle a joué plus de 2 000 fois tant en anglais qu’en français à travers le Canada. Mais elle n’est pas seulement La Sagouine… On la retrouve souvent dans d’autres pièces d’Antonine Maillet: La Joyeuse Criée, La Contrebandière, Le Bourgeois Gentleman, Évangéline Deusse. On la voit aussi dans La ménagerie de verre en 1989 au Théâtre Populaire d’Acadie, et dans les pièces La visite des sauvages, Harold et Maude, Memoir, House of Bernarda Alba, The Gin Game, Albertine en cinq temps de Michel Tremblay, à Toronto en 1999, dans Grace et Gloria de Tom Ziegler, entre 1998 et 2000, tant au Théâtre du Rideau Vert qu’ailleurs au pays.

En 2003, elle a participé aussi à Histoire d’eau, un spectacle de musique, de poésies et de chansons avec Roger Lord et Calixte Duguay, qui a lieu à Caraquet, au coeur de l’Acadie. Durant l’été 1988, elle a donné un spectacle intitulé Éloises et étoiles avec la chanteuse Angèle Arsenault.

Viola Léger a aussi fait du cinéma et de la télévision. Sur grand écran, on peut la voir dans Cap Lumière (1986) de Monique LeBlanc, Le violon d’Arthur (1991) de Jean-Pierre Gariépy et Le secret de Jérôme (1994) de Phil Comeau.

À la télévision, elle incarne La Sagouine dans la série du même nom, en 1976. Elle est de la distribution de Libre-échange (1990-1991) et de Bouscotte de Victor-Lévy Beaulieu, entre 1997 et 2001.

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Mme Léger a reçu tout au long de sa carrière de nombreuses distinctions honorifiques, dont Chevalier de l’Ordre de la Pléiade en 1978, la Médaille du Conseil de la Vie Française en Amérique en 1987, Officier de l’Ordre du Canada en 1989, Chevalier de l’Ordre Français des Arts et des Lettres en 1991, Prix d’excellence dans le domaine des arts en 1995 par le Gouvernement du Nouveau-Brunswick, et L’Ordre des Francophones d’Amérique le 21 mars 1998, par la Présidente d’honneur Madame Louise Beaudoin. Le 13 juin 2001, elle est nommée par le Premier Ministre Jean Chrétien au Sénat Canadien.

Viola Léger est diplômée en éducation et détentrice de plusieurs doctorats honoris causa. Elle a fondé La Compagnie de Théâtre Viola Léger et a fait de nombreuses mises en scène. Elle incarne à la perfection la francophonie acadienne, non seulement en Acadie, mais aussi au Québec, au Canada anglais, en Louisiane et en Europe. Elle est une très grande dame des arts de la scène du Canada.

Guy Migneault, directeur artistique du TfT, précise que la pièce s’adresse à tous les jeunes et moins jeunes amateurs de théâtre, tant les francophones que les francophiles. «Fidèle à notre rôle de contribution au développement culturel et pédagogique de la communauté francophone de Toronto, nous offrirons également cinq spectacles en matinées pour les écoles.»

Info: www.theatrefrancais.com

Auteur

  • Annik Chalifour

    Chroniqueuse et journaliste à l-express.ca depuis 2008. Plusieurs reportages réalisés en Haïti sur le tourisme solidaire en appui à l’économie locale durable. Plus de 20 ans d'œuvre humanitaire. Formation de juriste.

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