Une plus longue vie de famille pour les grizzlys

ours brun
Grizzly mâle au Nunavut. (Photo: Andrew E. Derocher, Université de l’Alberta)
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Publié 27/04/2018 par Isabelle Burgun

Une meilleure réglementation de la chasse pousserait les femelles grizzly à garder plus longtemps les petits auprès d’elles. Les auteurs d’une récente étude l’ont constaté en Suède, où il est interdit de tuer les groupes familiaux et les femelles avec leur portée.

Le changement est notable dans le comportement maternel de ces grands ours bruns, comme les appellent plus souvent les scientifiques. «Une mère sur trois va changer de tactique de reproduction en maintenant auprès d’elle ses petits pour une durée de 2 ans et demi plutôt qu’un an et demi», rapporte l’étudiante au doctorat en biologie de l’Université de Sherbrooke, Joanie Van de Walle.

Des chercheurs scandinaves ont suivi pendant près de 30 ans ces grands carnivores sauvages, et l’équipe québéco-norvégienne a pu consulter les données portant sur les stratégies de reproduction en comparant avec les registres de chasse.

Enregistrer les prises sportives

En Suède, les chasseurs doivent faire enregistrer leurs prises sportives, ce qui a permis de connaître le taux de survie des femelles — qui prend du mieux depuis 1986, avec la protection assurée par la règlementation.

Ces ourses vivent généralement plus de 30 ans et peuvent avoir des portées de 1 à 4 oursons, dès que la femelle atteint sa 4e année. «Il y a de nombreux échecs, c’est dès la 5e année que la femelle va commencer à avoir des portées viables, avec en moyenne deux oursons», précise la chercheuse.

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La femelle assure nourriture et protection aux petits pendant une période plus ou moins plus longue — qui peut aller jusqu’à 2 ans et demi — protégeant notamment les rejetons plus malingres des «infanticides» commis par les mâles. Elle les garderait aussi près d’elle, se sont rendu compte les chercheurs, pour les préserver des chasseurs.

Pour ces derniers, il n’y a pas de quota individuel, uniquement des quotas régionaux. Et il est possible de chasser tout ours de plus d’un an et demi. Cette chasse à l’ours devient de plus en plus populaire en Scandinavie.

Moins de mâles, plus d’infanticides

Les chercheurs ont réalisé des simulations afin de prédire les répercussions que pourrait avoir l’allongement de cette «vie de famille». Comme les femelles, moins disponibles pour se reproduire, vivent plus longtemps, cela pourrait, à long terme, modifier la structure des populations.

De plus, s’il y a davantage de femelles adultes, les mâles, eux, se font plus rares, car ils sont plus chassés. Une diminution qui pourrait aussi modifier leur répartition sur le territoire.

«Les mâles vont se déplacer plus souvent, ce qui peut influencer la survie des petits, car l’espace vacant va offrir une opportunité au nouveau mâle, celle d’avoir accès à de nouvelles femelles», relève la chercheuse. À condition pour eux d’éliminer les petits qui les accompagnent.

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Enfin, en plus de la chasse, pèsent sur l’équilibre des populations d’autres menaces, telles que la déforestation et l’augmentation des accidents routiers.

Peut-être différent au Canada

Une étude intéressante qui apporte de nouvelles connaissances sur les grizzlys de Scandinavie, souligne le biologiste de l’Université de l’Alberta, Andrew E. Derocher.

Il admet que la chasse a le potentiel d’altérer les éléments de l’histoire de vie des grands carnivores, comme les grizzlys, mais ajoute qu’en général, ces grands animaux situés au sommet de la chaîne alimentaire sont plus sensibles aux changements environnementaux, qui «touchent tous les individus plutôt qu’uniquement ceux exposés à la chasse. C’est ce qu’on constate déjà chez les ours polaires».

Au Canada, la chasse à l’ours — des trois espèces: ours noirs, grizzlys et ours polaires — s’avère, tout comme en Suède, fortement biaisée contre les mâles, en partie à cause de la protection des mères accompagnées de petits.

Il y a toutefois de nombreuses différences entre l’écologie des grizzlys en Scandinavie et ceux au Canada. «C’est pourquoi l’application de ces résultats à nos populations reste discutable», relève le spécialiste des ours polaires et des grands mammifères nordiques.

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«Cette nouvelle étude illustre le possible lien entre les tactiques de reproduction des femelles et la chasse, mais ça reste encore difficile à évaluer», souligne l’expert qui se veut optimiste quant aux impacts de cette chasse à l’ours. «Les impacts sur la population des ours pourraient être réduits par une bonne gestion, lorsque les conditions environnementales sont favorables.»

Auteur

  • Isabelle Burgun

    Journaliste à l'Agence Science-Presse, média indépendant, à but non lucratif, basé à Montréal. La seule agence de presse scientifique au Canada et la seule de toute la francophonie qui s'adresse aux grands médias plutôt qu'aux entreprises.

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